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Teg-Wende Idriss Tinto, co-fondateur de Open Burkina : « Au plus haut sommet de l’Etat, certains n’ont pas bien compris le levier que peut représenter le numérique »

Publié le samedi 4 mars 2023 à 13h30min

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Teg-Wende Idriss Tinto, co-fondateur de Open Burkina : « Au plus haut sommet de l’Etat, certains n’ont pas bien compris le levier que peut représenter le numérique »

Ingénieur de conception en informatique, Teg-Wende Idriss Tinto, est le co-fondateur de Open Burkina, une association qui accompagne les organisations pour améliorer les processus de gestion de données, afin de les rendre plus performantes. Dans cet entretien, il fait l’état des lieux du secteur du numérique au Burkina et donne son appréciation sur le cadre réglementaire mis en place par l’État.

Présentez-nous Open Burkina ?

L’opportunité que représente l’exploitation des données pour le développement de nos pays n’est plus à démontrer. Cependant, force est de constater que beaucoup d’organisations peinent encore à maîtriser leurs patrimoines de données. Assurer une bonne collecte, un bon stockage et une bonne exploitation conforme à l’éthique et à la protection des individus pour la prise de décision. Open Burkina est une association qui accompagne les organisations pour améliorer les processus de gestion de données, afin de les rendre plus performantes. Nous assurons cet accompagnement à travers des études, des formations, la réalisation d’outils technologiques, et l’assistance conseil.

Depuis quand l’avez créée et qu’est-ce qui a motivé sa création ?

L’idée a germé dès 2012, de la curiosité d’explorer le travail parlementaire, dans un contexte national ou le commun des Burkinabè considérait qu’être député, c’est juste lever son doigt à l’hémicycle. Cette volonté de vérifier les faits sur la base des données a permis dans un premier temps de rendre accessible au grand public, une grande quantité de données sur le travail largement méconnu des députés, à travers un premier projet d’ouverture parlementaire dénommé « nosdeputes.bf » en 2013. Ce projet nous a fait découvrir l’opportunité de l’accès aux données pour la promotion de la bonne gouvernance et nous a renforcés dans notre engagement à poursuivre le travail pour une ouverture des données.

Comment a évolué Open Burkina ?

Après avoir coordonné des projets au niveau africain pour l’ouverture des données pour une meilleure gouvernance, Open Burkina a revu son orientation stratégique en 2020. En effet, une principale raison pour laquelle les organisations ne perçoivent pas la nécessité de l’ouverture des données, est qu’elle n’exploite pas le plein potentiel des données qu’elle produit. Elle ne voit pas à quel point elles peuvent être un puissant levier. De ce fait, nous avons opté de nous réorienter pour agir en amont de l’ouverture des données. Nous intervenons donc dans la bonne gestion des données, afin de permettre aux organisations d’en tirer profit, avant de parler d’ouverture. Open Burkina est à l’avant-garde des concepts innovants tels que l’intelligence artificielle, la blockchain ou les données citoyennes, les approches centrées sur les données de nos jours.

Quelles sont vos principales réalisations depuis votre création ?

Depuis notre création, nous avons œuvré pour l’adhésion du Burkina Faso au Partenariat pour un gouvernement ouvert (PGO) dont nous avons assuré la co-présidence pendant deux ans (2017-2019). Nous avons co-fondé la Communauté d’Afrique francophone des données ouvertes (CAFDO) que nous coordonnons jusqu’à présent. Nous avons organisé différents cadres de discussion sur l’importance des données pour le développement, parmi lesquels on peut citer l’atelier d’Addis-Abeba pour l’ouverture des données statistiques par défaut en 2019 et la conférence d’Afrique francophone sur les données ouvertes à Abidjan en 2019.

Nous avons ouvert en collaboration avec l’université Virtuelle du Burkina Faso, le Centre d’excellence interdisciplinaire en intelligence artificielle pour le développement (CITADEL). Plus récemment, nous avons créé un cadre d’échange sur les technologies émergentes appelé Rev4 (pour la 4e révolution industrielle). Ce cadre permet d’organiser mensuellement des rencontres de discussion entre professionnelles des données sur l’opportunité de se coordonner pour le développement du Burkina Faso.

Que pensez-vous de l’état des lieux du secteur du numérique au Burkina ?

L’état des lieux du numérique peut s’analyser de plusieurs angles et je vais en considérer quatre ici. D’abord pour le cadre réglementaire et institutionnel, je dois dire que bien qu’il y ait des insuffisances, ce que nous avons peut nous permettre d’avancer et de faire des progrès. Depuis les années 2000, les acteurs se sont attelés à prendre les lois et créer les institutions nécessaires au développement du numérique au Burkina Faso.

Pour l’angle de la recherche et des capacités, je dois avouer que le Burkina Faso a de quoi faire des envieux. Depuis quelques années, il existe un grand nombre d’écoles de formation qui font sortir chaque année, des ingénieurs assez compétents. Les chercheurs aussi sont assez productifs, même si la recherche la plupart du temps, contribue plus au progrès de la discipline qu’au développement du pays.

Pour ce qui est des financements, le Burkina a bénéficié de plusieurs accompagnements de partenaires financiers pour renforcer le secteur et soutenir des avancées.

Le dernier angle, qui n’est pas spécifique au numérique, est celui qui bloque tous les progrès. Il s’agit de la gouvernance. En effet, l’insuffisance de la bonne gouvernance fait que les lois ne sont pas vraiment appliquées, que les institutions ne font pas vraiment leur travail. Les financements dont nous bénéficions sont aussi mal utilisés, ce qui ne donne pas de résultat sur le terrain. Le problème du numérique, à mon avis, est lié à la gouvernance. Lire la suite

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