Populations et accès à l’assainissement : Le réseau « Projection » approfondit la réflexion« Le Marketing de l’Assainissement », c’est le thème qui a réuni début juin, et ce, pendant trois jours, les acteurs du réseau « Projection ». Autour d’un atelier international au Centre Cardinal Paul Zoungrana à Ouagadougou, ils ont réfléchi sur les questions relatives à l’accès aux systèmes d’assainissement par les populations. Réseau de jeunes professionnels, « Projection » travaille notamment dans l’eau et l’assainissement. Les acteurs se sont retrouvés à Ouagadougou entre jeunes professionnels venus de pays de l’Afrique de l’Ouest (Bénin, Togo, Niger, Burkina, Côte d’Ivoire) autour d’un atelier international de partage d’expériences sur les meilleures pratiques en matière de promotion de l’assainissement auprès des populations. L’idée était, situe Félicie Kambou, responsable de l’antenne Afrique de l’Ouest du réseau Projection, de « débroussailler » le concept de « marketing de l’assainissement » pour les participants qui, poursuit-elle, n’étaient pas tous au point sur l’idée de cette approche assez nouvelle dans le secteur de l’assainissement. Le séminaire devrait donc permettre aux différents participants, à travers différentes sessions, de s’outiller non seulement sur le concept de « marketing », mais également sur le volet « marketing social ». Il s’est agi de travailler à se mettre beaucoup plus dans une approche de vente et de promotion des services de l’assainissement, en sortant de l’ancienne approche faite de concepts « moralisateurs ». L’idée n’est pas, précise Mme Kambou, de se faire du business mais plutôt de permettre aux clients de pouvoir avoir une valeur ajoutée à leur bien-être. « Les gens s’intéressaient à l’approche et on a remarqué que ça correspondait à leurs questionnements actuels ; ce qui a généré une participation globale satisfaisante. On a privilégié les débats, les travaux en groupes. Ce qui a du coup occasionné une bonne participation », a souligné Félicie Kambou. Pour la déléguée générale Chloé Jolly, « vendre n’est pas quelque chose qui est un réflexe dans le secteur de l’assainissement ; on parle de promotion, on n’aime pas trop le mot vente des produits de l’assainissement », relève-t-elle. L’atelier a donc été un moment de diagnostic du manque d’informations dans le secteur de l’assainissement, en essayant de trouver des expériences concrètes sur lesquelles s’appuyer pour atteindre l’objectif. Le défi actuel étant de faire en sorte que la question des latrines soit prise en compte par les populations elles-mêmes, comme une priorité et non attendre qu’on vienne les leur offrir. Car, les sujets liés à l’assainissement restent toujours, dans les pays africains, une question encore tabou ; à telle enseigne qu’elle est quasiment occultée par les populations dans les besoins prioritaires. Changer de paradigme … ! La présence d’acteurs de l’administration publique au séminaire, notamment de techniciens communaux, a, de ce fait, été jugée intéressante en ce que ceux-ci vont pouvoir faire remonter auprès de leurs administrations, les expériences, les connaissances qu’ils ont pu acquérir et aux fins d’une implication ‘’plus poussée’’ de l’administration publique dans ces questions d’assainissement. A l’issue de la rencontre, il a été convenu de capitaliser tous les échanges par un document de restitution qui sera partagé à tous les participants et partenaires. Aussi, a-t-il été décidé la mise en œuvre de conférences électroniques pour permettre aux membres, individuellement, de pouvoir apporter leurs expériences selon leurs pays et de faire des contributions à distance. Chaque mois, il est également prévu l’organisation d’une rencontre à Ouagadougou sur un thème particulier (si les membres en font la demande et si le réseau estime cela nécessaire). L’atelier s’est achevé par des échanges de pratiques sur quatre sujets : les stratégies pour vendre les produits de l’assainissement, les stratégies pour vendre les services de l’assainissement, le financement de l’assainissement et un autre sujet sur le renforcement des capacités des acteurs de l’assainissement dans un but de mettre en place une stratégie dans le secteur. Oumar L. OUEDRAOGO Des participants apprécient … : Désirée Michèle Kanyala, Coordinatrice des activités d’animation et de communication du projet plateforme Re-Sources, réseau d’ONG et d’universités du Nord et du Sud ; M. Tambiga, Technicien communal en eau, hygiène et assainissement dans la commune de Bilanga, province de la Gnagna : D. Théophane Lankoandé, technicien communal, mairie de Manni : Rachid Tcheou, Ingénieur Togolais, directeur exécutif de l’ONG Globe Vert travaillant dans la recherche au Cameroun : Des aspects sur le dimensionnement des outils d’assainissement, des latrines ont été des questions plus intéressantes, approfondies. On a essayé d’harmoniser les systèmes de construction des latrines. Des économistes ont également échangé avec nous sur la qualité et l’introduction des outils marketing dans la nouvelle vision du commerce équitable. Cet atelier, premier du genre en matière de marketing de l’assainissement, est une expérience réussie et nous espérons que de telles expériences seront renouvelées dans d’autres pays pour permettre à d’autres acteurs d’avoir une vision aussi globale et partagée sur les questions d’assainissement. Aujourd’hui, quand vous allez au Cameroun, vous avez une méthode de construction, le Togo a la sienne et qui n’est pas la même qu’au Burkina ; il n’y a pas d’harmonie. Ce genre d’atelier permet d’harmoniser d’abord les méthodes et les systèmes de construction et voir maintenant comment amener les populations à s’intéresser à ces outils, parce qu’aujourd’hui, nous devons comprendre que l’Afrique ne doit pas rester sous perfusion ; ça veut dire que nous n’allons pas toujours attendre que les financements viennent des pays développés pour développer l’Afrique. Donc, les nouveaux outils de marketing social nous amènent à comprendre l’utilité de mettre nos moyens dans l’acquisition des outils d’assainissement qui sont des besoins de base. Quand vous entrez dans une famille, vous verrez qu’il y a une dizaine de membres qui possèdent des téléphones haut de gamme d’au moins trente-cinq mille, alors qu’ils n’ont pas le sanitaire dans leur maison. Aujourd’hui, en harmonisant le coût d’acquisition des outils sanitaires qui vont tourner entre quinze à vingt mille francs CFA, ça va être encore plus accessible. Il est donc essentiel qu’un ménage puisse prendre aussi cette question d’assainissement, au même degré d’importance que l’utilisation des téléphones portables. Propos recueillis par Oumar L. OUEDRAOGO |