Propos de Prince Johnson : Y aura-t-il du nouveau dans le dossier Sankara ?A l’image de l’Afrique du Sud ou du Rwanda avec ses Gatchatcha, le Liberia veut exorciser ses vieux démons à travers une Commission vérité et réconciliation (TRC), instaurée par la présidente élue en novembre 2005, Ellen Johnson Searleaf. De ce fait, depuis un an, les bourreaux de ce peuple supplicié défilent devant cette structure pour faire acte de contrition pour toutes les atrocités qu’ils ont eu à commettre durant la sale guerre (1989 -2003). Ainsi, le 28 août 2008, Prince Johnson, « qui faisait partie de la bande de Charles Taylor, était son général le plus aguerri, le plus efficace et le plus prestigieux », comme le dit Ahmadou Kourouma dans son ouvrage Allah n’est pas obligé, est venu battre sa coulpe pour sa responsabilité dans le sort de milliers de morts, de mutilés ou de déplacés. Rien d’étonnant de la part de ce boucher au regard froid et impavide, qui fit de la guerre son buisness, au nom d’une prétendue révélation de Dieu, qui lui aurait « dicté la mission de sauver le Liberia ». En effet, les hauts faits de ce petit Pol Pot africain sont connus : enrôlement de "small figters" (enfants soldats), viols, mutilation du président Samuel Doe, filmé par une camera sous son regard goguenard de sadique, un cigare à la bouche, et d’autres exécutions pour ne dévoiler qu’un pan de ses hauts faits. Il s’agit donc, ni plus ni moins d’un tortionnaire, qui décharge sa conscience, encore que dans son cas, la désinvolture avec laquelle il se libérait devant la TRC laisse dubitatif sur la sincérité de sa demande de pardon. Mais là où ce repenti a commencé à devenir intéressant, c’est dans ses "révélations" ou du moins ce qu’il veut faire passer pour telles sur cette période sombre de son pays. On apprend ainsi avec lui, même si c’était un secret de Polichinelle, que son mentor, Charles Taylor, a pu s’évader en 1985 des geôles de l’Etat du Massachussets grâce au concours des services secrets yankee, qui l’ont utilisé par la suite pour se débarrasser du sanguinaire Samuel Doe. Mieux : les 500 personnes de la salle de la TRC et tous ceux qui étaient amassés dehors ont bondi lorsque Sir Prince Johnson a avancé le nom de Thomas Sankara dans son flot de propos, tant il est vrai que le mythe du père de la Révolution burkinabè reste vivace dans les esprits. Verbatim : Mais quels étaient formellement les commanditaires de l’assassinat de l’homme du 4 août 83 ? Prince Johnson ne le précise pas. Reste une question centrale : avec cette déposition de Prince, Mes Dieudonné Kounkou, Benewendé Sankara et la veuve Mariam auront-ils du nouveau à verser dans le dossier Sankara ? Un dossier-valise, où chacun vient aménager ou déménager commodément ses effets d’annonce. Z. Dieudonné Zoungrana L’Observateur |