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Hermann Yaméogo : Le chant du cygne

Publié le mercredi 21 janvier 2004 à 09h15min

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On a coutume de dire en Afrique que quand on ne sait pas où on va, on doit savoir d’où on vient. Si Hermann Yaméogo avait compris cela, il ne se serait pas négativement illustré sur l’échiquier politique national au cours de l’année 2003. A la vérité, cette année a été pour lui, comme un miroir ; il s’y est vu, dans toutes ses contradictions.

Son destin serait-il celui de Sisyphe, qu’il ne se conduirait pas autrement, obligé qu’il est de voler de déconvenues en déconvenues.

Fils du premier président du pays, Maurice YAMEOGO, dont un mouvement syndical a brutalement écourté les airs de grandeurs à la grande joie du peuple, Hermann, malgré une carrière politique de plus de 30 ans, n’a pas encore réussi à être autre chose que ce fils à la recherche d’un paradis perdu.

Pourtant l’homme est un grand tribun, un harangueur de foule, qui a choisi de sacrifier sa vie, toute sa vie à la chose politique. L’impression qu’il donne est qu’il préfère les effets d’annonce à tout. Etre ou paraître, Me Yaméogo a tranché. La séduction plutôt que la conviction, le signifiant avant le signifié. Dès lors on comprend pourquoi tout est éphémère chez lui.

Nul besoin de revenir sur un long parcours pour mettre en exergue cette réalité qui lui est chevillée au corps et qui l’oblige à rouler toujours dans le peloton alors qu’il se voit un destin de leader. 2003 n’a pas donné de voir autrement l’homme. Pourtant elle annonçait de grandes promesses pour lui, certains se surprenant à le prendre maintenant au sérieux et à lui prédire un destin national.

D’abord avec les législatives du milieu de 2002 son parti de l’époque, l’ADF/RDA était arrivé premier de l’opposition derrière le CDP en détrônant le PDP/PS. Malheureusement, en dépit de cette réalité mathématique, la fonction se refusera à lui avant de fuir pour n’avoir pas su ou pu la dompter.

Dans sa prédisposition à être le chef de file de l’opposition, comme à son habitude, il s’est vite grillé comme la galette de la fable, nourrissant des prétentions plutôt que des ambitions pour ce statut. Notre homme aura compris qu’être chef de file de l’opposition voulait dire prendre le contre-pied du pourvoir sur tous les sujets.

La première illustration de cette interprétation de ce rôle sera administrée par rapport à la crise ivoirienne.
On se rappelle que pendant que tous les dignes fils du pays soutenaient la part de vérité du président du Faso sur le cas Laurent Gbagbo qui de toute évidence était au cœur des massacres contre les étrangers, particulièrement nos compatriotes de Côte d’Ivoire, Hermann Yaméogolui est allé dans le sens contraire, le critiquant négativement.

Sa sortie hasardeuse contre les propos du chef de l’Etat provoquera de l’indignation tout d’abord en ses propres "appartements". Ses collaborateurs, se rendant compte du danger qu’il faisait courir à leur parti en le laissant entre les mains d’un tel politicien, se sont résolus à se défaire de lui au plus vite. Il fut destitué et poussé à l’exil. Meurtri au plus profond de lui-même parce que brutalement ramené à ses dimensions réelles, il aura toutefois le réflexe de plier pour ne pas rompre en allant "se créer" un autre parti, puisque, de courtisans il y en aura toujours pour le suivre.

A la vérité une nouvelle fois encore, Me Hermann Yaméogo a montré son incapacité à conduire les destinées d’un parti. Qu’en serait-il si d’aventure il s’était agi de la nation ?
Son départ de l’ADF/RDA a sonné le glas d’une ambition forgée à coups de compromissions et l’on ne peut que comprendre qu’il soit amer, très amer même.

A la vérité c’est une chance pour l’opposition que Hermann ne soit plus en mesure d’être son chef. La probabilité qu’il la conduise à la boucherie plutôt qu’au pouvoir était la plus forte. A vrai dire, il n’était pas à la hauteur de l’emploi, tant celui-ci exige travail, sérieux et sacrifice, toutes choses qu’il a toujours abhorrées, préférant être servi que de servir. Et quand des politiciens qui se veulent sérieux l’indiquent comme le candidat idéal pour la présidentielle 2005, cela pose un cas de conscience.

Par Drissa TRAORE
L’Opinion

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