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Transition politique : Les experts de Compétences électorales africaines disent non à des élections précipitées

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Publié le mercredi 8 juin 2022 à 16h00min

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Transition politique : Les experts de Compétences électorales africaines disent non à des élections précipitées

« Quand l’institution régionale se trompe de loupes ; on ne peut pas prôner des valeurs démocratiques et souhaiter des élections bâclées sur fond de votes précaires, et dans un environnement incertain, insécure, de corruption électorale généralisée, de pauvreté sans précèdent des populations déplacées… ».

C’est ce qu’estime le président de Compétences électorales africaines (CEA), Adam Régis Zougmoré, dans un communiqué parvenu à Lefaso.net ce mercredi 8 juin 2022.

Les experts de CEA entendent apporter leurs contributions pour l’adoption d’agendas mesurés collés aux réalités du Burkina Faso, du Mali et de la Guinée.

Lire l’intégralité du communiqué ci-dessous :

COMMUNIQUE DE PRESSE DU CEA A L’ADRESSE DE LA CEDEAO SUR LA GESTION DES CRISES AU BURKINA FASO, EN GUINEE ET AU MALI.

« Quand l’institution régionale se trompe de loupes ; on ne peut pas prôner des valeurs démocratiques et souhaiter des élections bâclées sur fond de votes précaires, et dans un environnement incertain, insécure, de corruption électorale généralisée, de pauvreté sans précèdent des populations déplacées… »

Les experts du CEA disent non et apportent leurs contributions pour l’adoption des agendas mesurés collés au réalités des pays à la rencontre du 3 juillet 2022.

Adam Régis ZOUGMORE
Président du CEA Tel : 70252307
Zougmore2001@yahoo.fr

Un sujet qui préoccupe l’ensemble des citoyens de la CEDEAO et la communauté internationale est bien celui qui concerne la résurgence des coups d’Etat et le retour à la vie constitutionnelle normale dans les trois pays que sont : le Burkina, la Guinée et le Mali. Un sujet incertain, complexe et ambigu qui trompe tous les analystes et le collège de nos chefs d’Etat devenu une tribune de sanctions à l’endroit de ses propres populations.

Des propositions d’agenda en catimini, des échéances non mesurées, indéterminées et pas du tout objectives, ont commandé au sein des Compétences Electorales Africaines une analyse de son Conseil Technique Electoral avec la participation soutenue d’Experts guinéens et maliens.

Les conclusions de ses travaux ont donné clairement des indications qui ont milité à cette rigoureuse interpellation de la CEDEAO sur les attentes réelles des peuples et leurs légitimes vœux de développement.
Sept (7) points vont récapituler l’essentiel des préoccupations et les analyses adaptées :

1 les similitudes des réalités existantes dans les trois pays :
 Un cadre légal qui a besoin de grandes réformes ;
 Un fichier électoral qui nécessite une refonte et de nouvelles inscriptions ;
 Des électeurs désintéressés par la chose politique et qui vivent sous pression ;
 Une corruption électorale généralisée, la perte de l’intérêt général et la malhonnêteté des politiques, la faiblesse de l’offre politique et une multiplicité des partis politiques ;

 La précarité du vote et son probable impact négatif sur la légitimité des élus ;
 Un environnement politique pollué ayant besoins d’un réel assainissement ;
 Les pressions des puissances sur les politiques intérieures des Etats.

2 les spécificités de chaque pays qu’il faut prendre en compte :
 Les motifs sérieux de la prise de pouvoir et les objectifs de chaque transition ;
 L’environnement politique de chaque pays et l’éducation citoyenne ;
 Les fragilités économiques des pays et les différences de monnaie ;
 Le besoin et le degré d’engagement de chaque peuple à quitter le joug colonial et à établir des partenariats nouveaux dans les domaines de sécurité notamment, etc.

3 la nécessaire connaissance des étapes d’un processus électoral et des conditions pour des élections libres et équitables :

 Pour organiser des élections crédibles, il est établi un processus qui rassemble toutes les phases contenues dans le cycle électoral. Il part de l’existence d’une OGE responsable et professionnelle qui élabore un chronogramme valide et partagé par l’ensemble des parties prenantes.

Ce processus comprend :
• La budgétisation des élections
• La mise en place des démembrements
• La formation des démembrements
• La délimitation des circonscriptions
• L’enregistrement des électeurs et l’actualisation du fichier
• Les publications des listes électorales, ensemble toutes les étapes du contentieux vidées

• La réception des candidatures en fonction de chaque élection
• La validation des candidatures après les contentieux
• L’élaboration du bulletin de vote respectant l’équité
• La campagne électorale

• Les formations des personnels techniques chargés du traitement des résultats
• La formation des membres de bureaux de vote
• La formation des agents de sécurité
• L’accueil et la formation des observateurs nationaux et internationaux
• L’administration du scrutin et sa supervision
• La proclamation des résultats et les contentieux
• L’organisation éventuelle d’un second tour pour les présidentielles.

 Connaitre les critères pour des élections libres et équitables

De l’avis des Experts des trois pays, aucun de ces trois pays ne réunit l’ensemble de ces conditions. A cela s’ajoutent les grandes réformes à opérer pour rendre efficace les processus démocratiques dans les trois pays.

4 Pour des élections intègres et crédibles, il y’a des délais conformes aux standards internationaux : au moins vingt-quatre (24) mois pour dérouler un calendrier électoral surtout que dans ces trois pays il s’agira d’organiser des élections complexes avec un haut degré d’insécurité.

5 Avant l’étape de mise en œuvre du calendrier électoral, il y’a des préalables à remplir :
• La stabilisation des institutions
• La mise en place des instances de la transition
• Le renforcement de l’action humanitaire et les prises en charge des personnes déplacées internes
• La restauration des territoires et les actions continues aux fronts (Burkina et Mali)

• La prise des mesures pour des réformes de renforcement de la productivité des administrations
• La prise des mesures pour l’assainissement de l’environnement politique
• La recherche des partenaires et la problématique question du financement des élections
Cela peut prendre également un semestre soit six (6) mois

Pour le comité technique électoral du CEA, aucun pays ne peut organiser des élections acceptées de tous avant 24 mois au moins. Les contextes de ces pays obligent à l’implémentation d’une résilience démocratique et la mise en place de structures de contrôle du financement des partis et de lutte contre la corruption électorale.

Autrement dit si les Etats ne se donnent pas les moyens de faire de véritables réformes, les interruptions des processus démocratiques vont demeurer. Nous demandons donc à la CEDEAO d’apporter sa contribution pour une mobilisation internationale afin de bâtir une démocratie résiliente dans nos Etats en crise d’une part et un accompagnement soutenu pour la construction d’institutions fortes issue des élections crédibles d’autre part.

6 La CEDEAO fera de graves erreurs, en contraignant les Etats à aller vers des élections précipitées, sans des bases solides et un cadre légal revu dans un espace de grande fragilité ou des priorités (et pas les moindres) existent. Elle a déjà fait fausse route en exhibant aux yeux du monde les divergences internes entre les chefs d’Etat au dernier sommet, laissant même planer le doute sur la possibilité de mains mises de certaines puissances occidentales.

C’est en cela que notre interpellation technique trouve sa justification et demande à être prise en compte au rendez-vous du 03 juillet prochain. Il faut réformer le mode de décision de notre institution régionale pour éviter les consensus aux forceps. Dans un tel contexte, un recadrage s’impose et il faut véritablement tenir compte de la real politik dans chaque pays.

Ces trois pays pourront entrer dans l’histoire des grandes et bonnes réformes démocratiques s’ils ne sont pas coincés, sanctionnés, malmenés au bon vouloir de ceux à qui les crises profitent.

7 Les compétences électorales Africaines demandent à la CEDEAO :
D’adopter les agendas des pays en suivant l’évolution :
 Du niveau de sécurité pour avoir des élections inclusives
 Du financement des élections et des possibilités réelles de chaque pays
 Des réformes pour l’assainissement de l’environnement politique et la mise en place d’institutions de lutte contre la corruption électorale
 Des délais conformes et suffisants pour organiser des élections crédibles.

Les trois pays ont chacun, une histoire politique connue de tous et de très belles pages de luttes héroïques. Ces trois pays peuvent constituer une force dynamique capable de créer un autre espace de liberté et du vivre ensemble, car les grandes crises ont toujours engendré de sociétés nouvelles.

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