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Retard des cantines scolaires : « Un enfant qui a faim est capable de voler », dixit Sibiri Ouédraogo, directeur d’école

LEFASO.NET | Par Cryspin Masneang Laoundiki
lundi 11 mars 2019.

 

Instaurée dès l’époque coloniale, la cantine scolaire au Burkina Faso poursuit son chemin avec ses hauts et ses bas. Conçue pour être fonctionnelle dès la rentrée scolaire, cette cantine arrive généralement pendant le deuxième ou le troisième trimestre de l’année scolaire. Un tel retard, devenu une habitude, a des conséquences non négligeables. En marge d’une enquête sur les conditions d’accès à l’école de certains élèves, Sibiri Ouédraogo, directeur de l’école primaire publique Kossodo A de Ouagadougou, a partagé son avis sur le retard de ces cantines.

Le retard de la cantine scolaire, c’est devenu maintenant une habitude, a déclaré Sibiri Ouédraogo, directeur de l’école primaire publique Kossodo A de Ouagadougou. A qui la faute ? En réponse à cette question, le directeur interpelle les premières autorités en ces termes : « Gouverner, c’est anticiper, c’est prévoir. Il y a des statistiques qui permettent de connaître l’évolution démographique de la ville de Ouagadougou.

Si malgré tout cela, jusqu’en fin février il n’y a pas à manger, il y a une rupture de confiance qui s’installe entre les différents acteurs de la chaîne éducative. L’enfant ne croit plus à ce que son maître lui dit, le parent n’a plus confiance parce que c’est nous qui sommes sur le terrain. ».

Une anecdote du directeur. « L’année passée, un parent d’élève m’a dit ceci : « Directeur, on croyait que c’était vous qui bloquiez cela dans votre magasin et ne vouliez pas préparer pour nos enfants ». Ils ne savent pas qu’on n’a pas eu la dotation. « Et je ne peux pas passer de cour en cour pour expliquer aux gens que c’est l’Etat qui n’a pas envoyé », se justifie-t-il.

Un impact sur les études des enfants

Visiblement, il y a de quoi se plaindre. En effet, ce retard de la cantine a un impact négatif sur les études, nous confie le directeur. « L’enfant qui n’a pas à manger, vous ne savez pas quel peut être son comportement à partir de 15h dans les classes. C’est de la souffrance ! Il y a des enfants qui viennent à 15h et qui sont incapables d’avoir un rendement scolaire.

Sur le plan sanitaire, il peut y avoir un impact négatif parce que ces enfants sont obligés, pour ceux qui ont encore les moyens, d’acheter de la nourriture vendue au bord de la route avec tout le risque cela peut causer. »

Moralement aussi, Idrissa Sibiri Ouédraogo, fait noter un impact négatif. Car selon lui, un enfant qui a faim est capable de voler. « Il est capable d’agresser son voisin pour lui soutirer son petit pain ». Il y a trop de risques autour de l’absence de la cantine dans les écoles.

Au cours de nos échanges, le directeur de l’école primaire publique Kossodo A a soulevé le cas de la « cantine endogène », pratiquée le plus souvent dans les milieux ruraux. Il a indiqué que dans les grands centres, « la cantine endogène devient un problème. Les parents ne sont pas prêts à remettre des contributions pour l’achat des vivres. Ils préfèrent donner directement de l’argent de poche à leurs enfants, ce qui peut être aussi source de problèmes. ».

Pour le cas de l’école primaire publique de Kossodo, la cantine scolaire de l’année 2018-2019 a été réceptionnée le mardi 5 mars dernier. Une situation qui prouve une fois de plus que le retard de ces vivres est une réalité.

Ce mardi 12 mars 2019, le ministère de l’Education nationale, de l’alphabétisation et de la promotion des langues nationales (MENAPLN) organise la « Journée africaine de l’alimentation scolaire », à Nabitenga dans le Ganzourgou. En plus de rappeler l’importance de l’alimentation scolaire, cette journée doit également permettre au MENAPLN d’interroger le processus d’approvisionnement des cantines.

Cliquez ici pour lire aussi : Cantines scolaires au Burkina : un bilan peu satisfaisant

Cryspin Masneang Laoundiki
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