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Procès « Thomas Sankara et douze autres » : Retour sur l’audition du mercredi 10 novembre du général Gilbert Diendéré

Publié le jeudi 11 novembre 2021 à 09h38min

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Procès « Thomas Sankara et douze autres » : Retour sur l’audition du mercredi 10 novembre du général Gilbert Diendéré

Pour son troisième jour d’audition, ce jeudi 11 novembre 2021, le général Gilbert Diendéré répondra aux questions de ses conseils et des autres avocats de la Défense. Mais avant le reprise de l’audience à 9h, nous vous proposons un résumé des débats de la veille avec la tension qui est montée d’un cran entre l’accusé (neuvième sur les douze présents à passer à la barre) et chacun des avocats de la partie civile qui a tenté de le "cuisiner".

Débats avec Me Patrice Yaméogo, suppléant de Me Benewendé Sankara

Un peu plus d’un mois après les événements du 15 octobre 1987, le lieutenant Gilbert Diendéré, alors chef de corps adjoint du centre national d’entraînement commando (CNEC) est devenu le chef de corps. C’était en novembre 1987. Une fois à cette fonction, les soldats Arzouma Ouédraogo dit « Otis » et Nabié N’Soni, considérés comme des éléments indisciplinés (Ils étaient armés au conseil de l’Entente au moment de la mort au président Sankara) ont continué à assurer la sécurité de Blaise Compaoré. Pourquoi n’ont-ils pas été sanctionnés ? Demande la partie civile. Pour le général Diendéré, la sécurité de la personnalité (Blaise Compaoré) lui incombe en premier. « Il les connaissait mieux que moi. Ces deux soldats ont servi avec lui avant mon arrivée au CNEC ».

Débats avec Me Julien Lallogo :

« Est-ce que Blaise Compaoré vous a parlé de la déclaration lue à la radio ? », à cette question de Me Lallogo Julien, l’accusé répond par la négative et précise que c’est lors de la lecture du document à la radio qu’il en a eu connaissance.

En tant que chef de corps adjoint du CNEC, Gilbert Diendéré était également le chef de sécurité du conseil de l’Entente, le quartier général du conseil national de la révolution (CNR). Pour Me Lallogo, l’accusé devait donc défendre le conseil de l’Entente et s’opposer au Front populaire qui venait de mettre fin au CNR. « Si le Front populaire n’était pas légal, en quoi le CNR lui l’était ? Il est également venu au pouvoir par un coup de force », a lancé le général général Gilbert Diendéré. Et l’avocat de lui rappeler que si le CNR n’était pas légal, pourquoi défendait-il alors son quartier général qui était le conseil de l’Entente.

Débats avec Me Ambroise Farama

L’avocat a reproché à l’accusé le fait de n’avoir pas vérifié si les personnes couchées au conseil de l’Entente étaient vraiment mortes. « L’état dans lequel j’ai vu les corps, le sang qui coulait, je ne pouvais pas imaginer que quelqu’un pouvait sortir vivant ». Pour l’avocat, il aurait dû appeler les secours d’urgence pour secourir ceux qui avaient reçu des balles. « Lorsque l’infirmier de la présidence entend les coups de feu et qu’il accourt avec son matériel d’urgence, c’est encore le général Gilbert Diendéré qui l’empêche d’intervenir. » Pour sa défense, l’accusé a reconnu qu’il y a des choses élémentaires qui auraient dû être faites mais « il ne faut pas oublier la situation de stress qu’il y avait à l’époque. »

Débat avec Me Olivier Badolo

A son tour, Me Olivier Badolo fera observer que c’est parce que l’acte posé par les soldats Nabié N’Soni et Arzouma Ouédraogo dit « Otis » (les soldats armés que Diendéré a rencontrés au conseil de l’Entente, ndlr) lui a été bénéfique dans son ascension qu’il ne les a pas sanctionnés d’avoir participé à l’assassinat des treize personnes. « Ce n’est pas leur action qui m’a permis d’être là où je suis. Ce sont mes compétences intellectuelle, opérationnelle et militaire qui m’ont amené là où je suis », avait déclaré Gilbert Diendéré.

Et l’avocat de rappeler à l’accusé qu’il existait tout de même des militaires plus compétents que lui mais qui n’ont pas eu la même ascension. Pour lui, l’évolution de l’accusé dans l’armée n’était qu’une récompense. « Ça n’a aucun sens. J’ai évolué normalement », a soutenu Gilbert Diendéré.

Débats avec Me Prosper Farama :

L’avocat dit ne pas comprendre pourquoi le général Diendéré, plutôt que de se rendre précipitamment au conseil de l’Entente sans arme, n’a pas fait usage de son talkie-walkie pour comprendre ce qui se passait. Et l’accusé de répondre qu’il n’était pas loin du lieu d’où provenaient les tirs. Il n’a donc pas jugé nécessaire d’utiliser son talkie-walkie. Face au refus du général Diendéré de répondre à certaines questions de l’avocat, estimant avoir déjà donné des réponses depuis le début de son audition, la tension est montée d’un cran. « Vous vous acharnez sur moi. Certes ce sont des éléments du CNEC qui ont commis l’acte mais ce n’est pas le CNEC dans son ensemble, encore moins l’adjoint du chef de corps du CNEC que j’étais. »

A la question de Me Famara de savoir de quel camp il faisait partie en 1987, l’accusé répond qu’il ne faisait partie d’aucun camp. Il reconnaît avoir organisé une réunion dans la matinée du 15 octobre 1987, pour sensibiliser les éléments des sécurités rapprochées de Thomas Sankara et de Blaise Compaoré au regard de l’atmosphère délétère qui prévalait entre les deux camps. Pour l’avocat de la partie civile, il ne fait aucun doute que le général Gilbert Diendéré était du camp de Blaise Compaoré au regard des fonctions qu’il a occupées à ses côtés après le coup d’Etat.

Débats avec Me Guy Hervé Kam

Lors de l’interrogatoire, l’accusé a déclaré qu’il n’était pas au courant du « complot » de 20h qui devait aboutir à l’arrestation de Blaise Compaoré, selon plusieurs témoignages. D’ailleurs notons que le général Diendéré avait déclaré que lorsqu’il est arrivé au conseil de l’Entente après les tirs, le soldat Nabié N’Soni avait justifié l’acte par le fait qu’ils ont pris les devants vu que Thomas Sankara projetait d’arrêter Blaise Compaoré.

Gilbert Diendéré a insisté qu’il ne s’agissait à l’époque que de rumeurs, rumeurs qui ont quand même conduit à l’organisation de la réunion avec les sécurités rapprochées des deux leaders de la révolution pour apaiser la tension.
« Lors de la réunion, les éléments de la garde de Sankara m’avaient proposé de faire en sorte que les deux autorités se retirent à Dori ou à Bobo-Dioulasso pour régler leurs mésententes. Après la réunion, je devais contacter des responsables politiques pour voir ce qu’on pouvait faire mais les choses se sont passées vite. On n’a pas eu le temps de réagir ».

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Vos commentaires

  • Le 11 novembre 2021 à 15:29, par Etirev En réponse à : Procès « Thomas Sankara et douze autres » : Retour sur l’audition du mercredi 10 novembre du général Gilbert Diendéré

    On reconnait clairement qu’il y avait deux camps, celui de Sankara et de Blaise. On reconnait que chaque camp était armé, la garde Balise et celle de Sankara. On reconnait que la situation était précaire et confuse, qu’il y avait beaucoup de rumeurs.
    On reconnait qu’une unité spéciale était créée pour assurer la protection du président. Cette unité était confiée a un mercenaire qui n’a pas fait carrière dans l’armé du pays. On reconnait que cela pouvait créer plus de confusion.
    On peut dire que chacun se cherchait et ce qui devait arriver, arriva. Dommage pour les familles, dommage pour le pays. Victimes et bourreaux sont les enfants du pays. Quel gâchis !

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