Lucie Kaboré : Itinéraire d’une battante, première femme conductrice en Haute Volta
Née le 27 novembre 1926, Lucie Kaboré a pour identité complète : Ouo Lucie Thérèse Bernadette Kaboré née Traoré. Elle est la fille de Kintapri Traoré, ancien combattant de la 2e guerre mondiale, classe 22 décédé le 12 février 1992 et de Diéssogona Madeleine Traoré, ménagère, décédée le 26 mars 1973. D’origine toussian, elle quitte son village natal Sidi (province du Kénédougou) pour se rendre à Bobo-Dioulasso où elle fréquente l’école primaire, de 1934 à 1940 ensuite l’Ecole supérieure de Bingerville (Côte-d’Ivoire) de 1940 à 1944 et enfin l’Ecole normale fédérale de jeunes filles de Rufisque (Sénégal) de 1944 à 1945. Ces années d’études seront couronnées par l’obtention du Certificat d’études primaires élémentaires (CEPE), le Certificat d’études supérieures (CEPS) et le Certificat d’aptitude pédagogique (CAP).
Le 23 Juillet 1949, à la mairie d’Abidjan et le 17 septembre 1949 à l’église de Treichville, elle épouse Monsieur Yemdaogo Dominique Kaboré, ancien élève de William Ponty, administrateur civil de la France d’Outre-mer. Son mari fut un grand leader et un grand patriote du temps colonial dans les années 40 qui a participé au combat de la lutte pour la libération et l’indépendance des pays africains. Pour ses opinions politiques de plus en plus vives pour l’indépendance des pays africains, son mari était contraint par le colonisateur de quitter en 1949 la Côte-d’Ivoire et de rejoindre avec elle la Guinée Conakry. Lucie Kaboré va faire carrière dans l’enseignement, mais au-delà de cette fonction administrative, elle animera des activités sociales de grande envergure.
Lucie Kaboré a œuvré auprès de son mari pour que les pays africains recouvrent leurs indépendances, leur autonomie et leur liberté. Les indépendances acquises, c’est sur le plan de l’enseignement que la bataille va se mener. Enseignante, elle a formé plusieurs cadres du pays et contribué à ce que le statut des femmes soit valorisé dans le milieu éducatif.
En 1958, elle est la première femme voltaïque à obtenir un permis de conduire (permis AOF du 04 décembre1958). Elle devint alors la première conductrice voltaïque de l’époque. Son mari lui offre comme moyen de locomotion une Deux chevaux de marque Citroën, communément dénommée « Babi ».
Madame Lucie Kaboré ne fut pas simplement une enseignante maîtrisant très tôt le volant, elle a été aussi une militante infatigable pour la promotion des droits de veuves et des orphelins et leur prise en charge. Après le décès de son mari en 1972, elle sera confrontée à la dure réalité du veuvage. Très vite, elle brise le silence et crée une association pour faire entendre la voix des sans voix.
Pendant quatre décennies, elle travaille d’arrache-pied malgré le poids de l’âge pour satisfaire les veuves et les orphelins. Elle s’est éteinte en 2018 après de nombreuses années de sacrifices pour l’épanouissement des plus vulnérables. Pour la présidente actuelle de la fondation Lucie Kaboré/ Traoré, Dr Alice Zoungrana / Kaboré, Lucie était une femme au cœur d’ange qui a tout donné pour l’autonomie et la liberté des veuves et des orphelins.
Wendkouni Bertrand Ouédraogo
Lefaso.net