LeFaso.net, l'actualité Burkinabé sur le net
Proverbe du Jour : “Soyez un repère de qualité. Certaines personnes ne sont pas habituées à un environnement où on s’attend à l’excellence.” Steve jobs

Transport international de marchandises du Mali et développement des communes frontalières de Faramana et de Koloko au Burkina Faso

Publié le mardi 16 août 2022 à 12h55min

PARTAGER :                          
Transport international de marchandises du Mali et développement des communes frontalières de Faramana et de Koloko au Burkina Faso

Le transport de marchandises est primordial pour les échanges internationaux des pays sans façade maritime comme le Mali et le Burkina Faso, deux pays sahéliens d’Afrique de l’Ouest. En effet, « les experts de la Banque Mondiale rappellent que les coûts d’importation des produits internationaux à destination des marchés enclavés peuvent atteindre 15 à 20 % dans les zones enclavées africaines contre moins de 5 % dans le contexte des pays industrialisés » (Y. Alix et J. Pelletier, 2011, p.1). Cependant, malgré l’importance de ce secteur pour ces deux pays sans littoral, le Mali utilise le Burkina Faso comme zone de transit pour son transport international de marchandises.

Le transit de ce pays via le territoire burkinabè passe par les communes frontalières de Koloko et de Faramana. Pourtant, les territoires frontaliers souffrent souvent de leur éloignement car ils « sont souvent considérés comme étant « à la marge », (…) » (G. Hamez et F. Morel-Doridat, 2017, p. 2017). Le présent article vise à analyser l’impact du transit routier du Mali sur le développement à la base des communes frontalières de Koloko et de Faramana.

Nous avons ainsi effectué des entretiens avec les autorités communales, la douane et la police ainsi qu’avec des conducteurs concernés par le transit routier de marchandises du Mali à Faramana et à Koloko. L’étude traite du rôle de ces communes dans le transit, le corollaire de ce transit et les principaux facteurs de cet effet induit.

Koloko et Faramana : deux communes stratégiques pour le transit de marchandises du Mali via le Burkina Faso Koloko et Faramana sont deux communes frontalières et traversées par un corridor. Lorsque les Maliens utilisent les ports du Ghana, du Togo ou du Bénin pour leurs échanges, ils transitent par le Burkina Faso en passant par Ouagadougou, Bobo-Dioulasso avant de rejoindre Koloko ou Faramana qui sont des portes de sorties et d’entrées pour le transport international de marchandises du Mali via le Burkina Faso. Il existe cependant l’axe Ouagadougou-Ouahigouya-Thiou pour le désenclavement du Mali en passant par le Burkina Faso ; mais il n’est pas utilisé pour le transit de marchandises à cause de la distance et de l’insécurité. Koloko et Faramana jouent alors un rôle stratégique pour le désenclavement du Mali en passant par le Burkina Faso. Les arrêts et stationnements dans ces communes qui abritent des postes de la douane devraient en principe favoriser leur développement local.

Faramana et Koloko : communes frontalières faiblement développées

Malgré leur situation de communes frontalières et traversées par des corridors, Faramana et Koloko demeurent des localités très peu développées. Dans ces deux communes, l’accès à l’eau potable est presqu’identique et demeure insuffisant. Par exemple, le taux d’accès à l’eau potable se situe autour de 27,78 % à Faramana alors que la norme au Burkina Faso est d’une couverture théorique de 41,77%. En outre, il y a une insuffisance en points d’eau en saison sèche à Faramana. En plus, les données sur le plan sanitaire de ces deux communes confirment leur faible développement.

À Faramana, il y a trois (03) villages sur huit (08) qui ont un Centre de santé et de promotion sociale (CSPS) et un village qui n’a pas accès à un CSPS dans un rayon de 5 km. À Koloko, il y a quatre CSPS alors que la commune a dix-neuf villages. Au-delà de cette inadéquation spatiale par village à Koloko, il y a un centre de santé pour 6125 habitants tandis que la norme nationale est de un pour 10000 habitants. En plus, dans ces deux communes, en hivernage, en raison de l’impraticabilité des pistes, certains centres de santé ne sont pas accessibles.

Dans le secteur de l’éducation, tous les villages de ces deux communes ont des écoles primaires. On note un Collège d’enseignement secondaire général (CEG) à Faramana et un lycée et deux CEG à Koloko. Malgré l’existence de ces infrastructures, il y a une inadéquation entre l’offre en infrastructures et les besoins de la population. La demande est plus forte que l’offre éducative. Cette situation est surtout liée à l’accroissement très élevé de la population. Par ailleurs, Faramana ne dispose d’aucune infrastructure hôtelière. Dans ces deux communes, il n’existe aucune banque. Même l’activité commerciale est très négligeable. Les populations n’ont généralement pas accès à l’électricité en dehors de celles qui sont surtout dans les centres de Faramana et de Koloko. L’agriculture non mécanisée demeure la principale activité (90% des populations). Ainsi, il convient de s’interroger sur les facteurs de ce faible développement malgré la traversée des deux corridors utilisés pour le transit de marchandises du Mali.

Le transit du Mali via le Burkina Faso, un transit secondaire ?

Les échanges transnationaux du Mali à travers les ports de Nouakchott et de Conakry sont très faibles, faibles pour les ports du Ghana, du Togo et du Bénin. Les principaux ports maritimes pour le transport international du Mali sont respectivement Dakar (avec environ 66 à 67% du trafic) et d’Abidjan et San-Pedro (environ 22% du trafic) entre 2012 et 2016. Le graphique n°1 permet de cerner l’importance du flux de marchandises en transit via le Burkina Faso (passant par les communes frontalières de Faramana et de Koloko).

Graphique 1 : Trafic du Mali selon les couloirs de transit (2012-2016)

Le transit du Mali via le Burkina Faso qui passe par Faramana et Koloko se situe autour de 11% dans le transport international de marchandises de ce pays (O. Sigué et V. Zoma, 2019). Ce trafic à travers ces deux communes pris ensemble est presque la moitié de celui issu des ports ivoiriens et représente un sixième de celui issu du port de Dakar. Le transit routier du Mali à travers le Burkina Faso en passant par Koloko et Faramana apparaît donc secondaire dans le transport international de marchandises du Mali.

Le faible développement de ces communes malgré la présence des infrastructures de transport telles que les corridors et la présence des postes de contrôle de la douane pourrait alors se justifier par la part secondaire de ce transit dans le transport international de marchandises du Mali. Par ailleurs, la qualité des corridors de transit au Burkina Faso n’est pas dans une situation lamentable sauf surtout la portion de la route entre Fada N’Gourma et Koupéla. Mais, lorsqu’on compare les longueurs des corridors notamment les distances entre les ports de desserte de ce pays et la capitale Bamako, les ports utilisés par le Mali en transitant par Faramana et par Koloko au Burkina Faso sont les plus éloignés.

Ceux du Ghana se situent autour de 1 973 km, celui du Togo à 1 967 km et celui du Bénin à 1 880 Km tandis que les ports ivoiriens sont à 1 195 km et celui du Sénégal (Dakar) à 1 242 Km. Quant à Conakry qui est le port le plus proche de Bamako, le mauvais état de la route justifie en partie sa très faible utilisation par les transporteurs maliens.

Au-delà de l’offre portuaire des ports ivoiriens et de Dakar pour la conservation ou la conquête des transporteurs maliens, l’un des atouts de ces deux ports pour le Mali est le développement du transport multimodal via ces deux ports. Le facteur distance ainsi que la présence du rail expliquent le faible transit du Mali via le Burkina Faso notamment dans les communes frontalières de Faramana et de Koloko entraînant ainsi en partie leur faible développement local.

En somme, les communes de Faramana et de Koloko ont un rôle stratégique dans le transport international du Mali via le territoire burkinabè car elles sont à la frontière du Mali et sont traversées par un corridor. Cependant, malgré ces deux atouts, ces communes qui abritent des postes de contrôle de la douane, de la police et de la gendarmerie et obligeant ainsi les conducteurs en transit à y marquer un arrêt pour les formalités d’usage, sont encore peu développées. Le transit routier n’a pas pu favoriser pour le moment un développement évident dans ces deux localités. Le transit de marchandises du Mali via ces deux communes a juste un effet couloir sur le développement territorial de Faramana et de Koloko car ce transit joue un rôle secondaire dans le transport international de marchandises du Mali.

Références bibliographiques

Alix Yann et Pelletier Jean-François, 2011, « Territoires enclavées et opportunités de marché : analyse des performances logistiques des corridors de transport en Afrique subsaharienne », in Organisation et Territoire, Volume 20, n°1, pp.41-52.

Hamez Grégory et Morel-Doridat Frédérique, 2017, « Les espaces frontaliers, des espaces à la marge ? La France des marges », in Presses Universitaires de Rennes (PUR), pp.217-229.

Ministère des transports (M.T.), 2017, Annuaire statistique 2012-2016, résultats 2016, Bamako, 90 pages.

Sigué Osseny et Zoma Vincent, 2019, « Burkina Faso, pays stratégique du désenclavement du Mali et du Niger : exemple du transit routier de marchandises », In Lɔŋgbowu, Revue des Lettres, Langues et Sciences de l’Homme et de la Société, n°009, Vol. 1, Juin 2020, pp.361-375.

PARTAGER :                              

Vos commentaires

 LeFaso TV
 Articles de la même rubrique