Zimbabwe : Les héros sont fatiguésPour la première fois depuis l’indépendance du pays en 1980, la ZANU/PF le parti de Robert Mugabé a perdu la majorité au parlement zimbabwéen. En attendant la publication des résultats de la présidentielle que l’opposition affirme avoir aussi remportée, les contempteurs du vieux Bob (entendez Robert Mugabé) flétrissent « le dictateur » peu éclairé qui a plongé son pays dans le marasme économique en un peu plus de vingt ans de règne sans partage, « Voilà comment finissent les anti-démocrates notoires, » entend-on dans la bouche des commentateurs, qui, soulignent que c’est l’option économique du régime qui a occasionné sa chute. Une vision que l’on peut partager, mais qui est quelque peu réductrice si tant est qu’elle ne tient pas compte de la capacité de nuisance dont savent faire montre les Occidentaux, chaque fois que leurs intérêts sont menacés. Or, c’est ce qui est advenu au Zimbabwe, au détour des années 2000, lorsque Robert Mugabé a décidé contre vents et marées de nationaliser les terres jusque-là propriété réservée des fermiers blancs. Un crime de lèse- majesté que son pays paiera au centuple, avec l’embargo aussitôt décrété contre lui par les Occidentaux sous couvert de « non respect des règles démocratiques ». Un prétexte en fait pour faire payer à l’impertinent cette incartade au moment où le voisin sud-africain, confronté, lui aussi à cette question foncière, évitait soigneusement de trancher dans le vif. On ne vit pas d’idéologie et d’eau fraîche, et, le retour du Zimbabwe à la « normalité » nous le prouve encore. Du point de vue de la démocratie, entendue comme l’expression et l’assumation de la souvaineté nationale, le pays aura donc effectué un recul. Quant à Mugabé, il aura été patriote jusqu’au bout, lui qui a refusé de truquer les élections, convaincu que le peuple était avec lui. Il faut croire que la conscience nationale dudit peuple n’est pas forgée dans l’acier, même si on peut parier que les graines de la fierté semées par Mugabé, germeront un jour. La servitude ne saurait aucunement être le lot éternel des peuples africains. Boubakar SY Sidwaya |