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Situation en Côte d’Ivoire : Le consensus oui, mais...

Publié le jeudi 9 mars 2006 à 07h32min

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Laurent Gbagbo et C. Konan Banny

En visite de travail à Ouagadougou les 6 et 7 mars derniers, le Premier ministre ivoirien, Charles Konan Banny a déclaré à l’issue de l’audience que lui a accordée le président du Faso, que « le consensus » était désormais « privilégié » dans la résolution de la crise ivoirienne.

écouter le chef du gouvernement ivoirien, l’optimisme est de mise, quant à une résolution rapide et consensuelle de la crise qui déchire son pays depuis bientôt quatre ans. « Toutes les parties ont décidé de privilégier le dialogue lors du séminaire de Yamoussoukro » a en effet déclaré Konan Banny à l’issue de cette audience. Mieux, a-t-il indiqué, la mise en place de la Commission électorale indépendante a été débattue lors de la rencontre de Yamoussoukro, et, elle sera bientôt effective. A écouter Konan Banny, « tout baigne » donc, et le pari du 30 octobre 2006 comme date butoir pour l’élection présidentielle sera tenu.

Un bel optimisme que nous sommes enclins à partager, notre éditorialiste ayant rappelé que « tout le monde était fatigué de la crise ivoirienne » et chacun s’activait en conséquence pour y mettre fin (Sidwaya n°5542,P3). Sans jouer les rabat-joie, il convient cependant de souligner que des problèmes concrets restent en suspens, et que leur non-résolution pouvait valoir une « rechute » à la Côte d’Ivoire.

Le plus important à notre sens, se trouve dans le désarment des milices qui sévissent à l’Ouest du pays et à Abidjan, ainsi que celui des Forces Nouvelles. Chaque fois que le problème a été posé, les deux camps se sont renvoyé la balle, les milices pro-gouvernementales allant jusqu’à déclarer, qu’elles étaient armées en toute « légalité » si tant est qu’elles font face à une « agression extérieure ».

Tant que les rebelles ne « désarmeront pas, nous resterons toujours armés et prêts à riposter », ne cessent d’affirmer Charles Blé Goudé et Eugène Djué les deux « patrons » des milices pro-Gbagbo. De leur côté, les Forces Nouvelles exigent l’obtention de pièces d’identité ivoiriennes avant de désarmer. On le voit, l’approche consensuelle sur les questions du désarmement et de l’identification des Ivoiriens reste une vue de l’esprit, même avec le succès du récent sommet de Yamoussoukro.

Le Burkina-Faso « blanchi »

Et, il n’est pas superfétatoire de se pencher rapidement sur cette question contrairement à ceux qui arguent que l’on peut aller aux élections même avec un désarmement partiel.

Pour eux, pour peu que les forces neutres sécurisent les grandes villes et que l’on procède au cantonnement des Forces Nouvelles, que des élections générales peuvent se tenir dans le pays. Voilà qui n’est pas sans rappeler l’élection « bâclée » de Charles Taylor au Liberia avec au bout de quelques années, une résurgence du conflit civil suscitée par Mamadou Damateh Konney. On sait ce qu’il adviendra, avec la peur sur Monrovia, l’exil forcé de Charles Taylor et l’élection d’Ellen Johnson Sirleaf qui ne vient pas lever toutes les hypothèques.

La « question » Taylor n’est en effet pas résolue, tout comme celle de la rébellion de Damateh Konney sans oublier la colère froide et rentrée qui anime les partisans du footballeur George Weah qui estiment qu’on leur a « volé » la victoire. Si le navire libérien est resté à flots, c’est bien parce qu’à l’instigation de l’Oncle Sam pour qui la région de la Mano River (Liberia, Sierra-Léone, Guinée), est devenue stratégique et qui soutient en conséquence les efforts de facilitation de l’ONU dans le pays.

En Côte d’Ivoire, la donne est quelque peu différente, et, Washington n’a pas hésité à opposer une fin de non recevoir à la demande de l’ONU d’augmenter des troupes en Côte d’Ivoire.

Il faut dire que malgré sa relative perte d’influence en Côte d’Ivoire, Paris garde toujours la main dans le pays. Pas d’intérêts, pas d’action, dit le dicton et, si les positions restaient figées, il n’est pas sûr que l’après-élection soit de tout repos en Côte d’Ivoire. C’est dire que l’étape du désarment doit être abordée avec tact et détermination, afin que la paix ne soit toujours sous condition en Côte d’Ivoire.

Un enseignement positif de cette visite réside dans le fait que le Burkina-Faso est définitivement blanchi dans cette affaire. Konan Banny l’a dit, c’est un problème entre Ivoiriens et il appartient aux Ivoiriens d’abord de le résoudre. Par la suite, la communauté internationale pourra « apporter sa contribution ». Un discours qui tranche avec celui tenu par certains leaders politiques ivoiriens et qui est aussi suivi d’actes de bonne volonté de la part de Banny.

En un peu moins de trois mois de « règne » il a, en effet, rendu deux fois visite à Blaise Compaoré pour avoir ses « conseils avisés » pour la résolution de la crise. C’est dire que Banny à compris la quintessence du problème ivoirien, ce qui en soit, constitue une avancée notable. La Côte d’Ivoire touche au but et il faut l’aider résolument à l’atteindre.

Boubakar SY

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