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Côte d’Ivoire : Réconciliation et paix, une équation difficile à résoudre

Publié le samedi 28 janvier 2006 à 09h55min

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La Côte d’Ivoire sombre et continue de s’enfoncer dans une crise profonde qui risque, si une solution n’est pas trouvée, de transformer le pays en un dépotoir d’instabilité et d’insécurité.

La vie politique ivoirienne a connu la semaine dernière des soubresauts caractérisés par des barricades érigées à Abidjan et dans certaines villes de Côte d’Ivoire, suite au communiqué final qui a sanctionné la 3e réunion du Groupe de travail international (GTI) qui reconnaît la fin du mandat de l’Assemblée nationale dominée par le parti au pouvoir. Des agissements qui laissent croire que c’est la rue qui gouverne à Abidjan.

Pour être plus efficace et tirant les leçons des nombreux dysfonctionnements qui ont émaillé le parcours du gouvernement du Premier ministre Elimane Seydou Diarra, la communauté internationale a créé un "gendarme" le Groupe de travail international.

Le groupe a pour rôle de suivre la feuille de route et de pousser le processus de paix. En fait, le groupe de travail international est l’organe qui interprète, surveille l’exécution et traduit dans les faits la résolution 1633 des Nations unies qui véhicule quatre messages à savoir la fin du mandat du président de la République le 30 octobre 2005 et de celui des députés le 16 décembre 2005 ; la transformation du poste de président de la République en celui de chef de l’Etat, pour une période de 12 mois ; la nomination par la communauté internationale d’un Premier ministre jouissant de toutes les prérogatives de l’Exécutif ; la consultation des parties signataires des accords de Linas Marcoussis et éventuellement du forum national envisagé par la même résolution pour décider de l’utilisation des parlementaires dont le mandat est terminé. Tous les acteurs politiques et autres ne peuvent qu’interpréter cette résolution selon leurs intérêts.

Ce sont ces interprétations multiformes qui sont sources de toutes les incompréhensions, voire de tous les blocages. Alors, l’on peut avancer sans risque de se tromper que la communauté internationale en décidant que l’ancien président de la République demeure chef de l’Etat, aurait dû transformer l’Assemblée nationale en Assemblée constituante. La non prise en compte de cet aspect très important de la question est la lacune majeure de la résolution 1633.

Le Groupe de travail international l’a confirmé en demandant au Premier ministre de confier des missions aux anciens députés. Cette lacune doit être comblée parce que le pays est dans une situation de transition c’est-à-dire le passage d’un Etat à un autre, d’une situation à une autre. Cela veut dire que tout ce qui était avant le 30 octobre 2005 ne peut plus l’être exactement après cette date.

La grande erreur de la communauté internationale

Des manifestants ayant leur interprétation du communiqué du Groupe de travail international et bravant toutes les lois du pays ont paralysé Abidjan pendant quatre jours. Cet état de fait résulte de l’ambiguïté et du style trop diplomatique des textes de la communauté internationale. Cette ambiguïté est mise à profit pour désinformer, intoxiquer et manipuler.

Le gouvernement actuel, gouvernement de transition prépare de ce fait, l’avènement de la IIIe République qui doit commencer selon les Nations unies, le lendemain du 31 octobre 2006, date butoir pour l’organisation de l’élection du nouveau président de la République. En conséquence, l’Assemblée nationale ne doit plus exister dans sa forme actuelle parce qu’on est dans une période de transition. Si elle devait exister, il faut qu’elle ait d’autres missions et qu’elle puisse regrouper l’ensemble de la classe politique.

C’est pourquoi il fallait prévoir une Assemblée constituante ou une structure équivalente qui regrouperait tous les partis politiques ayant eu des députés au cours de la 10e législature auxquels l’on ajouterait des représentants du RDR, des Forces nouvelles et des organisations de la société civile suivant des quota bien précisés par les Nations unies.

Peut-on sortir d’une transition sans une révision de la constitution ?

Cette Assemblée constituante est d’autant plus nécessaire que l’article 35 actuel de la Constitution ivoirienne relatif aux critères d’éligibilité à la présidence de la République doit être révisé selon la mouture arrêtée à la Table de Linas Marcoussis. La loi relative à l’article 35 votée par l’ancien parlement n’a pas été promulguée par l’ancien président de la République qui s’était contenté de déclarer à la Nation qu’il autorisait la candidature de tous les signataires d’octobre 2005.

Aucun texte juridique réglant ce problème n’existe, à défaut de référendum sur la question, le Premier ministre devra prendre une ordonnance de régularisation de cet article 35 avant la prochaine élection présidentielle. Or selon le Groupe de travail international une telle ordonnance devra être soumis au chef de l’Etat par le Premier ministre pour signature dans les cinq (05) jours. Et si Laurent Gbagbo, le chef de l’Etat refusait de signer cette ordonnance ?

Cette Assemblée constituante permettrait également d’éviter des soucis au prochain président de la République élu qui sera obligé de conduire une révision de la constitution et qui pourrait être taxé de tripatouilleur de constitution. Peut-on logiquement sortir d’une transition sans révision de la constitution ? Cette question fondamentale risque de faire l’objet de blocage dans un futur proche. Alors pourquoi ne pas agir maintenant ?

Kibisa KARIM
L’Hebdo

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