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Lutte contre le terrorisme au Burkina : Les autres noms de la souveraineté

Publié le vendredi 29 avril 2022 à 09h30min

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Lutte contre le terrorisme au Burkina : Les autres noms de la souveraineté

Les groupes terroristes ont révélé notre absence de souveraineté sur notre territoire et nos ressources. La guerre a non seulement mis en exergue notre incapacité à être maître chez nous, mais aussi une absence de volonté, de pensée propre à posséder la terre de nos ancêtres et à y imprimer notre loi, gage de notre droit sur elle.

C’est pourquoi dans cette lutte, il faut avoir plusieurs fers au feu comme à la forge et penser à la tâche suivante pendant qu’on est sur la précédente, comme le joueur de dames pense à plusieurs coups quand il bouge son pion. Quelles sont les actions concomitantes à penser, conceptualiser pendant que l’on recherche la restauration de l’intégrité territoriale ? Le défi pour tout pouvoir n’est-il pas d’être multitâches et surtout de penser à celles qui sont consécutives aux actions qu’il a entreprises ?

Pour un pays comme le Burkina, ne pas être maître des ressources minières est un grand fléau. Ce sont des revenus énormes qui nous échappent quand on voit la flambée des cours de l’or sur les vingt dernières années avec une augmentation du prix de l’once d’or de 400% (de 2000 à 2020), prix qui vont continuer de prendre l’ascenseur avec la guerre Russie contre Ukraine. L’action d’un État responsable qui veut avoir l’exclusivité des ressources de son sous-sol, doit être de s’attaquer à ce problème, d’autant plus que l’exploitation artisanale de l’or est corrélée à l’insécurité et aux attaques terroristes.

Revoir l’exploitation artisanale

La carte des attaques terroristes coïncide avec celle des sites de titres miniers d’or. Le pouvoir de la transition doit se donner pour objectif de mettre fin à l’absence criarde de l’État dans l’exploitation artisanale pour amener la sécurité et la paix dans les zones qui ont eu le malheur d’avoir de l’or sous leur sol, mais aussi de ne pas abandonner nos richesses aux bandits et aux terroristes qui les pillent et tuent nos populations.

Un drame a mis en relief comment l’État ne « calcule pas », ne tient pas compte du secteur de l’exploitation artisanale de l’or c’est l’explosion meurtrière du 21 février 2022 au site d’orpaillage de Gomgombiro, dans le village de Gbomblora, à une dizaine de kilomètres de Gaoua dans le sud-ouest du pays, qui a fait 63 morts et 70 blessés. Le Burkina Faso n’a pas voulu que le pays face mémoire de ce drame, pas de deuil national, avec autant de morts !

C’est à l’image du manque de considération et de respect envers ces damnés de la terre qui plongent dans le ventre de la terre à la recherche de l’or qui va leur apporter respect et considération. C’est ce manque de vision de l’État envers le secteur de l’exploitation artisanale de l’or qui fait que le Togo peut exporter 7 tonnes d’or en provenance de notre pays vers la Suisse en 2014. Cette quantité doit avoir été multipliée par deux ou trois avec la crise sécuritaire et nous regardons faire sans réfléchir à maîtriser l’exploitation de nos richesses au profit de notre pays et aussi de ceux qui travaillent dans le secteur.

Un grand chantier est de réformer l’exploitation artisanale de l’or en lien avec la sécurité nationale et le bonheur de ceux qui s’y consacrent. Les nouvelles solutions ne sortiront pas de la tête d’un bureaucrate mais des discussions de ceux-ci avec les premiers concernés. C’est parce que les anciennes méthodes ne préservaient pas l’intérêt des orpailleurs et des propriétaires de mine que le trafic de l’or s’est développé et a attiré les bandits et les terroristes, l’État étant absent.

Ce chantier est fondamental c’est un moyen de gagner la guerre que par les canons et exige de mettre à contribution des personnes ressources compétentes pour entrevoir une exploitation artisanale de l’or qui préserve l’environnement et la santé de ceux qui y travaillent et contribue au retour de la paix dans le pays.

Fournir l’armée en tenues et pataugas

Voilà un défi facile à relever par notre armée car nous avons les capacités de production et nous pouvons nous libérer d’une dépendance extérieure et réaliser sur ce plan une souveraineté économique, parce que nous avons le coton produit dans notre pays, égrené par Sofitex et mis en balles, et filé par Filsah.
Il manque un maillon industriel qui est le tissage et en s’investissant dans le domaine, le défi peut être relevé par nos compatriotes que sont les designers textiles aidés par des ingénieurs et techniciens.

En tant que pays producteur de coton, notre armée devrait être un symbole de la souveraineté nationale par ses tenues. Elle ne devrait plus importer son habillement et se faire un point d’honneur à travailler avec nos grands stylistes Sébastian Bazemo, François Ier,… sur les moyens de ne pas faire sortir des ressources financières du pays pour les tenues et les pataugas.

Ce faisant, elle permettrait à la filature Filsah qui utilise 5 000 à 10 000 tonnes de notre coton d’augmenter sa production et d’accroître la part nationale dans le coton produit par nos paysans qui est de 5%. En aidant à filer et tisser le coton, l’armée va aider à créer des entreprises qui créeront des emplois qui vont pouvoir employer des jeunes et aider à l’autonomisation des jeunes pour assécher les flots de recrutement des mouvements extrémistes violents. Ce serait un moyen de faire la guerre autrement, en éliminant des causes de radicalisation comme le chômage.

L’armée doit donner l’exemple en ne dépensant pas sans penser à l’intérêt national. Avec un cinquième du budget national qui lui est consacré ce serait dommage qu’elle ne contribue pas à asseoir des entreprises nationales qui soient capables de lui fournir les biens et services dont elle a besoin. La préservation des emplois sur le territoire national, leur création et augmentation sont des composantes de la sécurité nationale.

Préparer le retour des PDI

Il ne s’agit pas seulement de chasser les groupes terroristes des territoires qu’ils occupent et ramener les personnes déplacées internes chez elles pour revenir y vivre comme avant cette guerre dans un territoire sans État, sans maître et sans loi où le premier venu peut le parcourir pour y dicter ses principes et chasser qui il veut. Il faudrait que les populations réinstallées ne soient plus à la merci des bandes armées. Il faudrait réfléchir à organiser la sécurité de ces nouveaux villages par les PDI qui vont repartir coloniser leurs anciennes terres.

C’est maintenant qu’il faut construire et bâtir dans les têtes ce nouveau Burkina sans groupes terroristes, capable de résister aux attaques et incursions des ennemis. C’est maintenant que nous devons envoyer nos chercheurs et étudiants pour savoir ce que les déplacés veulent.

Veulent-ils retourner chez eux, pour y faire quoi et en quel nombre ? Qu’est-ce que l’État leur propose comme accompagnement pour garantir la sécurité des biens et des personnes, pour reconstruire les écoles et veiller sur leur sécurité, ainsi que les centres de santé ? Voilà des sujets d’étude et de recherche qui ne doivent pas se faire quand les zones seront libérées mais maintenant.

Ce sont des champs de bataille pour la restauration et le retour des personnes déplacées internes. Le travail à faire est immense, il est dommage que certains signes donnés ces jours-ci par des nominations de directeurs généraux et de destitution au pied levé ne montrent pas que le gouvernement mesure vraiment l’ampleur des enjeux.

Sana Guy
Lefaso.net
Crédit photo www.dw.com

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Vos commentaires

  • Le 28 avril 2022 à 23:09, par Peuple insurgé En réponse à : Lutte contre le terrorisme au Burkina : Les autres noms de la souveraineté

    La malgouvernance fait le lit du terrorisme. L’injustice, la corruption, ajoutés à l’ignorance et à la pauvreté, favorisent le terrorisme. Toute solution n’integrant pas ces aspects aura du mal à produire des résultats durables.

  • Le 29 avril 2022 à 08:19, par Bob En réponse à : Lutte contre le terrorisme au Burkina : Les autres noms de la souveraineté

    Actuellement, on estime qu’au moins 20 tonnes d’or nous échappent du fait de la contrebande, soit au bas mot environ 600 milliards de francs CFA l’an. Cela fait beaucoup pour un pays dont le budget annuel tourne autour de 2000 milliards....

  • Le 29 avril 2022 à 17:55, par Bernard Luther King ou le Prophète Impie En réponse à : Lutte contre le terrorisme au Burkina : Les autres noms de la souveraineté

    Votre titre et theme est très pertinent. Mais je reste sur ma soif dans vos developpements. Quels sont ces autres noms de la souveraineté ? vous ne croyez pas si bien libeller ainsi. Mais helas je reste sur ma faim. J’imagine ce que vous voudriez traiter et je pense que si vos allusions ne sont pas pris en compte dans le plan de lutte anti-terrorriste, nous serons condamnés si en plus de cela, les autres elements que sont la diversification de partenariat ne sont pas mises en oeuvre.
    Dieu reste Burkinabè

  • Le 3 mai 2022 à 22:42, par MyMy En réponse à : Lutte contre le terrorisme au Burkina : Les autres noms de la souveraineté

    - LA RUSSIE N’EST PAS EN GUERRE CONTRE L’UKRAINE. Le président-US Joe Biden vient de le reconnaître pour la 2nd fois, hier 3 mai 2022.
    Instruisez-vous svp.

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