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Célébration du 8-Mars : « Il faut que les femmes poursuivent le combat mais sans une opposition aux hommes », Julienne Dembélé de l’association Femme et vie

Publié le lundi 8 mars 2021 à 09h20min

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Célébration du 8-Mars : « Il faut que les femmes poursuivent le combat mais sans une opposition aux hommes », Julienne Dembélé de l’association Femme et vie

Le lundi 8 mars 2021, le Burkina Faso, à l’instar des autres pays du monde entier, célèbre la Journée internationale de la femme. Une occasion donnée pour réfléchir sur leurs conditions de vie. Dans le cadre de cette commémoration, nous avons rencontré Julienne Dembélé/Sanou, coordonnatrice des projets et programmes à l’association Femme et vie. Elle illustre bien la combinaison de la femme qui s’épanouit dans le travail et les loisirs, tout en prenant le temps de prendre soin également de sa vie de femme au foyer. Dans cette interview qu’elle nous a accordée, Mme Dembélé dévoile son combat au quotidien pour l’épanouissement de la femme burkinabè.

Lefaso.net : Pouvez-vous vous présenter à nos lecteurs ?

Mme Dembélé : Je suis Mme Dembélé née Sanou Julienne. Je suis la coordonnatrice des projets et programmes à l’association Femme et vie.

Qu’est-ce qui a milité à la création de votre association et à quels besoins répond-elle ?

L’association Femme et vie est une organisation de femmes qui a vu le jour le 9 mars 2005. L’association est basée à Bobo-Dioulasso et est reconnue sur le plan national. Nous avons des représentations à Dédougou, Banfora, Diébougou et à Houndé. Nous travaillons aujourd’hui avec environ 150 femmes qui œuvrent chaque jour au sein de l’association pour l’épanouissement de la femme.

Ce qui nous a poussées à créer cette association, c’est la souffrance des femmes, leur vulnérabilité, leur insuffisance dans l’organisation. C’est-à-dire qu’elles hésitent souvent à se mettre en association ou encore en réseau. Et les besoins pour lesquels l’association a été créée, c’est la capacitation des femmes, de sortes à les rendre plus résilientes face à la pauvreté et les violences basées sur le genre. En association, on est plus forts qu’individuellement.

Quels sont vos principaux combats pour l’épanouissement de la femme burkinabè ?

Le principal combat que nous menons au quotidien pour l’épanouissement de la femme burkinabè est celui de l’équité genre. Il y a encore trop de violences basées sur le genre. Prenons quelques exemples, dans le domaine de l’éducation, du primaire au secondaire, plus on monte, plus le taux de maintien des filles dans le système est très faible par rapport à celui des garçons. Les actions de l’Etat en faveur de la scolarisation des jeunes filles sont à saluer même si elles n’ont pas résolu tout le problème. Elles ont certes contribué à élever le taux de scolarisation des filles, mais leur maintien dans le système n’est pas assuré.

Or, le premier facteur d’épanouissement de la femme est l’éducation. Une femme éduquée est beaucoup plus résiliente face aux violences comme l’excision, le mariage forcé ou précoce. Dans le domaine de la santé, un simple exemple, c’est le nombre de femme qui meurent encore en couche au Burkina Faso. Cela n’est pas normal. Le programme des gratuités de soins mis en place par l’Etat pour les femmes enceintes et les enfants de zéro à cinq ans est une bonne chose. Maintenant, il faut travailler à corriger les dysfonctionnements de ce programme.

Dans le domaine de l’autonomisation de la femme, le principe d’infériorité de la femme par rapport à l’homme reste encore trop présent dans la conscience populaire. Il y a donc un travail de déconstruction à faire à ce niveau. Car il sous-tend beaucoup de violences comme la non-implication de la femme dans les décisions du ménage sur des questions concernant elles-mêmes. L’homme prend seul les décisions au risque de se tromper. Il faut la complémentarité de la femme et de l’homme. Comme le disait Héraclide, c’est dans l’union des contraires que réside l’harmonie du monde. Pour accroitre le niveau d’implication des femmes dans les décisions au sein de leur famille, il faut nécessairement accroitre leur niveau d’instruction, leur pouvoir économique.

En résumé, les principaux défis à relever pour l’épanouissement de la jeune fille, de la femme burkinabè, sont celui de l’éducation, de l’accès à des soins de qualité à tout moment, de l’autonomisation qui passe par la jouissance du droit aux facteurs de production, dont la propriété foncière.

Est-ce que les femmes ont conscience de ces potentialités pour leur épanouissement ?

Oui, elles en sont conscientes. Et pour en être plus conscientes, il faut qu’elles bénéficient de l’éducation car c’est un grand facteur de développement. Cela leur permettra de mieux comprendre la situation dans laquelle elles se trouvent.

Quels sont vos moyens d’actions ?

Notre principal moyen d’action est l’éducation aux droits humains des acteurs. Les femmes elles-mêmes pour accroitre leur capacité de résilience, et les hommes qui sont les auteurs des violences basées sur le genre afin qu’ils comprennent que certaines pratiques sont néfastes, et aussi les leaders coutumiers et religieux qui sont les dépositaires de la tradition. Nous pensons donc à leur renforcement de capacité, la formation, la sensibilisation pour amener le changement de cette situation. Ces actions sont menées à travers la mise en œuvre de différents projets avec l’accompagnement de nos partenaires qui sont entre autres, le ministère en charge de la femme à travers leurs services déconcentrés, les ONG nationales et internationales intéressées par ce que nous faisons. Nous les remercions au passage.

Je pense à ces sœurs, à ces mamans qui (...) tant qu’elles ne vont pas chercher ce fagot de bois pour aller vendre, ne saurait comment se débrouiller pour survenir au besoin de la famille

Quelles difficultés votre association rencontre-t-elle sur le terrain ?

Les difficultés ne manquent pas. Nous avons la réticence de certains hommes en raison de la persistance des préjugés sur la femme. On a également l’indisponibilité des ressources et toutes les associations ont ce problème. Nous avons beaucoup de projets dont le financement n’est pas toujours assuré. Or la cotisation des membres ne représente pas grande chose. Vue la pauvreté qui sévit dans nos contrées et dire à une femme de cotiser n’est pas chose aisée.

Est-ce qu’il y a des actions qui sont menées en faveur des hommes afin de les amener à un changement de comportement ?

C’est à travers l’éducation aux droits humains. Par exemple, nous avons le projet avec le Fonds commun genre pendant quatre ans. A travers ce projet nous avons réalisé des formations, des séances de sensibilisation à travers des théâtres fora où nous sommes allées vers ces hommes pour les sensibiliser afin de les amener petit-à-petit à changer. Le changement de mentalité n’est pas une chose facile. C’est une lutte de longue haleine. Ce qui est sûr, on continue le combat.

Qu’est-ce que vous pensez de la célébration du 8-Mars, la Journée internationale de la femme ?

La célébration du 8-Mars est une très bonne chose. Puisque à cette occasion, le monde entier marque une halte dans les activités quotidiennes pour réfléchir à la condition de la femme. Quel est le chemin parcouru, où en sommes-nous, et quelles sont les perspectives. L’aspect festif ne doit pas prendre le pas sur le caractère de la réflexion sur la condition de la femme. Les célébrations doivent être inclusives de toutes les couches sociales. Donc je pense à ces sœurs, à ces mamans qui, du matin au soir, sont en train d’œuvrer pour chercher la pitance quotidienne. Lire la suite

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