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Omar Bongo : "On ne pourra pas aller à des élections en Côte d’Ivoire dans les délais prévus"

Publié le mardi 14 février 2006 à 07h39min

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Omar Bongo Ondimba

Le président gabonais, de passage en France, se prononce sur sa succession et sur la situation ivoirienne. Sur le premier point, Bongo estime qu’il n’y aura pas de dynastie au Gabon. Quant à la Côte d’Ivoire, il propose un triumvirat pour prendre la relève de Gbagbo.

Lors de votre rencontre avec le président Jacques Chirac, jeudi 9 février, vous avez évoqué la situation en Côte d’Ivoire. Au vu des derniers événements à Abidjan, pensez-vous que l’élection présidentielle prévue en octobre pourra être organisée ?

C’est fort peu probable. Il reste tant de problèmes à régler ! Le ramassage des armes, le cantonnement, la démobilisation des milices, l’identification des électeurs... La communauté internationale a jugé que le président (ivoirien) Laurent Gbagbo devait bénéficier d’une prolongation d’un an de son mandat. Le délai est trop court. On peut être assuré que d’ici à huit mois, les conditions menant à une élection ne seront pas remplies.

Il faut donc réfléchir à une autre solution...

Je préfère ne pas en parler. L’Union africaine n’a pas encore étudié le dossier. C’est d’ailleurs aux pays d’Afrique occidentale qui, avec l’ONU, ont préconisé la prolongation du mandat du président Gbagbo, de nous dire ce qu’il faut faire maintenant qu’on est proche de l’échec. Je ne crois pas qu’on pourra aller à des élections en Côte d’Ivoire dans les délais prévus. Il faut retourner à la case départ. Le Groupe de travail international (GTI) doit revoir la copie et proposer autre chose.

Quelle est la bonne approche ? Une présidence collégiale à partir d’octobre ou la recherche d’un homme providentiel ?

J’avais parlé il y a quelque temps d’un triumvirat. On m’avait dit non. Aujourd’hui, cette solution s’impose, me semble-t-il. Mais je n’irai pas plus loin. Chat échaudé craint l’eau froide... Moi, je préfère ne pas m’étendre sur la Côte d’Ivoire, surtout étant à Paris. On va dire que c’est Chirac qui m’a dit de dire ceci ou cela. Certes, j’ai une grande gueule et mon franc-parler, surtout sur un dossier comme celui de la Côte d’Ivoire qui concerne l’ensemble de l’Afrique, mais ça suffit comme ça.

Un nouveau gouvernement vient d’être formé au Gabon, au terme de l’élection présidentielle que vous avez emportée haut la main. Quarante-neuf ministres pour un pays d’un million d’habitants : ce n’est pas trop ?

Vous savez, en Afrique, le matin on vous dit : "Il y a trop de ministres." Et le soir : "Il n’y en a pas assez." Telle ou telle province n’a pas été représentée... Ce qui est fait est fait. En plus, nous allons vers des élections législatives. Nous verrons bien après ce scrutin.

Quelles sont les priorités que vous avez fixées au gouvernement ?

Celles contenues dans mon programme électoral : des actes pour le Gabon. Au gouvernement de les mettre en musique.

Votre fils, Ali Bongo, est ministre d’Etat, ministre de la défense nationale. Des commentateurs sont convaincus que vous êtes en train d’en faire votre successeur...

Je vous dis et je vous répète qu’il n’y aura pas une dynastie Bongo au Gabon. Non, je ne prépare pas mon fils à la succession et je ne lui mettrai pas le pied à l’étrier. Il n’est pas l’unique ministre d’Etat, vous savez. Et puis ce n’est pas à moi de décider mais aux Gabonais. Si mon fils, qui a des qualités, décide de se présenter, je n’ai pas le pouvoir de l’en empêcher. C’est un citoyen comme un autre.

Vous pensez qu’il a les qualités requises pour être président ?

Il y en a qui le disent, qui l’écrivent. Pour moi, Ali est un ministre comme un autre.

Vous êtes au pouvoir depuis trente-neuf ans. Allez-vous vous représenter pour un mandat supplémentaire en 2013, dans sept ans ?

C’est vous qui le dites, pas moi. Je ne crois pas que ce serait la meilleure solution. On verra.

Parlons pétrole. On a le sentiment que l’aventure pétrolière du Gabon est terminée et que la compagnie Total est davantage intéressée par l’Angola que par votre pays...

Figurez-vous que j’ai fait la même réflexion au patron de Total, que j’ai reçu. Il s’est défendu du contraire. Les pétroliers sont des gens silencieux. Pourquoi partiraient-ils ? Sinon, ils ne demanderaient pas de renouvellement de permis et tout ça.

Vous êtes courtisés par les Chinois...

Courtisés ? Non, ce sont des amis. J’ai fait neuf voyages officiels en Chine. Ils ont fait beaucoup de réalisations au Gabon. Et ils vont continuer. Que voulez-vous, les Français brillent par leur absence chez nous... Ce ne sont pas les Chinois qui les empêchent de venir. Nous avons des tas de projets. Les Français ne répondent pas aux appels d’offres alors que ce sont nos amis les plus chers. S’ils restent inertes, tant pis pour eux. J’en ai parlé au président Chirac, au premier ministre, au ministre des affaires étrangères. Peut-être que Paris n’accompagne pas ses hommes d’affaires...

Propos recueillis par Jean-Pierre Tuquoi

Le Monde (http://www.lemonde.fr/web/article/0,1-0,36-740297,0.html)

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