Burkina / Médias : En toute indépendance
Dans le cadre de la commémoration de la journée nationale de la liberté de la presse, célébrée le 20 octobre 2024, le Centre national de presse Norbert Zongo et la presse nationale publient quatre éditos de Norbert Zongo toujours d’actualité, pour interpeller sur la situation de la presse. Nous vous proposons de lire le troisième de ces quatre éditos.
« Nous voulons une Presse plus responsable ! ». Une si honorable quête. Mais qu’est-ce qu’une presse responsable dans nos pays ?
Il y a sans doute plusieurs réponses à cette question. Selon la sensibilité des uns et des autres. Selon leur degré de compréhension, selon leur culture, leur option politique.
Qu’est-ce qu’une Presse responsable si son public ne lui reconnaît aucune responsabilité ; pire, si son public lui-même ne veut assumer aucune responsabilité ? La Presse tire sa force, sa responsabilité, sa respectabilité, du public, nous ne cesserons jamais de le répéter. Ce n’est pas le Washington Post qui a fait démissionner le président Nixon, mais la réprobation de son public à la publication des malversations et des fraudes commises par le président. La Presse n’a de pouvoir que celui que lui confère son public.
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La Presse de nos Etats, à l’heure des processus démocratiques, ne souffre pas seulement du manque de soutien de la part du public -elle pourrait même s’en passer- mais surtout de l’indifférence de ce public par rapport aux questions abordées. Vouloir donc une Presse plus responsable, c’est vouloir un public plus responsable, avec une conscience collective plus aiguë, plus prononcée.
Sinon à quoi lui servirait la responsabilité de la Presse ? Qu’apporterait-elle à la société ?
La Presse sous tous les cieux, est un faiseur d’opinions. Mais une fois ces opinions faites, à quoi servent-elles, dans un pays comme le Burkina ? Parfois à alimenter des commentaires dans des débits de boisson. Car très souvent, pour être optimiste, le public ne tient aucunement compte de l’opinion qu’il s’est fait à la lecture des journaux.
Par exemple : la Presse -responsable- dénonce les magouilles ou les détournements d’un responsable politique. La réprobation du public est du bout des lèvres. C’est avec le journal en poche que certains aborderont cet homme pour le complimenter et même prendre à partie le « torchon » ou le « tract » du vulgaire scribouillard qu’est le journaliste.
Au seuil de cette année, qui annonce sans doute de rudes batailles pour la Presse, L’Indépendant formule le vœu d’avoir un public plus responsable, capable de galvaniser ses efforts et de soutenir ses faiblesses.
Il n’y aura jamais une presse indépendante sans un public désireux de l’aider à faire changer les choses.
Nous réitérons notre serment : L’Indépendant sera indépendant ou ne sera pas.
L’Indépendant n°22 du 28 décembre 1993