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Procès « Thomas Sankara et douze autres » : « Je reconnais avoir commis une faute professionnelle », affirme Alidou Diébré

Publié le jeudi 4 novembre 2021 à 11h18min

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Procès « Thomas Sankara et douze autres » : « Je reconnais avoir commis une faute professionnelle », affirme Alidou Diébré

Appelé à la barre, ce jeudi 4 novembre 2021, le médecin militaire Alidou Diébré reconnaît avoir « établi, signé et délivré trois certificats de décès » en janvier 1988, soit trois mois après le drame du 15 octobre 1987.

Il a raconté qu’il se trouvait à l’infirmerie de garnison du camp Guillaume Ouédraogo, ce jeudi noir où le président Thomas Sankara et douze autres personnes ont été tués. En raison du couvre feu, il ne rentrera chez lui que le lendemain pour, dit-il, se débarbouiller.

Les jours passèrent jusqu’en janvier 1988, où il reçut un dimanche matin la visite de trois veuves parmi lesquelles Mariam, l’épouse du président Sankara. « Elles sont venues me solliciter pour un certificat de décès. J’étais un peu embêté. Je ne savais pas ce qu’il fallait écrire puisque je n’étais pas sur les lieux du drame. J’ai mis la mention "mort naturelle". Elles m’ont dit qu’elles avaient besoin de déposer des documents à la mairie pour des formalités administratives. Je reconnais n’avoir pas obéi à la rigueur de la déontologie. J’ai juste posé un acte humanitaire pour aider ces femmes », a reconnu l’accusé qui avait le grade de commandant militaire au moment des faits.

A la barre, il a tenu à préciser que contrairement aux charges retenues contre lui, il n’a pas signé de certificat avec la mention « mort accidentelle ». « Je n’ai signé que trois certificats avec la mention "mort naturelle", a-t-il insisté.

Le président de la Chambre, Urbain Méda a demandé à l’accusé s’il était interdit de mettre la mention « mort par fusillade » sur le certificat. En répondant par la négative, Alidou Diébré a rappelé que « mort naturelle, mort accidentelle et mort par fusillade » ne sont pas des causes de décès mais juste un diagnostic de décès. Et pour trouver la cause d’un décès, il aurait fallu faire une autopsie. « Si j’avais mis ‘’mort par fusillade’’, cela suppose que j’étais sur les lieux. Je reconnais avoir commis une faute professionnelle. Je devais constater le décès avant de délivrer le document (…) Si j’avais écouté ma raison, j’aurais dit aux veuves d’aller voir un autre médecin. Mais ce serait méchant. Ce n’est pas mon caractère. »

A la question du président de la Chambre de savoir s’il a fait l’objet de pression avant l’établissement du certificat de décès, Alidou Diébré répond par la négative. « Je suis militaire. J’ai horreur de l’injustice. Personne ne m’a mis la pression. J’ai délivré le document en mon âme et conscience ».

Si c’était à refaire, délivrerait-il un certificat médical avec la mention « mort de mort naturelle ? » A cette interrogation du parquet, l’accusé répond sans ambages : « J’allais réfléchir par deux fois. Mais aider les gens fait partie de mon caractère. J’allais le faire. Tant que je ne vois pas le corps, je mets la mention naturelle jusqu’à ce qu’on me réquisitionne pour une autopsie afin de trouver la cause du décès ».

A la charge de l’accusé, le parquet fera remarquer qu’un certificat de décès sert à certifier que la mort est réelle et constante. Il ajoutera que le certificat doit préciser les causes et les circonstances du décès, ce qui n’est pas le cas pour ceux délivrés par l’accusé. Pour la partie poursuivante, il existe trois types de morts : suspecte, naturelle et violente. « La mort naturelle résulte d’un état pathologique ou physiologique connu ou non. Elle s’oppose à la mort violente qui résulte d’une action violente exercée par un agent externe dans des circonstances pouvant être criminelle, accidentelle et suicidaire ».

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Vos commentaires

  • Le 4 novembre 2021 à 12:03, par Time Will Tell En réponse à : Procès « Thomas Sankara et douze autres » : « Je reconnais avoir commis une faute professionnelle », affirme Alidou Diébré

    Trois mois après, même ceux ceux qui l’ont tué ont dit qu’ils l’ont tué par anticipation. Mais toi tu trouves moyen de mentionner "mentionner mort naturelle". Tu te défends que tu n’as pas vu le corps, donc tu ne pouvais pas mettre "mort par fusillade". mais c’est quel corps tu as regardé en mentionnant "mort naturelle alors ?"
    Que chacun assume !

  • Le 4 novembre 2021 à 12:41, par Sanou En réponse à : Procès « Thomas Sankara et douze autres » : « Je reconnais avoir commis une faute professionnelle », affirme Alidou Diébré

    Au moins nous apprenons que ce sont les veuves qui sont allées demander. Nous aimons tous Sankara et quand nous avons vu ce certificat nous étions tous révoltés, aujourd’hui nous comprenons que nous avions tous été manipulés mais la manipulation qui a été faite de ce certificat n’honore personne. Ce certificat a été présenté comme si ce sont les personnes responsables qui ont délivré le document, ce qui n’était pas le cas. Ceux qui ont publié ce certificat auraient bien fait d’avoir la franchise de dire que ce sont les veuves qui sont allées solliciter une aide. Le médecin a rendu service et je lui dis BRAVO et même MERCI.

    Quand notre colère grondait encore par rapport à ce certificat, je pense que les personnes impliquées dans la démarche d’obtention du document auraient pu nous apaiser en nous disant "Les veuves ont eu besoin de documents et ce médecin a bien voulu leur rendre ce service ; il n’est pas parfait mais nous comprenons celui qui nous l’a délivré."

  • Le 4 novembre 2021 à 13:09, par Obliviator ! En réponse à : Procès « Thomas Sankara et douze autres » : « Je reconnais avoir commis une faute professionnelle », affirme Alidou Diébré

    C’est en fin une très bonne chose que le procès de l’assassinat de du PF Thomas Sankara et de ses douzes collaborateurs soit être fait. Seulement, le prcocès est très incomplet car se consacrant seulement aux effets de l’assassinat et pas à ses causes. On devrait chercher à comprendre les causes de l’assassinat du Leader de notre Révolution
    et de ce coup de force qui a en même temps mis fin à notre Révolution Démocratique et Populaire, qui pourtant fit trembler l’impérialisme. Hors beaucoup de civils ont joué un rôle essentiel dans l’assassinat de Sankara, en installant même la faille entre les guides de la Révolution et en bien augmentant la pression en attisant le feu jusqu’à l’éclatement le 15 octobre 1987. Pourquoi juge-t’on seulement les militaires (et jusque là seulement les plus petits des criminels du 15 octobre 1987) alors que la plupart des complices et criminels civils n’ont rien à s’inquiéter ? Donc ce procès, bien que salutaire, ne restera que le pic du iceberg dans l’assassinat de ce grand’homme intègre que fut PF Thomas Sankara.
    Je pense qu’il faut s’attaquer aux causes des maux, si on veut les éradiquer définitivement, afin qu’ils ne puissent plus jamais se repéter. Et si le PF et la Révolution on été si farouchement combattu jusqu’à la mort, c’est que le Burkina Faso avait pris la bonne voie.

    Vive le PF Thomas Sankara,
    Vivent les marthyrs de la Révolution Démocratique et Populaire,

    La Patrie ou la Mort, Nous Vaincrons !

  • Le 4 novembre 2021 à 13:13, par Omar Dao En réponse à : Procès « Thomas Sankara et douze autres » : « Je reconnais avoir commis une faute professionnelle », affirme Alidou Diébré

    Je doute de la sincérité de ce monsieur, pour moi, il ne dit pas la vérité, il a juste choisi une posture de défense comme quoi il s’est trompé de bonne foi en voulant aider de pauvres veuves. Mais, qui peut croire que dans l’atmosphère qui régnait après l’assassinat de Sankara, un militaire eût délivré un papier en rapport avec cet évènement sans s’en référer à sa hiérarchie ?

    • Le 4 novembre 2021 à 18:05, par Somé En réponse à : Procès « Thomas Sankara et douze autres » : « Je reconnais avoir commis une faute professionnelle », affirme Alidou Diébré

      En tout cas tout doit se savoir et tout va se savoir. Pour le moment on n’a que la version de ce monsieur. C’est simple . Comme on a au moins une des trois veuves dans la salle de ce tribunal, c’est Mariam Sankara. Je pense bien que les juges auront l’inspiration de l’inviter un jour ou l’autre à la barre pour témoigner, dire au tribunal si c’est bien de gaité et de coeur comme cela qu’elles sont allées demander à ce medecin militaire le certificat pour, comme il le prétend, des démarches administratives, et quelle a été leur réaction en voyant cette mention de "mort naturelle" sur le document. Difficile de croire à la sincérité de ce monsieur Diéderé pour l’acte posé qui a plutôt tout d’un faux en écriture du pouvoir de l`’époque destiné à se donner bonne conscience de leur forait, une manoeuvre dilatoire qui, en plus infantilisait l’opinion publique : Comment vous tirez boum, tout le monde a entendu, tout le monde a vu les tombes fraiches creusées nuitamment à Dagnouen, puis juste trois mois après vous signez que non hein, ils sont morts de mort naturelle. Quand-même, êtes vous des nés avant la honte ?

  • Le 4 novembre 2021 à 15:01, par razougou En réponse à : Procès « Thomas Sankara et douze autres » : « Je reconnais avoir commis une faute professionnelle », affirme Alidou Diébré

    Je pense qu’il est innocent. Il n’avait pas mesuré la portée de son acte

  • Le 4 novembre 2021 à 15:12, par Burkimbila En réponse à : Procès « Thomas Sankara et douze autres » : « Je reconnais avoir commis une faute professionnelle », affirme Alidou Diébré

    Il ya certains aspects qu’il faudrait tenir compte.
    Nous étions dans un régime d’exception qui avait ses règles de fonctionnement. On ne doit pas juger des crimes commis dans un régime d’exception avec des règles d’un régime démocratique. Ce coup d’état qui a ocassionné la mort de Sank et autres est du fait d’un règlement de compte entre militaires. C’est ensemble qu’ils avaient arraché le pouvoir et c’est ensemble qu’ils se sont entre-tués.
    Je suis prêt à mourir pour la vérité et justice pour Norbert ZONGO, rien que lui.

  • Le 4 novembre 2021 à 15:33, par EBENEZER En réponse à : Procès « Thomas Sankara et douze autres » : « Je reconnais avoir commis une faute professionnelle », affirme Alidou Diébré

    Colonel-major, devant un tribunal il faut avoir un franc parler jusqu’au bout.
    Je vous félicite d’avoir reconnu que vous avez commis une faute professionnelle.Cependant vous auriez dû dire au tribunal que vous avez consciemment commis cette faute professionnelle pour éviter que la famille DIEBRE ne vienne solliciter à son tour votre certificat de décès.

  • Le 4 novembre 2021 à 17:38, par caca En réponse à : Procès « Thomas Sankara et douze autres » : « Je reconnais avoir commis une faute professionnelle », affirme Alidou Diébré

    J’ai cru que le procès autant médiatisé allait chercher les causes de l’assassinat de Thomas Sankara que les détails individuels. Jusqu’à présent, je reste à ma faim car la moitié des accusés déjà interrogés ne donnent aucune information sur la responsabilité de Blaise Compaoré.
    J’ai pas compris l’attitude de l’avocat de défense l’accusé qui n’a réagit face cet certificat dont a bénéficiée madame Sankara. Il sera intéressant de savoir son appréciation dans un certificat de décès qui fait polémique où un individu risque une peine lourde. La défense devait interroge la plaignante comme témoin. De trois certificats, c’est le certificat qui cause problème.

  • Le 4 novembre 2021 à 18:01, par VICTO En réponse à : Procès « Thomas Sankara et douze autres » : « Je reconnais avoir commis une faute professionnelle », affirme Alidou Diébré

    Je suis d’avis avec Sanou , au moins à l’époque ce papier a permis aux veuves de régler certains soucis administratifs et nous éclairer sur la délivrance de ce certificat qu’on pensait être établi par les méchants.Il pouvait refuser et ces pauvres dames allaient souffrir ne soyons pas durs.

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