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Procès des présumés terroristes au Burkina : Deux individus condamnés, un autre relaxé au bénéfice du doute

Publié le vendredi 13 août 2021 à 23h09min

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Procès des présumés terroristes au Burkina : Deux individus condamnés, un autre relaxé au bénéfice du doute

Après un renvoi le 12 août 2021 dû à un mouvement d’humeur de la garde de sécurité pénitentiaire, le procès des présumés terroristes a repris ce vendredi 13 août 2021 au TGI Ouaga II. Pour cette dernière journée de la première session, ce sont au total trois dossiers qui ont été jugés.

Poursuivi pour association de malfaiteurs en relation avec une entreprise terroriste, C.K était le premier à passer à la barre. De nationalité malienne, l’accusé âgé de 31 ans et père de sept enfants, aurait fait partie d’un commando de huit personnes qui a attaqué la brigade territoriale de gendarmerie de Bourzangha dans la nuit du 6 au 7 novembre 2017.

Les locaux de la brigade ont été criblés de balles, du matériel de bureau endommagé et des motos de dotation et personnelles détruites. Arrêté en janvier 2019 au marché de Bourzangha, il est d’abord détenu à la brigade de Kongoussi, puis transféré à la prison de haute sécurité. Au cours de sa détention, la brigade a subi une attaque, considérée comme une tentative de libération du prévenu par les autres membres de son groupe.

Devant le tribunal, le prévenu fait preuve d’une attitude ambiguë. Si au début il dit ne parler que français et fulfuldé, il affirme après ne comprendre que le tamachec. Si face au juge d’instruction il a reconnu appartenir à un groupe terroriste composé de 15 personnes et affilié au groupe Ansaroul Islam, devant le tribunal, il dit n’appartenir qu’à un groupe de bergers de Nassoumbou. Ces tergiversations ont poussé un des juges du tribunal à se demander si le prévenu jouissait de toutes ses facultés.

Mais pour le procureur, cette attitude fait partie de sa ligne de défense et le tribunal ne doit pas se laisser berner. En effet, précise-t-il, lorsque C.K a été arrêté et détenu à la brigade de Kongoussi, il n’a répondu à aucune des questions posées, si bien qu’on le pensait sourd et muet. Déféré à la prison de haute sécurité, ce n’est que lorsque le juge d’instruction lui fait savoir qu’il avait voulu lui permettre de contacter sa famille, que C.K a commencé à s’exprimer. Le procureur soutient que les preuves accumulées durant l’instruction permettent de conclure à la culpabilité du prévenu. Il ajoute que l’accusé lui même a cité les autres membres du groupe auquel il appartient et a même donné leur situation géographique, d’où ils opéraient ( axe Djibo-Bourou-Nassoumbou).

Face au tribunal, l’accusé insiste qu’il n’a rien fait, et qu’il n’a pas été arrêté en possession d’armes mais au marché de Bourzangha qu’il a l’habitude de fréquenter. "Je n’ai rien fait, on m’a pris comme ça. Je n’ai pas volé. J’ai envie de voir ma famille", a-t-il laissé entendre. Convaincu de sa culpabilité, le tribunal l’a condamné à 21 ans de prison ferme assortis de 14 ans de sûreté et à une amende de deux millions de FCFA.

Le doute profite à l’accusé

Le deuxième prévenu B.O.I. est né en 1994 au Mali et est poursuivi par le tribunal pour association de malfaiteurs en relation avec une entreprise terroriste. Il a été interpellé puis conduit au commissariat de Ouahigouya en février 2019. D’après son récit, B.O.I. a été contraint par une connaissance, B.M., pour être enrôlé au compte d’Ansardine. Pendant onze jours, il a reçu une formation (exercice physique, maniement d’arme et lecture du coran).

B.O.I. et son acolyte B.M. étaient venus sur le territoire burkinabè pour déposséder un homme de sa motocyclette. Leur propre motocyclette a eu une panne sèche mais ils se sont arrangés pour accomplir leur mission. Une fois de retour au Mali, B.M. a sommé B.O.I. de repartir récupérer leur engin qui était en panne. C’est ainsi que B.O.I. a été interpellé au cours de sa seconde mission.

Devant la barre, B.O.I. a reconnu être enrôlé à Ansardine sous menace d’assassinat. Il a également indiqué au tribunal que tous les jeunes de son village, vulnérables financièrement, ont rallié ce groupe armé. Pour le parquet, les faits sont constitués, B.O.I. doit être déclaré coupable pour association de malfaiteurs en relation avec une entreprise terroriste. Il a requis 21 ans de prison ferme et une amende de deux millions de francs CFA, le tout assorti d’une sûreté de 14 ans. Dans son verdict, le juge a déclaré B.O.I. non coupable au bénéfice de doute. Il a ordonné sa relaxe.

Trahi par sa concubine et son petit frère

Le dernier dossier a être jugé au cours de cette première session est celui de D.O.M. Il lui est reproché les faits d’association de malfaiteurs, de détention illégale d’armes à feu et de dégradation volontaire de biens mobiliers et immobiliers tout cela en relation avec une entreprise terroriste. Les faits remontent à la nuit du 23 au 24 mars 2017, au cours de laquelle des individus armés motorisés ont attaqué la mine de Beleourou à Inatta. Ayant tenté en vain de saboter la station de pompage, ils ont alors endommagé le château d’eau en le criblant de balles.

C’est en venant faire le constat des dégâts et dans le cadre de l’enquête, que la gendarmerie découvre sur les lieux un téléphone portable ainsi qu’un chargeur avec des munitions. Grâce à la collaboration du réseau téléphonique et de l’Office national d’identification, l’identité du propriétaire du téléphone portable est connue. Il s’agit de D.O.M. Lorsqu’il est arrêté, il se déclare sous une fausse identité. Ce sont sa concubine et son petit frère qui confirment son identité aux enquêteurs.

Interrogé sur les raisons de la présence de son téléphone portable sur les lieux de l’attaque, le prévenu soutient qu’il avait quelques jours avant les faits, échanger son téléphone avec son ami D.I dit Idi, qui aurait lui aussi troqué le téléphone avec O.B. C’est ce dernier, dit-il, qui aurait participé à l’attaque. Pour le ministère public, les faits reprochés à D.O.M sont constitués et les preuves retrouvés sur les lieux de l’attaque le démontrent pleinement. C’est pourquoi il a requis que l’accusé soit condamné à dix ans de prison ferme assortis d’une période de sûreté de sept ans et d’une amende d’un million de FCFA. Et c’est à cette peine que le tribunal a condamné D.O.M. 

Un quatrième présumé terroriste devait passer à la barre, mais au regard de l’heure avancée, le tribunal a décidé de renvoyer le dossier à la prochaine session.

Armelle Ouédraogo/ Cryspin Laoundiki
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