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La RDC malade de sa classe politique

Publié le vendredi 10 mars 2006 à 08h23min

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Si tout se passe bien, et si l’échéancier fixé pour mettre fin à la
transition est respecté, la République démocratique du Congo
entrera dans le giron des pays démocratiquement
fréquentables.

Mais, comme on le dit, avec des si, on mettrait
tout Paris et, pourquoi pas, tout Kinshasa dans une bouteille.
Cependant, après plus de trente ans de pouvoir dictatorial et
gabégique sous la baguette totalitariste du maréchal Mobutu, et
près de sept ans d’errements et de romantismes
révolutionnaires puisés dans les agendas des maquisards, on
ne peut jurer de rien.

En effet, si la communauté internationale
tente, tant bien que mal, à donner un visage démocratique au
Congo, il n’en demeure pas moins que dans cette jungle au
sens écologique et politique du terme, aucune feuille de route,
tracée en fonction de l’ondoiement de sa classe politique, n’est
linéairement empruntable.

En effet, comment civiliser des
maquisards et reconvertir des seigneurs de guerre habitués à
prendre le pouvoir en utilisant la courte échelle de la gâchette
facile, et les amener à s’asseoir sur la baïonnette des urnes qui
signifie la fin de leurs ambitions ?

Au total, la loi électorale qui
vient d’être adoptée au Congo ouvre la voie à une dizaine
d’élections législatives, provinciales, municipales, urbaines,
locales et présidentielle. De quoi aiguiser la rapacité de la
classe politique et exacerber les guerres de positionnement.

Certes, le Congo, cet immense scandale géologique, est
victime de la convoitise de certains pays occidentaux qui ont
encouragé sa partition en empires presque indépendants du
pouvoir central en vue de s’emparer de ses énormes richesses
par valets locaux interposés. C’est dire que le Congo est surtout
malade de sa classe politique autour de laquelle gravitent des
hommes interchangeables. Jusqu’à présent, ces hommes nous
ont habitués à leurs fantasmes en jouant parfaitement bien leur
rôle de clowns politiques sous les regards médusés du reste
de la population.

Véritables sponsors des convulsions actuelles
de leur pays, les hommes politiques, à moins de procéder à
leur renouvellement (pour ne pas dire leur nettoyage) complet,
semblent disqualifiés et discrédités pour remettre le pays, déjà
en lambeaux, de ses ruines. Certains de ces hommes
politiques qui, à l’épreuve du temps, auraient dû mériter des
galons de sagesse et de vertu, se comportent en véritables
bouffons qui n’auront jamais droit au Panthéon de la gloire.

Après avoir conduit leur pays dans une situation de pathologie
incurable, ils tentent, par des acrobaties, de perpétuer leurs
habitudes de prédateurs impénitents, omniscients et
omniprésents. C’est vrai que le Congo, après le Soudan et
l’Algérie, est le pays le plus vaste du continent. C’est vrai aussi
que pour recoller les morceaux d’un pays étripé par ses
vautours, il fallait tenter de ramener tout le monde à la raison en
lui attribuant une parcelle de pouvoir.

Mais, si l’unité du Congo
était une préoccupation de tous ces hommes, ils se seraient
moins abstenus de s’octroyer des postes inutilement
pléthoriques, budgétivores, inefficaces, et à l’intérieur desquels
les occupants se livrent à des duels fratricides. Le Congo est le
seul pays où cohabitent autant de vice-présidents, de
vice-gouverneurs ou de vice-ministres plus ou moins
indépendants les uns des autres.

Des pratiques dignes de
l’époque des régimes communistes. Selon les observateurs, le
gouvernement de transition ne tient plus l’hebdomadaire
Conseil des ministres. Chacun des chefs de clans préfère se
réfugier dans son réduit clanique ou ethnique, non sans
chercher à remporter la victoire avant le combat.

Ainsi, s’explique
la récente tentative de débarquer le président du Parlement de
transition, Olivier Kamitatu, sous prétexte que ce dernier aurait
trahi son propre camp. Mais dans cette République
démocratique du Congo, y a-t-il un homme qui n’a pas trahi ?

L’illustration du cas de trahison le plus criard nous a été donnée
par celui qu’on a coutume d’appeler le vieux routier de la
politique congolaise, Etienne Tshisekedi. A quoi servirait-il de se
réjouir du titre d’opposant historique quand tout cela se ramène
à des acrobaties qui n’ont pour unique but que d’assouvir sa
soif de pouvoir ?

Etienne Tshisekedi est tellement assoiffé de
pouvoir que ses incessants et pathétiques appels à la
démocratie sonnent souvent faux. N’avait-il pas "poignardé" le
maréchal Mobutu dans le dos en s’autoproclamant Premier
ministre de celui-ci lorsqu’il était pratiquement mourant ?

Le
geste de M. Tshisekedi n’était rien d’autre qu’un coup d’Etat,
même si le pouvoir du maréchal-président méritait un tel sort.
Plusieurs fois ministre du même maréchal, Tshisekedi ne peut
prétendre être politiquement vierge et irréprochable par rapport à
la situation actuellement peu enviable du Congo. Du reste, les
partisans de Tshisekedi, victimes de ses caprices, sont en droit
de lui demander des comptes.

A force de pratiquer la politique
de l’encerclement de l’araignée, il a fini par s’enfermer dans le
piège de son infantilisme et de sa myopie politiques.

En effet,
comment comprendre qu’un homme de la prétendue trempe de
Tshisekedi puisse, dans un premier temps, inviter ses
partisans à ne pas s’inscrire sur les listes électorales, et, dans
un second temps, exiger, une fois les opérations d’inscription
terminées, qu’on fasse un retour en arrière ? En somme, tout se
passe comme si l’histoire du Congo devait brusquement
s’arrêter là où commencent les humeurs de Tshisekedi.

Si le
Congo de l’après-transition devait être dirigé par un tel homme
(il n’est pas le seul), il faut croire que ce pays ne sera jamais
hors des zones de turbulences.

Les hommes politiques congolais ne semblent pas avoir
compris que l’engouement des Congolais pour se faire inscrire
sur les listes électorales, malgré l’insécurité, est la preuve que
l’Afrique souffre parfois plus d’absence de démocrates que de
démocratie.

"Le Fou"

Le Pays

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