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Burkina - Mine de Perkoa : « 21 jours après le drame, les villageois semblent perdre espoir »

Publié le lundi 9 mai 2022 à 22h20min

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Burkina - Mine de Perkoa : « 21 jours après le drame, les villageois semblent perdre espoir »

Si pour les autorités et les responsables de la mine l’espoir est permis après 21 jours de recherche effrénée pour libérer les huit mineurs coincés au fond de la mine de zinc de Perkoa, dans la province du Sanguié, ce ne semble pas le cas au niveau de la population riveraine et chez certains parents vivant dans le village de Perkoa.

Nous sommes samedi 7 mai 2022. Ce jour marque le 21e jour où les huit mineurs demeurent toujours prisonniers des eaux au fond de la mine de zinc de Perkoa, dans le Centre-ouest du Burkina Faso. Dans une interview accordée à RFI le jeudi 8 mai dernier, Ditil Moussa Palenfo, directeur-pays de Nantou mining à Perkoa, exprimait son espoir de retrouver ses collègues.

Du côté de Perkoa, village abritant la mine, le constat semble différent chez la plupart des villageois. L’espoir pour certains n’est plus envisageable car selon eux, passer 21 jours sans eau ni nourriture n’est pas possible si ce n’est un miracle de Dieu. C’est du moins ce qui ressort des témoignages que nous avons recueilli auprès de certains villageois.

J.L. Bayala, coiffeur au marché de Perkoa et originaire de Bonyolo aurait également son oncle coincé sous les eaux parmi les huit sinistrés. Il nous confie que son oncle, du nom de Esaïe Bayala, aurait décroché cet emploi dans la mine trois mois avant le drame. Une situation qui les plonge lui et toute la famille dans une tristesse et un découragement total.

J.L. Bayala, coiffeur au marché de Perkoa

Et ce n’est que la partie visible de l’iceberg. A Perkoa, tout comme dans les villages voisins jusqu’à Réo, chef-lieu de la province, les riverains semblent déjà faire leur deuil. Aucune musique n’a raisonné depuis le jour de l’incident. Même le jour de la fête musulmane marquant la fin du mois du Ramadan, tout était calme.

Personne depuis notre arrivée dans le village, n’a voulu se prononcer sur le drame ni sur leur vécu quotidien depuis la survenue de l’incident. Si certains justifient leur volonté de garder le silence par un manque d’informations, d’autres avancent la désolation et une rage contre la mine de zinc Nantou mining. S’ils ont refusé de parler à notre micro, il ressort des échanges que nous avons eu avec eux en off un grand sentiment de délaissement du village par les autorités ainsi que par la mine.

Le marché de Perkoa

« Nous ne voulons pas nous prononcer sur quoi que ce soit. Depuis l’installation de la mine jusqu’à survenue du drame, plusieurs fois les gens sont venus pour s’informer de la situation, pour nous demander les problèmes que nous rencontrons et ce que la mine fait pour le village. Mais depuis rien ne change », affirme l’un d’entre eux sur un ton laissant transparaître la colère. « Nous vivons ici chaque matin avec la peur au ventre depuis l’incident. Ce sont nos frères, ce sont nos parents. Donc arrêtez de venir remuer le couteau dans la plaie. Nous savons tous que ce n’est pas évident mais nous prions que Dieu fasse un miracle », ajoute avec rage un autre villageois pour ensuite nous rassurer que : « Nous ne sommes pas fâchés contre vous mais plutôt contre la mine et les autorités ».

A entendre parler d’autres villageois, tout ce qui arrive est en partie la responsabilité de la mine. Car, disent-ils, « auparavant, les chefs de terre de Perkoa partaient faire des sacrifices chaque vendredi à côté de la mine mais depuis un certain temps, cela a été arrêté par la mine ».

Les villageois semblent révoltés à force d’attendre

Après avoir fait le tour du village, le constat devenait de plus en plus limpide. Perkoa est un village comme tout autre malgré la présence de la mine. Des voies qui se dégradent à chaque pluie avec des ponts en mauvais état. A notre arrivée au cœur du village, nous constatons un marché composé de quelques hangars qui pourraient s’en aller au premier coup de de vent. Difficile pour nous de nous procurer ne serait-ce qu’un petit plat pour notre déjeuner. Cependant où se situerait alors la responsabilité ? Du côté de la mine, du gouvernement ou des autorités locales ?

Notons par ailleurs que le drame aurait pu être encore pire n’eût été la survenue d’un évènement malheureux dans le village. En effet, selon les propos de J.L Bayala, un vieillard aurait rendu l’âme ce jour, ce qui a empêché de nombreux travailleurs de se rendre à la mine et a atténué le nombre de victimes.

Tout compte fait, c’est une situation que tous déplorent et même chez le chef du village, on ne sait plus à quel saint se vouer. « Nous avons tous vécu les choses comme tout le monde et nous avons vu avec désolation ce drame se produire dans notre village », nous confie le chef du village tout en affirmant que seuls les responsables de la mine sont capables de solutionner cette situation. Comme action menée pour apaiser la situation, le chef affirme avoir donné des instructions aux chefs de terres deux jours après l’éboulement pour faire des sacrifices. A ce jour, les sacrifices ont coûté des poulets, des moutons et un bœuf, à l’entendre.

Une vue de la mine

Pour le chef du village, la balle reste dans le camp des responsables de la mine et il leur faudra mettre le paquet afin de permettre aux parents des victimes d’être rassurés. Il invite ainsi le gouvernement à appuyer la mine pour sauver cette situation. Aux villageois, il demande de garder leur calme et surtout de continuer à beaucoup prier car, dit-il, l’espoir est toujours permis.

Prince Omar
Lefaso.net

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Vos commentaires

  • Le 9 mai 2022 à 17:40, par À qui la faute ? En réponse à : Burkina - Mine de Perkoa : « 21 jours après le drame, les villageois semblent perdre espoir »

    Restez dignes chers villageois. Beaucoup de courage en attendant des bonnes nouvelles.
    Quand on regarde l’état de ce village on n’a pas envie de penser qu’il génère des milliards à l’Etat. Je m’abstiens de critiquer les étrangers car ils ne peuvent rien faire de mal sans la bénédiction des pouvoirs publics. Le développement et la charité ne doivent pas être provenir de la charité mais du partage des richesses du pays

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