Soutenance de thèse : Olé Alain Kam décrypte le régime juridique des autorités administratives indépendantes en droit burkinabè
Olé Alain Kam a soutenu sa thèse de doctorat ce vendredi 8 novembre 2024, à l’université Thomas Sankara. Le thème sur lequel ce juriste, connu du paysage politique pour avoir été député à l’Assemblée nationale s’est appesanti est : « Réflexion sur les autorités administratives indépendantes en droit burkinabè ». Composé de plus de 400 pages, le document a été apprécié par Pr Jean Du Bois De Gaudusson, qui était le président du jury. Le directeur de thèse de l’impétrant était Pr Seni Ouédraogo. Officiaient en tant que rapporteurs pour cette soutenance, les Professeurs Djibrihina Ouédraogo, Awalou Ouédraogo et Flavien Sawadogo. Pr Augustin Loada lui, a joué le rôle d’examinateur. En plus d’accepter ses travaux de recherche et de lui délivrer la mention Très honorable, le jury a autorisé la publication en l’état de sa thèse.
Pour faire simple, les autorités administratives indépendantes sont des institutions administratives, qui se distinguent de par leur caractère indépendant. « L’indépendance renvoie au fait qu’elles ont une liberté d’action dans leurs activités que l’administration classique n’a pas. Elles doivent par exemple avoir les ressources pour fonctionner conformément à leurs missions » a, grosso modo, clarifié Olé Alain Kam.
En s’intéressant au thème « Réflexion sur les autorités administratives indépendantes en droit burkinabè », le problème posé était le régime juridique de ces institutions. Son travail a donc constitué en une analyse des textes qui régissent ces différentes institutions et ce qui est observé dans la pratique. Entre autres autorités administratives indépendantes, on peut citer : l’Autorité supérieure de contrôle d’État et de lutte contre la corruption (ASCE-LC), l’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes (ARCEP), le Conseil supérieur de la communication (CSC).
Une indépendance pas toujours avérée
Tout en relevant un manque d’homogénéité des lois de ces autorités administratives, les conclusions de l’impétrant étaient que ces dernières ne jouissent pas d’une indépendance telle que voulue par les textes même qui les régissent. Et l’une des raisons de cette lacune est leur manque d’autonomie financière. Avec le contexte sécuritaire, il souligne que la situation ne va pas pour le mieux. Prenant exemple sur les sanctions faites à certains médias par l’État, tels que RFi et France 24, le juriste affirme clairement dans ses travaux que cela ne relevait pas de la compétence de celui-ci, mais plutôt du Conseil supérieur de la communication. « Certaines des autorités administratives indépendantes sont en train de perdre petit à petit leur indépendance. Le pouvoir public estime qu’au regard du contexte, le gouvernement doit pouvoir être celui-là qui prend les décisions, même marcher sur les compétences des autorités administratives indépendantes », a-t-on capté du développement du doctorant.
Deux défis pour le législateur
Au regard de ce qui précède, deux défis se posent au travers des lignes du document de Olé Alain Kam. Le premier est d’harmoniser les textes, notamment, le statut de ces autorités administratives indépendantes. En clair, créer une homogénéité des textes relatifs aux autorités administratives indépendantes afin de les ranger dans le dispositif institutionnel. Le deuxième tient en la constitutionnalisation de ces différentes autorités administratives indépendantes, pour s’assurer de leur indépendance. Une conclusion que Pr Djibrihina Ouédraogo invite à relativiser, car dit-il : « si pour conférer une indépendance aux autorités administratives, il faut nécessairement que ces dernières sont inscrites noir sur blanc dans la constitution, on finira par la dévaloriser ».
Une thèse originale
En plus d’accepter les travaux de recherche de l’impétrant et de lui délivrer la mention Très honorable, le jury a autorisé la publication en l’état de sa thèse. « C’est un document qui remplit toutes les qualités attendues d’une très bonne thèse en Droit » a jugé Pr Djibrihina Ouédraogo. Les professeurs Jean Du Bois De Gaudusson, Awalou Ouédraogo et Flavien Sawadogo ont eux aussi apprécié le travail abattu, soulignant la plume aiguisée, correcte et légère de l’impétrant, et saluant au passage le parallèle fait avec le droit anglo-saxon.
Pour Pr Augustin Loada, examinateur, le doctorant a fait preuve d’originalité en alliant plusieurs disciplines à la fois. « Vous avez fait à la fois du droit administratif, du droit constitutionnel, du droit comparé. Il y a aussi une dimension science administrative qui transparaît dans votre travail et qui relève d’une valeur ajoutée, parce qu’on ne peut pas comprendre certaines choses si on n’essaie pas de les expliquer au-delà du régime juridique... Malgré cette ouverture, vous êtes resté un juriste constant ! Un juriste qui révèle ses qualités dans l’écriture. Vous présentez des arguments et des thèses, vous les discutez et les réfutez avec une certaine maîtrise et cohérence », a-t-il salué.
Des perspectives après la thèse
Olé Alain Kam a été fonctionnaire au ministère des Finances dans les années 2003-2004. Après trois années de fonction, l’homme a ouvert son bureau d’études. Il est en outre, engagé politiquement au sein de l’Union pour le progrès et le changement (UPC), effectue plusieurs missions en tant que consultant en droit des affaires et en gestion de projet. Avec ce sésame, le désormais Dr en droit entend partager ses connaissances avec les plus jeunes, dans les universités. « Je n’entends pas repartir être fonctionnaire pour enseigner à l’université. Mais de temps en temps, j’essaierai de donner un coup de main dans les universités privées qui ont recours aux docteurs pour les accompagner dans la formation des étudiants. Je vais surtout écrire beaucoup d’articles qui paraîtront dans les revues spécialisées, pour que les étudiants les consultent pour leurs travaux de recherche », s’est-il projeté.
Erwan Compaoré
Lefaso.net