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Lutte contre le terrorisme : La veille citoyenne doit demeurer plus que jamais debout, selon un citoyen burkinabè

Publié le mercredi 7 décembre 2022 à 16h05min

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Lutte contre le terrorisme : La veille citoyenne doit demeurer plus que jamais debout, selon un citoyen burkinabè

Dans cette tribune, Antoine Ouédraogo, un de nos lecteurs, donne des pistes de propositions pour qu’au terme de la transition s’instaure une gouvernance vertueuse pour le plus grand bien du peuple burkinabè.

Nous convenons tous aujourd’hui que dire : « le Burkina Faso est à la croisée des chemins » ne suffit même plus à caractériser la gravité du drame qui guette le devenir de notre pays en tant qu’Etat nation. À qui la faute ?

Le coup d’Etat du 24 Janvier 2022 en soi nous parait avoir déjà indiqué le chemin des responsabilités à ce niveau. Malheureusement le Mouvement patriotique pour la sauvegarde et la restauration (MPSR dans sa première itération) et son chef qui avaient semblé porter en bandoulière l’instinct de conservation de la nation et représenter par là même les espoirs ultimes de tout un peuple, a sombré subrepticement sans que nul ne puisse se l’expliquer dans les vomissures de la restauration du régime sanguinaire, liberticide et patrimonial du Capitaine Blaise Compaoré.

C’est ainsi que, contre toute attente, la lutte contre le terrorisme a été sacrifiée sur l’autel de la « réconciliation nationale et de la « cohésion sociale ».
Pendant ce temps, les esprits lucides ne pouvaient contenir leur chagrin s’interrogeant avec juste raison sur quel territoire allait s’opérer cette « réconciliation nationale » tant encensée vu que chaque jour que Dieu crée le terrorisme gagnait du terrain et que notre cher pays était plus que jamais menacé de dislocation voire de disparition.

A présent, il est établi que c’est cette conscience de la gravité de ce drame national qui a décidé les jeunes capitaines patriotes bien trempés, avec à leur tête le Président Ibrahima Traoré, à risquer leurs vies en opérant le coup d’État salvateur contre le Lieutenant-colonel Paul-Henri Sandaogo Damiba le 30 Septembre dernier.

Du reste, ce coup d’Etat a été salué à sa juste valeur par notre peuple dans sa très grande majorité surtout dans sa frange jeune. Toutefois, comme il fallait s’y attendre, le clan Damiba et ses acolytes tant locaux qu’internationaux ne s’avouaient pas pour autant vaincus. Dans la foulée, ces derniers ne cachaient pas leur ferme détermination à étouffer dans l’œuf le mouvement porteur d’espoir des capitaines qui venait de naître. Fort heureusement, et comme divinement avertis, le Capitaine Traoré et ses camarades levaient ipso facto le couvre-feu instauré dès les premières heures du coup d’Etat, permettant ainsi une heureuse fusion entre l’armée et le peuple notamment, la jeunesse.

C’est ainsi que la jeunesse burkinabè bravant le danger, s’est offerte en sacrifice comme un bouclier humain et dissuader toute velléité d’intervention militaire de la part des partisans de Damiba. Par cet acte louable et patriotique, les civils venaient ainsi de sauver le régime à peine né du Capitaine Traoré. Mais, c’est sans compter sur ceux qui vouent un véritable culte à « leurs intérêts catégoriels ».

Dès lors, ces individus bien tapis dans l’ombre, vont imaginer des stratagèmes, des manèges et subterfuges pour tenter de dessaisir le jeune capitaine de son pouvoir voire de sa « chose » pour reprendre l’expression en vogue. Ainsi, pendant qu’on peaufinait les candidatures dans « les chaumières », on suggérait à l’opinion publique que : la transition devait être à l’issue des assises nationales inclusives dirigée par un civil.

Aveuglés par leurs sordides ambitions, les tenants de cette thèse subjectiviste occultent volontiers la différence qu’il y a entre le mouvement insurrectionnel des 30 et 31 octobre 2014 dont l’initiative et la direction étaient assumées par le peuple et le coup d’Etat opéré par les capitaines le 30 Septembre 2022. Pourtant, lorsqu’il y’a quelques mois de cela, le Lieutenant-colonel Paul Henri Sandaogo Damiba avait renversé le président démocratiquement élu, ils n’avaient ni condamné ce recul de la démocratie ni monté au créneau pour réclamer la remise du pouvoir aux civils.

C’est la preuve si besoin est, que ces individus ont une mémoire sélective selon leurs agendas. En tout état de cause, comme leur tentative d’étouffer le mouvement du 30 Septembre, là aussi la manœuvre échouera lamentablement. Désigné à l’unanimité à l’issue des assises nationales inclusives comme Président du Faso puis, investi par le Conseil Constitutionnel, le Capitaine Traoré a, ainsi reçu l’onction du peuple souverain du Faso pour conduire aux destinées du pays.

Il importe à présent de s’attarder sur les urgences du moment car dans une situation où tout est prioritaire, pour agir, il faut bien établir un ordre dans les priorités. Dans ce sens, tout le monde est unanime pour dire que la toute première des priorités est la reconquête de l’intégrité territoriale de notre pays et subséquemment, le retour des déplacés internes sur leurs terroirs.

A l’issue de quoi, la transition devrait connaître son épilogue pour faire place à un État de droit, c’est-à-dire le retour à une vie constitutionnelle normale. Et c’est à ce niveau que se situe mon interpellation des acteurs de la vie politique et sociale burkinabè dans son ensemble. Elle se justifie par le dicton qui dit que « l’erreur est humaine mais c’est la persistance dans l’erreur qui est diabolique ».

Cette observation faite, nous pouvons noter que le retour à l’Etat de droit n’est pas automatiquement synonyme d’une gouvernance vertueuse. Une gouvernance vertueuse a ses exigences au nombre desquelles on recense entre autres, le sens de l’Etat et des responsabilités, le sens du devoir et de l’intégrité, la probité, le respect du bien public, le service de l’intérêt général, l’égalité et la compétence. Or, si nous ne voulons pas bâtir cette « maison des singes », si nous voulons éviter cet éternel recommencement, si nous ne voulons pas une vaine mobilisation des énergies sans lendemain, les burkinabè se doivent de tout mettre en œuvre pour qu’au terme de la présente transition, s’instaure enfin une gouvernance vertueuse pour le plus grand bien de notre peuple.

Mais suffit-il de proclamer notre foi et notre attachement à une gouvernance vertueuse pour que les obstacles ou les difficultés qui jonchent la voie qui y conduit disparaissent comme par enchantement. Assurément non ! Et c’est pourquoi, la veille citoyenne doit demeurer plus que jamais debout. Je m’explique. Il est désormais reconnu que le terrorisme qui est en passe de saper les fondements de notre Etat-nation est la combinaison de moult maux dont la misère qui est générée par l’absence d’un véritable développement socio-économique, occupe les premières loges.

Cet état des choses a du reste été confirmé par le Président Traoré lui-même lors de sa rencontre avec les responsables des partis politiques et les leaders des OSC du pays. Mais pourquoi autant de misère et de non développement socio-économique dans bien des contrées de notre pays ? Qui en est responsable ? Qui est comptable ? De prime abord, la responsabilité du développement d’un pays incombe à son gouvernement. Dans cette vision et pour apporter des réponses aux questions ci-dessus, un bref cours d’histoire politique de notre pays s’impose car l’état actuel du pays est le produit des politiques antérieures.

Ce saut dans l’histoire, dans un souci de concision et de clarté, partira du régime du Conseil National de la Révolution (CNR) pour la simple raison que même les adversaires les plus résolus de celui-ci ont fini par reconnaître que ce fut un régime au service du peuple, pétri d’intégrité, de probité, de justice sociale et dont l’ambition était de promouvoir un développement social et économique équitable au bénéfice du peuple. Ce bref rappel vaut absolution du CNR pour ainsi dire. En d’autres termes, le CNR n’est en rien responsable du drame que vivent de nos jours les burkinabè.

Dire cela, revient à reconnaître que nos problèmes sont nés avec la chute du CNR. On en déduit que, c’est le Front populaire qui a succédé au CNR, le géniteur du monstre actuel et les différents gouvernements qui se sont succédés depuis lors n’ont cessé de le nourrir et de le faire grandir au point qu’il dévore maintenant les burkinabè et représente pour ce faire une sérieuse menace pour l’existence même de notre État nation.

Mais au fond, pouvait-il en être autrement ? Le Front Populaire est né dans le sang du Président Thomas Isidore Noël Sankara. Vu donc ses origines, il ne pouvait survivre et se maintenir que par le sang, la terreur, la corruption et l’impunité. Du reste, les burkinabè gardent en mémoire cette sinistre expression : « Si tu fais on te fait et puis il n’y a rien ». La matérialisation la plus hideuse de cette aberration a été on s’en souvient comme si c’était hier, l’assassinat et la réduction en cendres du journaliste émérite Norbert Zongo et de ses compagnons d’infortune lorsque celui-ci se rendait à son ranch aux environs de Sapouy.

Cet acte odieux et inqualifiable, a provoqué l’émoi dans tout le pays et donné naissance à un puissant mouvement de lutte contre l’impunité et pour la justice, les libertés démocratiques notamment la liberté de presse et d’opinion. Au total, les gouvernements qui se sont succédés durant le long règne de Blaise Compaoré, n’ont fait que patauger dans les fanges de la gabegie, la corruption, le népotisme, le clientélisme, la dictature et la spoliation des biens publics sans pouvoir concevoir et exécuter un seul programme de développement socio-économique qui tienne véritablement compte des besoins fondamentaux des populations et des spécificités régionales de notre pays. Bien au contraire, les différentes politiques menées sous l’ère Compaoré ont aggravé la stratification des couches et classes sociales et les disparités régionales tout en élargissant davantage le fossé des inégalités sociales quant à l’accès aux services sociaux de base.

Le propre des régimes de transition étant d’assurer la permanence et la continuité de l’État entre deux pouvoirs constitutionnels, nous tairons volontiers ici le bilan de la transition post insurrectionnelle pour n’évoquer que très succinctement celui du régime Kaboré. Comme un seul homme, le peuple burkinabé s’est dressé avec sa jeunesse comme un fer de lance, contre les abus du régime Compaoré et au prix de mille sacrifices, il est parvenu à mettre fin au règne dynastique des Compaoré.

Parvenu à ce stade, notre peuple, rêvait de lendemains meilleurs, espérait enfin l’avènement d’une gouvernance vertueuse qui tienne dûment compte de ses aspirations profondes et combien légitimes. Dans cette optique et au terme des élections cumulées de novembre-décembre 2015 il accorda son suffrage au parti des Roch Salif Simon (RSS) dénommé Mouvement du Peuple pour le Progrès (MPP). Il donna par la même occasion son quitus au président Kaboré pour conduire sa destinée. Cependant, comme dit l’adage l’homme propose et Dieu dispose.

C’est ainsi que dès août 2017, le triumvirat deviendra un duo pour très vite devenir un singleton car dit-on, il n’y a pas deux capitaines dans un même bateau. Désormais, c’est le président Roch Marc Christian Kaboré, qui est le seul commandant du bateau battant pavillon Burkina Faso.Mais très vite aussi, les burkinabé vont réaliser comme disent les juristes qu’il y a erreur sur la personne. L’homme Kaboré, tel que révélé par le pouvoir n’est pas celui que les burkinabè ont cru pouvoir accorder leur suffrage et pour cause ! Le Président Roch Kaboré se montre partisan du laisser-faire, du laissez-passer, circulez y’a rien à voir.

Dans la foulée, ses amis et son entourage vont rivaliser à qui mieux de corruption et de pillage, des biens et deniers publics, au vu et au su du peuple et cela sans scrupule vu qu’ils sont assurés d’impunité d’office. Ces délinquants à col blanc sans vergogne ont poussé leur sale besogne jusqu’à exporter le produit de leur vol dans certains pays de la sous-région, provoquant l’indignation de certains chefs d’État dont la presse s’était faite l’écho.

En un temps record, les assassinats en moins, le régime Kaboré a réussi la prouesse de faire regretter le pouvoir Compaoré tellement la corruption la gabegie, l’imposture, la concussion et autres maux de la mal gouvernance régnaient en maître. Pendant ce temps, le petit peuple s’enfonçait dans une misère noire, et dans l’indigence totale. Les disparités régionales s’aggravaient. Le Burkina Faso profond lui, végète dans le non développement et le terrorisme s’amplifie. C’est pourquoi, il serait plus exact de dire que le véritable auteur du coup de force contre le régime Kaboré n’est personne d’autre que le terrorisme.

A la vérité, la chute du Président Kaboré, à défaut d’être plébiscitée, a été accueillie par notre peuple avec un ouf de soulagement et ce essentiellement pour deux raisons suivantes : Primo : les burkinabè avaient le sentiment que le gouvernement en dépit du temps passé à la direction des affaires du pays ne parvenait toujours pas à prendre la juste mesure du défi tenant à la gravité et à l’ampleur des dégâts causés par le terrorisme. Ce qui explique l’absence de mobilisation conséquente et d’une guerre résolue contre le fléau.

Secundo : le peuple se sentait suffisamment abusé par les scandales de détournements et de pillages orchestrés par les amis du Président « socio-viveurs » autoproclamés socio-démocrates pour la circonstance.

Pour conclure le Lieutenant-colonel Damiba, bien qu’inconnu du grand public est accueilli pour toutes ces raisons en libérateur ou tout du moins avec des préjugés plus ou moins favorables. En effet, Monsieur Damiba n’est pas seulement un officier supérieur de l’armée, il disposerait de surcroit d’une expertise en matière de lutte contre le terrorisme (Cf. Armées Ouest-africaines et Terrorisme : Quelles réponses ?). Par conséquent, qui mieux que le lieutenant-colonel Damiba pour conduire le peuple Burkinabè dans sa lutte sans concession contre le terrorisme ?

Malheureusement le rêve des burkinabè va être de courte durée et leur désenchantement sans appel. Et comme si le sort s’acharnait contre les burkinabè, ils découvrent à la vitesse grand V que Monsieur Damiba est loin d’être l’homme providentiel qu’ils attendaient.

Au total et pour aller à l’essentiel, nous faisons volontairement l’économie de la substitution par Monsieur Damiba de la reconquête de l’intégrité territoriale de notre pays par la « réconciliation nationale » expresse, la « justice transitionnelle » et la restauration du système déjà vomi par notre peuple, son empressement à s’enrichir, ses velléités dictatoriales et enfin sa métamorphose subite de militaire en homme politique.

La page du destin présidentiel de Monsieur Sandaogo Damiba a été vite tournée et avec succès par le capitaine Traoré à la grande satisfaction de notre peuple. Pour toujours plus de clarté de la démarche, il serait également superflu de revenir ici sur les péripéties de l’avènement du capitaine Traoré au pouvoir. A dessein, nous poursuivons notre récit à partir de ce que nous désignons comme étant « l’acte fondateur » qu’a représenté le discours du Président Ibrahim Traoré lors de sa rencontre avec les partis politiques et les organisations de la société civile (OSC) le 10 novembre dernier dans la salle de conférences de Ouaga 2000.

C’est véritablement un acte fondateur, car quelque soit l’angle sous lequel l’on voudrait apprécier le propos, on ne peut pas ne pas en venir à la conclusion qu’il y’a une nouvelle donne. Et comme les temps de la nativité approchent, on est tenté de paraphraser les évangiles en disant : « un espoir nous est né ».

Homme de terrain et bref dans les mots qui lui sont propres, il a réussi à faire saisir à tout un chacun toute la laideur, toute l’horreur de notre situation nationale jusque-là insoupçonnée. Ainsi, de guerre asymétrique, il n’en est rien selon le Président Ibrahim Traoré.

La vérité pour désigner la réalité : ceux qui nous attaquent sont des burkinabè qui se considèrent victimes des politiques menées jusque-là. En tout cas pour un discours politique, s’en fut véritablement un. Et dans cette optique, il a atteint son objectif qui était de convaincre au-delà de son auditoire, le peuple tout entier du Burkina Faso, de la préoccupation majeure du moment en lien avec la guerre contre le terrorisme et les maux qui le secrètent.

Dorénavant, les burkinabè comprennent pourquoi ils ne pourront pas vaincre le terrorisme uniquement par les armes. Pour faire simple, la victoire militaire d’aujourd’hui ne servirait à rien si demain le terrorisme devait renaître de ses cendres. Autant dire que, la démarche judicieuse serait qu’au triomphe militaire l’on associe l’élimination ou l’éradication de ce qui génère ou produit le terrorisme. Or, il est établi que c’est la misère, l’absence de perspectives qui poussent les jeunes dans les bras de l’hydre terroriste. En conséquence que les foyers ou les bastions du terrorisme soient des zones de moindre développement socio-économique n’est pas fortuit.

De fait, il urge de « faire pénétrer » le développement dans ces zones gangrénées par le terrorisme.C’est un impératif pour tout gestionnaire de la cité et le peuple burkinabè lui-même est placé face à son destin. Et comme le dit une publicité : « boire ou conduire, il faut choisir ». Au fond, les burkinabè ont-ils un choix à faire entre la mal gouvernance et le terrorisme ? Assurément non ! car comme le dirait l’autre, on ne fait jamais de choix entre la peste et le choléra !

L’heure de vérité a donc sonné et les burkinabè se doivent de prendre leurs responsabilités devant l’histoire comme l’avait fait en son temps le président Thomas Sankara. En effet, le Président Sankara avait choisi de prioriser l’accès à l’eau potable au plus grand nombre de burkinabè plutôt que de soutenir les desiderata d’une infime minorité qui sabre le champagne à longueur de journée.

Or, il reste que ce type de choix ne peut s’opérer que dans le cadre d’une bonne gouvernance. La bonne gouvernance à son tour implique de gouverner par l’exemple. Et c’est à ce stade que la question cruciale que posait François Rabelais garde toute sa pertinence : « Comment pourrais-je gouverner autrui qui moi-même gouverner ne saurais ? »

En effet, comment mener une gouvernance vertueuse si l’on n’est pas exempt de vices ? Et pourtant, au Burkina Faso, nous avons plus que jamais besoin d’une bonne gouvernance. Pour ce faire, il ne tient qu’au peuple d’imposer des gouvernants vertueux. Sachant avec Napoléon Bonaparte qu’ : « Une nation rassemblée ne reçoit point d’ordre ».

Toujours, dans le même esprit et pour mémoire, il vous souviendra des journées historiques des 30 et 31 Octobre 2014 où le peuple burkinabè, pris d’une fièvre patriotique, s’est rassemblé, s’est insurgé et a mis fin aux abus du régime de Blaise Compaoré confirmant l’adage romain : « Vox populi, Vox Dei » (voix du peuple, voix de Dieu). Par la « mise en sac » que dis-je en mettant fin à la « Compaorose », le peuple signifiait par là même son rejet catégorique de la mal gouvernance et appelait de tous ses vœux à l’avènement d’une gouvernance vertueuse.

Et si aujourd’hui, huit (8) ans après l’insurrection populaire, le peuple burkinabè tout entier reste confronté au terrorisme produit d’une mal gouvernance, c’est tout simplement comme pour dire que les gouvernements qui se sont succédés depuis lors n’ont fait que trahir les idéaux de l’insurrection populaire. Que faire ? Sachant que, c’est dans l’unité que se trouve le salut de notre peuple, j’en appelle comme l’a fait des voix plus autorisées à l’unité du peuple, au rassemblement et pour deux (2) considérations essentiellement : Premièrement, pour conduire et soutenir une guerre totale contre les terroristes.

C’est une guerre de libération nationale, attendu que nous nous trouvons dans l’obligation de nous battre pour recouvrer l’intégrité territoriale de notre pays. Que nous nous devons de nous battre pour nous affranchir du joug de l’obscurantisme et des ennemis de la démocratie et de la liberté. Nous devons nous battre enfin pour préserver notre identité, notre culture.

Deuxièmement, mener une guerre sans merci contre la corruption et les détournements de deniers publics et faire rendre gorge à cette bande de voyous à col blanc qui font vivre un calvaire à notre peuple parce qu’ils ne pensent qu’à leur bien-être personnel.

S’agissant de la guerre contre le terrorisme, il ne nous parait pas nécessaire de nous y attarder outre mesure. Et pour cause ! Le Capitaine Ibrahim Traoré en bon militaire, a sonné le clairon du rassemblement du peuple tout entier pour aller à l’assaut de l’ennemi. Son engagement, sa détermination, ses procédés et méthodes convainquent pour l’heure plus d’un. Il est heureux de voir que notre peuple répond présent à son appel et se dit prêt pour le combat. Ce qui est prometteur et augure de lendemains meilleurs.

En revanche, il en va autrement de la lutte contre la corruption et les détournements. C’est pourquoi je sonne le tocsin pour que la veille citoyenne ne somnole point ni ne dorme. En effet, on ferait une erreur gravissime en voulant dissocier cette lutte de la lutte contre le terrorisme. Les deux luttes doivent être menées de front, de paire pour la simple et bonne raison qu’elles sont dialectiquement liées. Mieux, en différant la seconde guerre, c’est-à-dire la lutte conséquente contre les détournements et la corruption, sans le savoir nous faisons le jeu des ennemis de notre peuple, de la démocratie et de la justice sociale.

De nos jours, et en dépit de ce que nous menons une guerre existentielle, le Burkina est mis au ban de la communauté internationale sous le fallacieux prétexte que nous sommes dans un état d’exception. Et les mêmes sans cause ni raison nous pressent de revenir à une vie et/ou à un ordre constitutionnel normal comme si vivre sous un régime constitutionnel normal était en soi une panacée pour vaincre les maux qui sont les nôtres.

La frénésie des puissants de ce monde pour un ordre constitutionnel normal me fait penser qu’il y’a « anguille sous roche ». Ce qui me fait dire que nous devons faire nôtre ce dicton moaga qui dit que : « s’il est bon d’aller consulter un devin, c’est toujours mieux de faire sa propre opinion après consultation » Il est grand temps de ne plus se laisser dicter sa conduite donc ! En clair, si nous ne nettoyons pas nos ‘‘écuries d’Augias’’ avant le retour à une vie constitutionnelle normale, notre victoire sur le terrorisme qui s’annonce sera vaine.

Or, pour ma part, je reste persuadé que les burkinabè dans leur très grande majorité n’entendent pas faire passer pour pertes et profits tant de sacrifices des leurs. Pour ce faire, le peuple qui se mobilise puissamment pour soutenir les Forces de défense et de sécurité (FDS) et les Volontaires pour la défense de la patrie (VDP) au front, ce même peuple doit se mobiliser avec la même ferveur et la même détermination pour exiger que justice lui soit rendue en faisant comparaître devant les tribunaux ceux-là qui ont abusivement spolié notre peuple. C’est un problème posé et à résoudre ici et maintenant !

Plus tard, sans avoir réglé ce problème, on aura des élections où les mêmes qui ont pillé l’Etat vont démocratiquement s’accaparer de nouveau des rênes du pouvoir et continuer à faire tout ce qu’ils savent faire tranquillement et en toute impunité : voler. Pour éviter que cette sombre perspective ne devienne réalité, j’en appelle à une veille citoyenne réalisée par toutes les parties prenantes de la lutte contre la corruption, les détournements et l’impunité et pour la démocratie véritable.

Sans être exhaustif, les principaux acteurs de cette opération « mains propres » ou de salubrité publique pourraient être les insurgés, les patriotes, les différentes associations civiles ou politiques de lutte pour les droits humains, contre la corruption, l’impunité et pour la bonne gouvernance, les organismes de contrôle de l’Etat : la Cour des comptes, l’Autorité supérieure de contrôle de l’Etat et de lutte contre la corruption (ASCE/LC), l’Inspection générale des finances, les inspections des différents départements ministériels et les derniers et pas des moindres le Gouvernement et la Justice.

Toutes ces parties prenantes de la lutte contre les détournements et pour la bonne gouvernance ci-dessus citées doivent dans un sursaut patriotique et dans une synergie d’actions parvenir à extirper de notre pays la gangrène de la corruption, des détournements, et de l’impunité. Dans cette perspective, il est devenu une obligation pour chaque partie prenante de jouer loyalement sa partition.

Dans ce sens, il appartient aux différentes associations de la société civile d’assurer sans faiblir la veille citoyenne en dénonçant les faits avérés de détournement, de corruption, et en appelant fermement à leur jugement. Les différents organismes de contrôle de l’Etat, une fois saisis, se doivent de réaliser les audits dans les délais impartis avec sérieux et compétence afin de faire taire les polémiques éventuelles qui ne manqueront pas à coup sûr.

Le gouvernement pour sa part, ne devrait pas entraver d’aucune manière que ce soit la manifestation de la vérité et de la justice. Pour ce faire, il doit d’abord sortir les vieux dossiers enfouis et qui dorment dans les tiroirs et les transmettre à la justice pour jugement. Ensuite, il doit ordonner l’élargissement du champ d’action des auditeurs dans le temps et dans l’espace.

Dans le temps pour faire remonter, les audits à l’insurrection populaire pour la simple et bonne raison que ce que nous vivons est la conséquence de la trahison des idéaux de l’insurrection populaire. Dans l’espace, en soutenant l’idée qu’aucune institution de l’Etat fonctionnant avec des deniers publics (l’argent du contribuable) ne saurait se soustraire aux principes du contrôle et de la redevabilité.

Dans cet esprit, l’Assemblée nationale tout comme les deux communes à statut particulier (Ouagadougou et Bobo-Dioulasso) ne sauraient être soustraites de la compétence des organismes de contrôle de l’Etat.

Le dernier acteur mais central dans cette opération « mains propres » demeure la justice. Si tous les acteurs de la chaîne jouaient parfaitement leurs rôles, il reviendrait à la justice de faire aboutir le rêve des burkinabè d’une société de paix, de solidarité, de justice sociale et d’égalité. Naturellement, cette société a pour fondation la justice. C’est pourquoi, une fois saisie, la justice doit dire sans coup férir le droit avec célérité et compétence. Ses verdicts doivent revêtir un caractère pédagogique.

À cette fin, ils ne devraient pas se contenter de dire qu’il faut rendre à ‘‘César ce qui est à César’’. Entendez par là, la restitution des biens et deniers appartenant à l’Etat à l’Etat, mais également frapper d’indignité leurs auteurs dans le même temps. Ainsi, outre les saisies, les condamnations pécuniaires, les auteurs de malversations, devraient se voir au terme des procès, privés de leurs droits civiques et politiques notamment d’éligibilité et de représentation.

C’est l’ultime espoir pour assainir la scène politique burkinabè et espérer voir naître une nouvelle race de dirigeants politiques, patriotes, vertueux, ayant le sens de l’intérêt général et respectueux du bien public. Seule cette nouvelle race d’Hommes politiques serait à même de promouvoir la bonne gouvernance en concevant et en exécutant des politiques fondées sur les aspirations profondes de notre peuple, et pour un progrès économique, social, culturel et politique équitable pour tous.

À prendre ou à laisser ! Telle est la sentence ! ne nous leurrons pas, car comme le disent les Saintes Écritures, « les mauvaises compagnies corrompent les bonnes mœurs ». Si toutefois, nous n’extirpons pas du milieu de nous ces prédateurs de deniers publics, il est illusoire de penser qu’on pourrait bâtir un Etat de droit démocratique et prospère.

Au total, si malgré les évidences, les burkinabè se refusaient à assainir leur scène politique, adieu la bonne gouvernance, adieu tout espoir de vaincre le terrorisme et alors bonjour la fin de nos communautés en tant qu’Etat-nation ».

Antoine Ouédraogo
Lefaso.net

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