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Meurtre de Jean Hélène : 17 ans de prison pour le sergent de police Séri

Publié le vendredi 23 janvier 2004 à 07h55min

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Le tribunal militaire d’Abidjan a condamné jeudi à 17 ans de prison ferme le sergent de police ivoirien Théodore Séri pour le meurtre du journaliste français de Radio France internationale (RFI) Jean Hélène.

Tout en reconnaissant au sergent Séri des "circonstances atténuantes", le jury, composé de deux policiers et deux militaires - deux hommes et deux femmes -, est allé au-delà des réquisitions du procureur militaire qui avait demandé, la veille, 15 ans de prison.

Le 21 octobre 2003 au soir, le policier ivoirien avait abattu le journaliste français d’une balle de kalachnikov dans la tête alors que ce dernier attendait à proximité du siège de la police nationale la libération de onze opposants.

"Je suis innocent", a crié à trois reprises le condamné alors qu’on l’emmenait après l’énoncé du jugement.

Thierry et Catherine Baldensperger, frère et soeur de la victime, n’étaient toutefois pas là pour l’entendre. Comme les avocats de RFI et de l’organisation de défense des droits de la presse Reporters sans Frontières (RSF), parties civiles, ils avaient préféré ne pas se déplacer par crainte d’éventuels incidents.

Mais l’annonce du verdict, mis en délibéré la veille, était entouré de strictes mesures de sécurité et le public assis à l’extérieur de la salle d’audience, dont la grande porte arrière à deux battants était ouverte, a été évacué avant la lecture du verdict.

Le sergent Séri, dont les avocats ont annoncé l’intention de se pourvoir en cassation, aura nié jusqu’au bout toute responsabilité dans la mort de Jean Hélène sans pour autant donner un semblant d’explication ou exprimer le moindre regret à la famille de la victime.

Experts, témoins - ses propres collègues et supérieurs -, accusation et président du tribunal ont pourtant fait voler en éclats sa version des faits selon laquelle Jean Hélène, au cours d’une altercation avec le policier, s’est écroulé après que ce dernier eut entendu "deux détonations" au loin.

Le sergent Séri avait initialement affirmé avoir tué le "journaliste blanc" avant de se rétracter au cours de l’instruction.

Le tribunal a reconnu que les demandes de dommages et intérêts de la famille de Jean Hélène étaient "partiellement fondées" et a en conséquence reconnu l’Etat de Côte d’Ivoire "pécuniairement responsable", le condamnant à verser 137 millions de FCFA (210.000 euros) aux ayant-droits de Jean Hélène.

RFI et RSF, qui avaient réclamé 1 FCFA symbolique pour préjudice moral, ont en revanche été déboutés par le tribunal.

Insistant sur le fait que Jean Hélène a été tué parce qu’il était journaliste et "pas pour ce qu’il faisait", les parties civiles ont également fait valoir le contexte dans lequel est survenu ce meurtre.

Après la mort de Jean Hélène, âgé de 50 ans et qui avait longtemps couvert l’actualité sur le continent africain, de très nombreuses voix se sont élevées pour dénoncer le climat de haine entretenu depuis des mois par des organes de presse proches du pouvoir contre les médias étrangers, notamment RFI, accusés de soutenir une rébellion armée déclenchée en septembre 2002.

"Dans un contexte différent, le même acte aurait-il pu être commis ? Un contexte n’est jamais indifférent", a relevé le défenseur de la famille, Me Jean-Marc Delas, évoquant les éditoriaux de certains journaux ivoiriens.

"Je ne sais pas si c’est pour faire plaisir à la France qu’on a précipité ce procès (...) On a sauvé un idéal politique, je ne crois que la justice ait été sauvée", a déclaré jeudi à l’AFP Me Raoul Gohi Bi, un des avocats du sergent Séri, se félicitant que la Cour Suprême puisse être saisie d’un pourvoi en cassation.

De son côté, le président du collectif de soutien au sergent Séri, Abraham Tekpo, a sèchement rappelé au calme quelques-uns de ces jeunes sympathisants qui commençaient à s’échauffer contre les "maudits journalistes" et à menacer les Français.

"La justice a fait son travail, nous avons un devoir. On peut aller en cassation. J’ai dit à mes enfants +calmez-vous et respectez votre justice+", a-t-il expliqué.

AFP

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