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Burkina : De Maurice Yaméogo à Roch Kaboré, une marche dans la frustration !

Publié le dimanche 3 avril 2022 à 22h58min

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Burkina : De Maurice Yaméogo à Roch Kaboré, une marche dans la frustration !

Le Burkina Faso est à la croisée des chemins, foi de plusieurs Burkinabè. Le pays renoue ainsi avec sa marche balbutiante, avec à l’actif, des lots de frustrations sur toute la ligne. Du premier président, Maurice Yaméogo, à Roch Kaboré, on observe que chacun est ressorti de la direction du pays avec une dose de frustrations.

Maurice Yaméogo, père de l’indépendance, est tombé par l’insurrection populaire, le 3 janvier 1966. Les conditions de son départ semblent porter un coup à l’aspect rayonnant de sa gestion qui aurait, selon de nombreux Burkinabè contemporains, pu être mis en exergue.

Le successeur, Aboubakar Sangoulé Lamizana, va également connaître toutes les difficultés dans la gestion du pouvoir, marquées notamment par des blocages dus à des crises entre ses plus proches collaborateurs. Finalement, le 25 novembre 1980, un coup d’État militaire est perpétré contre lui par le Comité militaire de redressement pour le progrès national (CMRPN).

Le colonel Saye Zerbo, ancien ministre des Affaires étrangères, devient le chef de l’État (tandis que le 3 janvier 1984, Aboubacar Sangoulé Lamizana est jugé par un Tribunal populaire de la Révolution ; on lui reproche sa gestion de 400 millions de francs CFA de Fonds spéciaux). Saye Zerbo sera aussi renversé le 7 novembre 1982 par Jean-Baptiste Ouédraogo, qui lui succède à la tête du Conseil de salut du peuple (CSP). Saye Zerbo est emprisonné et jugé après le coup d’État, en août 1983, du capitaine Thomas Sankara. Jean-Baptiste Ouédraogo, médecin militaire, ne durera au pouvoir que du 8 novembre 1982 au 4 août 1983. Il est renversé par le camp de son Premier ministre, Thomas Sankara, qui prend le pouvoir.

Le cycle des coups de force se poursuit par ces évènements dramatiques du 15 octobre 1987 au cours desquels, le président Thomas Sankara perd la vie. Blaise Compaoré qui lui succède est, à son tour, forcé de signer sa démission sous la pression populaire, le 31 octobre 2014.

Michel Kafando, président de la transition, subit un coup d’État en septembre 2015 avant d’être rétabli. Bien qu’ayant pacifiquement passé le témoin à son successeur Roch Kaboré, certains de ses proches ne cachent pas des éléments de frustrations de l’ancien président liées aux attitudes du pouvoir Kaboré à son égard (notamment en matière de traitements liés à sa qualité et à ses droits). Il en est de même pour l’éphémère président du Faso, Isaac Yacouba Zida, (1er au 21 novembre 2014), ‘’contraint’’ par les successeurs à l’exil.

Le président Roch Kaboré n’aura pas, lui non plus, le temps d’achever son deuxième mandat constitutionnel, écourté en cette soirée de lundi 24 janvier 2022, soit un an, deux mois et deux jours, après avoir été réélu au premier tour par un score de 57, 74 %.

Comme on peut le constater, la frustration caractérise bien chacun ou proches et soutiens de tous les chefs d’État qui se sont, jusque-là, succédé à la tête de ce pays.

C’est la même réalité que vivent les organisations, politiques et civiles. Dès lors, il est difficile de faire avancer ce pays. Pourtant, il faut qu’il y ait une génération à la hauteur des responsabilités, pour mettre fin à ce cycle infernal. Il ne peut pas en être autrement.

C’est ce à quoi, inspirent certains passages de ce discours de baptême du Parti panafricain pour le salut (PPS), ce samedi 2 avril 2022. « Notre initiative est le tombeau de la haine contre Maurice Yaméogo, le tombeau de haine contre Sangoulé Lamizana, Saye Zerbo, Jean-Baptiste Ouédraogo, Thomas Sankara, Blaise Compaoré, Yacouba Isaac Zida, Michel Kafando, le tombeau de haine contre Roch Marc Christian Kaboré. (…). Voyez-vous, on a longuement vendu aux Burkinabè l’ivresse de l’affrontement, de la confrontation. Ce fut d’ailleurs le fonds de commerce de certains hommes politiques de ce pays. C’est donc le lieu pour moi d’appeler à un désarmement des cœurs, de solliciter l’indulgence des autorités actuelles pour un élargissement de tous ceux qui ont été privés de leur liberté à la faveur des événements récents qu’a connu notre pays », a déclaré Abdoulaye Mossé, président du PPS, une figure imprégnée de la vie politique burkinabè de ces trois dernières décennies.

Au-delà de tout accueil qui peut être réservé à ces propos, il n’en demeure pas moins qu’ils affichent un problème réel de la société burkinabè. Il touche le fond. Tant que certains b.a.-ba ne sont pas résolus, les politiques de développement ne seront que du cosmétique.

Michel Kafando, lui, disait d’ailleurs en 2016, dans une interview accordée aux confrères des éditions Le Pays : « Il faut absolument exorciser ce pays ». Il répondait ainsi à une question sur les conditions d’une réconciliation nationale : « La réconciliation est d’une impérieuse nécessité. Je dis partout où je passe, que nous devons travailler à la réconciliation nationale. Car voilà un pays qui a souffert du sectarisme, des injustices, un pays où des gens ont été spoliés, des assassinats ont été perpétrés. Vous avez même jusqu’à présent, des victimes dont on n’arrive pas à retrouver les sépultures. Donc, il faut absolument exorciser ce pays. Ce préalable est indispensable pour aller à la réconciliation ». Le ministre des affaires coutumières et religieuses devra plancher sur le sujet, afin que le pays puisse envisager la fin du cycle infernal et ainsi éviter de transmettre aux générations futures, les charges négatives.

Oumar L. Ouédraogo
Lefaso.net

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Vos commentaires

  • Le 4 avril 2022 à 06:49, par ZEUS En réponse à : Burkina : De Maurice Yaméogo à Roch Kaboré, une marche dans la frustration !

    Je sais que lorsqu’on écrit dans ce type de media, il faut faire plus court possible pour être lu mais le passage en flèche sur le règne de Blaise Compaoré déséquilibre votre écrit. Il serait aussi bon de préciser que c’est peut-être l’armée qui faut exorciser d’abord.
    Je sais que lorsqu’on écrit dans ce type de media, il faut faire plus court possible pour être lu mais le passage en flèche sur le règne de Blaise Compaoré déséquilibre votre écrit. Il serait aussi bon de préciser que c’est peut-être l’armée qui faut exorciser d’abord.
    Enfin, j’espère que je lis mal lorsque j’ai l’impression que ce nouveau parti appelle au "diatiguiya", à se rassembler autour de la bouillabaisse, si ça n’est de se retrouver tous pour danser le Mapouka ! Tout le monde il est bon, tout le monde il est beau ! Quid de la responsabilité des dirigeants ! Si la Transition à subtiliser des millions, surtout si elle l’a fait sans finesse, il faut bien qu’elle s’explique ; savez-vous pourquoi les gens se sont battus pour être de la transition encore ? Parce que malgré tout ce qui a été relevé, il n’y a entraîné aucune conséquence. Si vous voulez régler ce pays, il va falloir pas nécessairement commencer par la, mais ajouter cela. Ensuite Mba Michel n’est pas exempt de tout reproche mais je me garder bien de développer ici...pas au point d’être jugé cependant, loin de là (la question du RSP a été mal gérée) ; mais aucun autre ne devrait être hors de portée ! Il faut même croire que le fait de juger Lamizana et Saye Zerbo, bien que je trouve humiliant et ridicule, sachant aussi la propagande révolutionnaire malsaine de l’époque, aura permis à ce qui en doutait de se rendre compte de leurs probités.
    En attendant, libérez le Rocko, on va passer à autre chose !

  • Le 4 avril 2022 à 07:49, par Madya En réponse à : Burkina : De Maurice Yaméogo à Roch Kaboré, une marche dans la frustration !

    Il faudra changer le nom du pays est l’appeler le pays des hommes hypocrites pas des hommes intègres comment peut on élire un président à plus de 57% pour le laisser après pourrir en résidence surveillée dans des conditions humiliantes sans se révolter contre ça, qui voudra faire de la politique à l’avenir ? Est ce que tous ces présidents sont mauvais pour qu’aucun ne puisse finir sans insurrection ou coup d’état ? Il faut revoir le système il y a quelque chose qui va mal ! Comment pourrait on à chaque fois réussir le coup d’état ?

    • Le 4 avril 2022 à 17:47, par Alexio En réponse à : Burkina : De Maurice Yaméogo à Roch Kaboré, une marche dans la frustration !

      Madya.

      Il faudrait que vous relisez l histoire de ton pays depuis sa creation jusqu a nos jours.

      DE LA HAUTE VOLTA AU BURKINA FASO.

      Relisez encore une fois ce tableau retrospective brosser par le FASO_NET. Les contradictions internes des partis politiques. Leurs failles. Et leurs consequences que le peuple a subi de coups d etat en coup d etat.
      Parmi tous ses presidents dechus, seule un president a perdu sa vie. En l occurrance le Thomas I. Sankara.

      Alors, je ne vois pas la logique de votre intention sur le sort de RMCK. Il nest pas en prison ordinaire. Il est bien traite que votre persone. Lui qui a beneficier cette chance d etre Premiermintre, President de l Assemblee et President de la republique arrive afinir en queue de poisson de sa vie politique.

      QUEL GACHIS POUR UN HOMME POLITIQUE. AVEC TOUTES SES EXPERIENCES.

      J ai eu la chance de le rencontrer l homme dans ma vie quand il etait etudiant, novice et politiquement engage.

      J ai remarquer la gestation de son aura politique dans les annees 80 de greves, ou des syndicalistes comme Toure Soumane defrayait la chronique quotidienne.

      Bref : L ancien President doit se porter heureux d avoir sa vie hors danger. Malgre qu il a faillit a son serment. Et il devrait rendre comptes de toute sa gestion.

  • Le 4 avril 2022 à 08:21, par Jonassan En réponse à : Burkina : De Maurice Yaméogo à Roch Kaboré, une marche dans la frustration !

    Il n y a pas que le ministre des affaires coutumières et religieuses il y a aussi celui de la réconciliation nationale. Mais tout ça, il faut exorciser ce pays, ce qui est impossible si l’argent est là et ce pourquoi si lesdits députés de la transition ne peuvent pas se passer de leur pactole, si les ministres ne peuvent pas accepter la réduction de leur salaire et les militaires des bonus par la reconduction des décrets qui ont servis à rémunérer leurs remplaçants c’est pas la peine.

  • Le 4 avril 2022 à 10:04, par boinga En réponse à : Burkina : De Maurice Yaméogo à Roch Kaboré, une marche dans la frustration !

    Malheureusement je ne crois plus que le Burkina puisse arriver à cet idéale de réconciliation et de conscience. Seul le temps et les changements de générations nous amèneront un jour de vrais hommes capable de laisser leurs intérêts personnels en faveur des intérêts communs. Les hommes actuels ont échoué sur ce plan et le pays ne fera qu’en souffrir pendant le temps de nos générations. Mais l’espoir est permis car les hommes naissent mais ne se ressembles pas en idée et visions.

  • Le 4 avril 2022 à 12:17, par l’Intègre En réponse à : Burkina : De Maurice Yaméogo à Roch Kaboré, une marche dans la frustration !

    Tout est dit et bien analyser
    Mais est ce encore possible ?
    L’homme, le temps, les mots, le rite et le lieu qu’il faut sont encore trouvables ?
    Car je remarque que même les démons qui devraient être là dans les 100 prochaines années sont déjà là.
    Connaître le "problème" est déjà bon pour sa résolution.

  • Le 4 avril 2022 à 20:21, par Biata En réponse à : Burkina : De Maurice Yaméogo à Roch Kaboré, une marche dans la frustration !

    @ Madya, quand le 25/11/80, Saye Zerbo a fait son coup d’Etat contre Sangoulé Lamizana, tous les membres du gouvernement déchu ont été arrêtés y compris Lamizana. Ils ont été mis en prison et/ou en résidence surveillée durant des mois pour ne pas dire des années et pour certains, loin de leur domicile. Ils avaient la chance d’être en vie et c’était ça de gagné pour eux. Mais, je ne me souviens pas que les voltaïques d’alors aient sonné clairon ou aient marché pour exiger leur libération ou encore se soient révoltés contre leur détention. Quelques réactions très timides et inaudibles peut-être et encore ? Il faut dire aussi que les réseaux sociaux n’existaient pas à l’époque de Maurice Yaméogo et de Sangoulé Lamizana.
    Après le coup d’Etat du 24/01/22 du MPSR, tous les membres du gouvernement ainsi que Roch sont en vie même si cantonnés dans Ouaga. Rien que pour ça qu’ils s’estiment heureux. Roch est le seul placé en résidence surveillée et des personnes élèvent la voix pour demander sa libération notamment via les réseaux sociaux. Est-ce une avancée ou pas chacun en fera sa lecture mais malgré tout, ce n’est peut-être pas pire qu’avant ?!

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