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Idriss déby Itno : Sur les traces des dinosaures

Publié le lundi 30 janvier 2006 à 07h55min

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Idriss Deby ITNO ! Les Tchadiens d’abord, la communauté internationale ensuite, devront s’habituer désormais à ce vieux nouveau nom. En effet, depuis le 26 janvier dernier, le chef de l’Etat tchadien, Idriss Deby, a décidé d’ajouter le prénom de son grand- père ITNO, à son patronyme.

L’ex-com’chef d’Hissène Habré, qu’il a renversé en 1990, suit les traces de certains de ces devanciers, notamment Mobutu du Zaïre, Eyadéma du Togo et Bongo du Gabon, même s’il est vrai qu’en matière de longévité au pouvoir, il en est encore loin. Lorsque le 24 novembre 1965, Joseph Désiré Mobutu prit le pouvoir dans l’ex-Congo belge, la guerre froide battait son plein.

Le pays était la proie de deux superpuissances qui voulaient chacune mettre "le scandale géologique" sous coupe réglée : la Belgique du roi Baudoin et les USA. Mobutu slaloma d’abord entre ces puissances et, petit à petit, naquit un nationalisme à fleur de peau chez le président-léopard. Ce fut alors l’ère des abacost (entendez à bas les costumes !), des col Mao et surtout du retour aux noms autochtones. Joseph Mobutu devint Mobutu Sese Seko Kuku Waza Banga. Vive le retour à l’authenticité, un retour qui, il est vrai, a fait gagner à Mobutu de l’épaisseur politique.

A des dizaines de kilomètres du Zaïre, en Afrique de l’Ouest, sur la côte, ce comportement mobutiste fera un illustre émule, en la personne de Gnassingbé Eyadéma. Retour sur l’histoire : le 13 janvier 1967, quatre ans jour pour jour après avoir installé Nicolas Grunitzky au pouvoir, non sans avoir tué Gilchrist Olympio, le sergent-chef Etienne Eyadéma prenait le commandement de l’Etat togolais. Est-ce le fait d’avoir accueilli quelques temps Mobutu, lorsque celui-ci était en exil, qui l’a amené à le singer à ce point ? La certitude est qu’Etienne devint Gnassingbé, les abacosts apparurent également chez lui, sans oublier les manifestations de jeunes à la gloire de sa personnalité.

Idriss Deby ITNO n’est pas sans rappeler un certain Omar Bongo aussi. Il y a quelques années de cela, le président gabonais changea pour la seconde fois son prénom ou plutôt y ajouta un autre. L’homme, à la mort de Léon M’Ba en 1967, se nommait Albert Bongo. Converti à l’islam, il prit le prénom d’Omar, auquel il ajouta, plus de 30 ans après, Ondimba, le prénom de son père.

Que cherche le président tchadien en accolant le prénom de son grand père à son nom ? On ne peut que conjecturer là-dessus : pour certains, il veut, par ce geste, ramener la cohésion autour de lui, en particulier dans son clan, celui des Zaghawhas, secoués par des dissensions qui ont culminé avec les oppositions armées entre l’Est et le Sud du pays. Plusieurs de ses proches (parents, amis), militaires et civil, ayant rejoint le maquis et réclamant son départ... ; pour d’autres, Deby Itno cultive une sorte de fétichisme : au Tchad comme sous d’autres cieux africains, un lien tacite ou apparent avec un ancêtre est toujours source de baraka ; et quel lien plus fort peut-on avoir avec son grand-père que de porter son prénom ?

Par ce fil invisible, le cordon ombical avec les aïeux n’est pas coupé et ils intercèdent, selon les croyances, en faveur des uns et des autres, ou au contraire, sévissent si des us et coutumes sont transgressés. Alors, Deby Itno aurait-il lui aussi trouvé la recette magique ( ?) pour "durer", dans le sens bergsonien, au pouvoir ? Blaise Compaoré, Mamadou Tandja, John Kuffuor..., vite, déterrez les noms de vos pères, grands ou arrière-grands-pères !

Rabi Mitibkèta
Observateur Paalga

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