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L’éducation pour tous : Un problème plus qu’une solution

Publié le lundi 28 décembre 2020 à 12h00min

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L’éducation pour tous : Un problème plus qu’une solution

L’éducation pour tous est-elle une solution pour les Etats africains de façon générale et pour le Burkina Faso de façon particulière ? N’est-ce pas là l’un des pièges de nos systèmes éducatifs tant décriés que nous avons hérité de la colonisation et dont les ONG et les partenaires se font un immense plaisir d’en faire leur cheval de bataille ? En clair, quel serait le meilleur système éducatif adapté à nos Etats alors en voie de développement, il y a de cela près d’une soixantaine d’année ?

Pour en savoir, analysons ensemble ce phénomène déguisé sous l’appellation « Education pour Tous ».
Ces deux dernières décennies ont été très mouvementées en ce qui concerne les reformes de nos systèmes éducatifs qui ont bien du mal à répondre aux problèmes de chômage et permettre une adéquation entre l’offre et la demande d’emplois en conformité avec nos réalité de développement.

Remarquons que le système classique en matière d’éducation dans lequel évolue la majorité des Etats africains met beaucoup plus l’accent sur la formation d’administrateur à travers des programmes de formation plus généraliste que technique ; hors ces Etats alors en voie de développement ont plus besoins de bâtisseurs.

Mais d’où nous vient cette idée de toujours continuer dans cette dynamique de formation même si nous avons la pleine conscience que cette offre de formation généralisée ne résout pas nos problèmes liés à l’adéquation entre l’offre de formation et le développement économique.

Faisons un tour rapide à l’époque coloniale pour tenter de comprendre cela.

Pendant la période coloniale, il avait été donné l’ordre de former des colonisés dont le rôle serait de jouer d’interface entre les colons et le peuple sous domination. Cette offre de formation ne devrait que se limiter à la formation d’agent administratif et dont le niveau ne devrait pas excéder le cours élémentaire CE.

L’objectif de cette formation étant de former des natifs afin que ces derniers puissent à leur tour administrer leur peuple en leur nom et pour le compte des colons et on peut dire que cela a bien marché à cette époque car cela répondait à un objectif bien défini qui était de facilité l’administration des territoires et non de sortir les peuples colonisés de l’ignorance.

Qu’en est-il une soixantaine d’année après les indépendances proclamées ?

Ayant hérité du même système éducatif, les institutions chargé de l’éducation n’ont juste fait qu’étendre la même erreur de politique éducative à un grand nombre d’enfants justifiant ainsi l’éducation pour tous sans pour autant se demander les raisons d’une telle décision ni les impacts sur le long terme que cela pourrait engendrer.

Conséquence, des milliers de jeunes sortent chaque année de nos écoles ( primaire, post-primaire, secondaire et supérieure) avec des diplômes qui ne leur servent que comme une preuve de leur passage à l’école venant du même coup gonfler le taux de chômage et impactant ainsi négativement le développement de leur pays qui en réalité pour se construire a besoin de formation de construction que de bavardage inutile sans concrétisation.

Notons que même s’il est du rôle du gouvernement d’offrir une formation à chaque individu sans exclusion aucune il est d’autant plus important de s’assurer que l’offre de formation permettra non seulement au plus grand nombre de tirer leur épingle du jeu en occupant un emploi utile ou en en créant plusieurs grâce aux formation reçues et ainsi contribuer à la construction de leur nation sur tous les plans.
Malheureusement le constat dans nos pays en est tout autre, et pourquoi ?
On leur a dit que la formation des bâtisseurs coûte trop chère pour qu’ils puissent se le permettre.

Ainsi nos institutions dans leur folles envies de confier la gestion de nos affaires publiques aux experts étrangers qui eux-mêmes n’appliquent jamais ce qu’ils conseillent aux autres, en est la cause. La preuve, même dans les pays développés, l’école est un luxe que peut s’offrir uniquement les parents nantis à leurs enfants garantissant le succès de ces derniers.

Ces pseudo experts nous conseillent de laisser tomber la formation technique car étant trop chère et de nous diriger vers la formation de masse qu’est l’administration qui jusque-là n’a, à ma connaissance, développé aucun Etat.

Or pour nos Etats africains en voie de développement avec des ressources exceptionnellement élevées, la chose la plus importante en matière de formation serait de se focaliser sur l’exploitation et la transformation de ces ressources à travers la formation d’ingénieurs, de techniciens et autres métiers relatifs à la technique et à l’industrie.

Mais pour nos experts en tout, cela coûte très cher pour nos Etats qualifiés de pauvres et donc ils nous conseillent donc d’ amplifier la formation généraliste inutile pour nos Etats et à tout faire pour inclure tous nos enfants dans ce système à travers la politique de l’éduction pour tous, même si cela revient à créer le chômage pour tous à travers la formation excessive de profil d’administrateur plutôt que de mettre l’accent sur la formation d’ingénieur et de créateurs de richesse propre.
Pour comprendre l’ampleur de ce choix de formation, imaginez que pour faire fonctionner un usine de transformation on forme plus d’agents s’occupant de la paperasse donc de l’administration que de techniciens capables de faire fonctionner cette usine. Quel serait alors le résultat ?

Les statistiques montrent que nos écoles forment plus de désœuvrés que d’individus aptes à créer des richesses afin d’impacter grandement notre développement économique et social et cela juste pour mettre en place la politique de l’Education pour Tous.

Mais qu’est-ce que l’éducation pour tous ?

Dans sa forme actuelle, l’éducation pour tous est la politique d’accès à l’éducation pour tous les enfants quelle que soit la qualité de celle-ci. En gros, cela s’apparente à offrir une formation par souci de conformité sans s’inquiéter des résultats attendus ou de ce que cela aura comme impact sur le long terme dans la vie socioéconomique de la nation.

Cela explique les fonds investis pour la construction des bâtiments ainsi que dans la formation des personnels de l’éducation afin de rendre cette école accessible à la majorité .
Le seul problème est que parmi ces gros efforts déployés, très peu sont consacrés aux formations utiles telles que les centres et collège agricole, d’élevage, de pisciculture et autres qui sont même ignorés par les adeptes de cette politique mais qui pourtant sont les réels chantiers pour parler de développement dans le contexte de nos Etats.

C’est en cela que cette politique se présente plus qu’un problème et non une solution vu qu’elle priorise plus la formation en quantité accessible à tous et moins efficace à celle en qualité dont nos Etats ont réellement besoin pour se transformer en de véritables chantiers de développements.

L’éducation pour tous serait alors le choix d’opter pour la quantité de l’offre éducative extensible au plus grand nombre au profit de la qualité délaissée car jugée trop expansible pour nos Etats.

Après constat de tous les résultats obtenus de l’éduction en quantité offerte, il parait alors judicieux et objectif de se pencher sur l’éduction de qualité qu’est la formation d’ingénieurs, de techniciens, et d’agents techniques, tous domaines confondus, afin que ces derniers puissent étendre à leur tour cet enseignement de façon progressive et méthodique afin d’atteindre le plus grand nombre en matière de formation de qualité et incontournable pour nos nations qui, même pour installer la plus petite des unité de production, doivent faire appels à des spécialistes étrangers qui ont eu cette idée cependant très basique.

Ce n’est qu’en orientant notre formation en éducation de qualité que nous transformerons nos Etats en de véritables chantier de développement dans lesquelles les populations sont les réelles acteurs car ayant été formés de façon adéquate pour faire face aux défis qu’impose le vrai développement.

En résumé, c’est adopter une politique éducative dans lequel seront sélectionnés des élèves afin de leur donner une formation de qualité même si cela est très coûteuse car investir dans l’éducation utile est incontournable pour l’atteinte des différents objectifs pour tout Etat désireux de se voir au concert des nations ayant une bonne qualité de vie à travers le développement et enfin sortir de cet esclavage intellectuel qui, à mon sens, n’a que trop duré.

C’est donc accepter de payer le prix et de rendre l’éducation accessible par une minorité afin de mieux la conduire pour le progrès à long terme qui au fur et à mesure remplacera les enseignements transmettant des savoir inutiles en de vraies connaissances utiles et pratiques car c’est là que naitra le salut des nations qui sont longtemps restées dans une dynamique où les orateurs sont appréciés et récompensés au détriment des vrais bâtisseurs dont nos Etats ont réellement besoin.

Quelles leçons à tirer pour les parents d’élèves ?

Je tiens à rappeler que tout comme l’obligation de vêtir, soigner et nourrir un enfant, lui offrir une formation de qualité qui aura un impact sur sa vie personnelle et professionnelle est plus qu’une nécessité.

Nous vivons dans un monde où ceux qui s’offrent une formation de qualité en adéquation avec le monde du travail de leur environnement et en fonction de personnalité ont plus de chance de s’en sortir au détriment de la masse à qui est offert l’éducation pour tous qui est en parfait déphasage avec nos réalités professionnelles africaines. Dès lors, tout frais relatif à l’éducation utile devient un réel investissement qui portera ses fruits dans un futur très proche.

Avant de vous introduire ou d’introduire vos enfants dans le système éducatif proposé par la politique gouvernementale, il est utile de vous demander la finalité qu’offrent ces formations car tôt ou tard vous devriez faire face aux conséquences des choix de formation que vous faites et si vous n’y prenez garde vous risquez de le regretter amèrement.

Il me plait de conclure par cette citation attribuée à un sage chinois en ces termes : « Si vous voulez détruire un pays, inutile de lui faire une guerre sanglante qui pourrait durer des décennies et coûter chère en vies humaines. Il suffit de détruire son système d’éducation… »

KOTE Oumarou,
Coach en développement scolaire, académique , professionnel et Formateur RH.

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Vos commentaires

  • Le 29 décembre 2020 à 15:03, par PrimO20 En réponse à : L’éducation pour tous : Un problème plus qu’une solution

    Avoir la chance de pourvoir s’exprimer n’a pas d’égal.
    L’accès au savoir et au savoir-faire permet de gagner sa liberté. L’accès à l’essentiel passe par l’instruction pour ne pas uniquement se soumettre aux règles dictées, en comprenant ce qui les justifie à un moment donné.
    OUI, l’école de base pour tous est INDISPENSABLE pour promouvoir l’EGALITE.
    Il reste à définir comment on apprend et ce qu’on apprend, ce qui remet en questions l’héritage colonial.

  • Le 29 décembre 2020 à 15:45, par Gérard LYONNET En réponse à : L’éducation pour tous : Un problème plus qu’une solution

    Cet article éclaire bien les difficultés que rencontrent les élèves à l’issue de leur cursus scolaire. Pas ou peu d’’écoles techniques.
    Tous ceux qui ont le niveau suffisant ne rêvent que remporter un concours dans l’administration, les autres partent en RCI. Et aucun ne fait profiter de ses acquits à sa famille notamment en brousse. Pourtant il y aurait comme l’écrit l’auteur de grands besoins en agriculture et autres métiers techniques.

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