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Slobodan Milosevic : un cadavre encombrant dans le placard du TPI

Publié le mardi 14 mars 2006 à 08h16min

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C’en est fini pour le célèbre inculpé du Tribunal pénal international (TPI). Et pour cause, l’ancien président serbe, Slobodan Milosevic, jugé depuis plus de quatre ans à la Haye, au Pays Bas, pour crimes de guerre, crimes contre l’humanité et génocide dans l’ancienne Yougoslavie dans les années 1990, a été retrouvé mort le samedi 11 mars 2006, dans la matinée, dans sa cellule de la prison Scheveningen.

Né le 29 août 1941 à Pozarevac en République de Serbie, Slobodan Milosevic avait été arrêté le 1er avril 2001 par le gouvernement serbe avant d’être expulsé vers la Haye pour y être inculpé pour sa responsabilité dans la mort de 900 Kosovars et la déportation de 740 000 personnes.

Trois actes d’accusation pesaient sur l’ancien président de la Serbie, correspondant aux trois conflits majeurs (la guerre en Croatie (1991-1995) ; le conflit en Bosnie (1992-1995), la plus meurtrière, et la guerre au Kosovo (1998-1999) qui ont déchiré l’ex-Yougoslavie et fait plus de 200 000 morts dans les Balkans.

Milosevic était le tout premier président à faire face au tribunal pénal international, ce qui faisait de son procès le plus important jamais organisé en Europe depuis celui de Nuremberg, qui avait permis de juger des chefs nazis après la seconde guerre mondiale.

Si déjà de son vivant, la remise de Milosevic au TPI avait provoqué, entre autres, l’assassinat, le 13 mars 2003, de l’ancien premier ministre de Serbie, Zoran Djindjic, toujours considéré dans certains milieux favorables à Slobodan comme un traître coupable d’avoir livré leur héros à la justice internationale, sa mort est sujette à polémique. Empoisonnement, mort naturelle ou suicide ?

Un flou total règne à la Haye où l’homme, qui souffrait de problèmes cardiovasculaires, aurait écrit la veille de son décès à l’ambassadeur russe pour lui affirmer qu’il avait reçu une copie d’analyse prouvant que son sang contenait des traces à haute dose d’un médicament servant exclusivement au traitement contre la lèpre et la tuberculose. Ces médicaments, dit-on, neutraliseraient l’action de ceux que prenait Milosevic contre l’hypertension et les problèmes cardiaques.

Cette révélation fracassante ajoutée au refus, en février, du TPI de laisser le détenu se faire soigner en Russie suite à sa demande, de crainte qu’il ne prenne la poudre d’escampette, a renforcé la thèse de l’assassinat.

Certes, les résultats de l’autopsie du corps, le dimanche 12 mars 2006, révèlent que l’illustre prisonnier a succombé à un infarctus du myocarde et ceux de l’examen toxicologique ont indiqué, hier, aux environs de 10 h, selon le toxicologue Ronald Uges, que Slobodan Milosevic a délibérément pris un médicament non prescrit, « annulant » l’effet de son traitement contre l’hypertension, mais reste à savoir si les mouvements nationalistes et amis du défunt avaleront cette thèse du suicide, surtout que le travail a été commandité par le TPI, une instance qui n’a jamais été reconnue par Slobodan de son vivant.

On sait que l’ancien président serbe a vécu une enfance difficile marquée par le suicide de ses deux parents, mais de là à croire que ce dernier aurait eu le virus de mettre, lui-même, fin à ses jours, il n’y a qu’un pas à franchir.

Dans cette galère, c’est le TPI, qui n’est pas à son premier cadavre enregistré dans ses geôles, qui vient d’étaler aux yeux du monde entier son cadavre fort encombrant.

Déjà que le TPI et la Cour pénale internationale (CPI) sont, à la limite, désavoués, voire boycottés par certains grands du monde à l’image des Etats-Unis d’Amérique, il est évident que ces instances judiciaires risquent d’être une coquille juste bon pour traquer les plus faibles.

Avec la mort du détenu du TPI, qui renforcera davantage la méfiance des mouvements nationalistes serbes à l’endroit de celle-ci, la tâche risque de devenir plus ardue pour la justice internationale de mettre fin à la cavale de Radovan Karadzic, ancien chef politique des Serbes de Bosnie, et de Ratko Mladic, ancien chef militaire des Serbes de Bosnie, inculpés de génocide par le TPI pour le massacre des musulmans de l’enclave de Srebrenica en juillet 1995.

Et que pourraient penser les partisans de Saddam Hussein du TPI si ce dernier était condamné et exécuté alors qu’un client sérieux vient de lui échapper d’entre les mains ?

Autre dossier, autres ennuis en perspective... Seule consolation du tribunal de la Haye : une éventuelle satisfaction des familles victimes des différents massacres de voir leur « bourreau » rendre l’âme derrière les barreaux.

Cyr Payim Ouédraogo

L’Observateur

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