Célébration du 11-Décembre : Le regard des chercheurs et universitaires burkinabèLe gouvernement burkinabè a décidé de renouer avec le faste d’antan de la célébration du 11-Décembre, fête nationale. Cette année en effet, tous Albert Ouédraogo, maître de conférence, enseignant à l’Université de Ouagadougou : "Fêter d’accord, le minimum vital d’abord". Pour Albert Ouédraogo, le 11-Décembre est un moment qui exprime notre retour à la liberté et notre prise en charge de notre destin. "Le 11-Décembre pour les Burkinabè est quelque chose de très important dans la mesure où, si l’on se réfère aux conditions de constitution de l’Etat burkinabè, on se rend compte que cela n’a pas été quelque chose d’aisé", précise le Pr Ouédraogo. Remontant le cours de l’histoire, l’enseignant de littérature orale, dira que l’ex-Haute-Volta (actuel Burkina Faso), est un espace conquis par la force coloniale au moment où il y avait des entités séculaires qui géraient cet espace en toute liberté et en toute souveraineté (royaumes mosse, gourmantché, peulh, etc,). "Avec la colonisation et sous le fait de la violence politique, ces peuples ont été soumis", indique l’enseignant de lettres. Et à la différence des autres colonies, celles de la Haute-Volta a été démantelée pour être partagée entre la Côte d’Ivoire, le Soudan français et le Niger, rappelle Albert Ouédraogo. Et n’eut été la mobilisation des acteurs politiques de l’époque, souligne-t-il, la Haute-Volta, aujourd’hui Burkina Faso, n’aurait pas été reconstituée. Au regard de cette donne, le professeur d’Université, pense que le 11-Décembre devrait être une date de rencontre de tous les Burkinabè, quel que soit leur bord politique, un lieu de retrouvailles, de mémoire pour tous. "Cette date ne devrait souffrir d’aucune divergence, d’aucune contestation. C’est la date qui fonde notre identité et nouvelle citoyenneté", confie-t-il. Albert Ouédraogo estime que la fracture sociale, constatée avant et après la période révolutionnaire est en train d’être dépassée à travers le 11-Décembre. "Vivre ensemble, c’est se quereller, confronter des projets de société qui ne sont pas toujours les mêmes. Mais nous ne devons jamais remettre en cause le socle sur lequel nous sommes assis". Le faste ? pas nécessaire Albert Ouédraogo dit être animé par deux sentiments au regard du faste, avec lequel le 11-Décembre sera célébré : satisfaction et crainte. Mais le deuxième sentiment semble dominant chez l’enseignant d’Université, car dit-il, de plus en plus, nous mettons plus l’accent sur les fêtes au détriment de ce qui paraît essentielle. "Nous avons trop de fêtes pour laquelle, nous mettons trop de millions, alors que le pays profond a des difficultés énormes, et nous côtoyons des situations de misère au quotidien", précise l’ex-doyen de la fac de lettres, avant d’ajouter : "je suis enclin à dire que, pour pouvoir faire des grandes fêtes, il faudrait pouvoir assurer le minimum vital au maximum de Burkinabè". Et le professeur d’avertir : "le Burkina devrait faire attention et savoir raison garder au regard du gaspillage d’argent consacré aux fêtes". Car selon lui, les sommes d’argent auraient pu contribuer à créer des emplois, résorber le chômage, et la fuite des cerveaux. Albert Ouédraogo estime également, que la situation agricole de cette année, avec la flambée des prix, ne milite pas pour une célébration grandiose du 11-Décembre 2007. Le professeur d’Université a son idée derrière la tête : "pour moi, on aurait pu trouver une année ronde. On n’est pas loin du cinquantième anniversaire de l’indépendance et l’Assemble nationale aurait pu voter un budget pour célébrer ces 50 ans, occasion de dresser un bilan et regarder ensemble vers les 50 ans à venir". Basile Guissou, délégué général du CNRST : "Mon pays coûte plus cher que mille milliards de francs CFA". Pour montrer l’importance de la date du 11-Décembre pour le Burkina Faso, Basile Guissou part d’un rappel historique : "Le 11-Décembre doit représenter pour chaque Burkinabè, un point de repère, une référence historique pour évaluer notre passé et notre présent, afin de projeter notre avenir. En ce sens que ce pays que nous aimons tous et qui se nomme aujourd’hui le Burkina Faso, a été créé dans le cadre d’un ensemble de propriété de la France. L’on se rappelle encore le président voltaïque à l’époque, Maurice Yaméogo, revenant de Paris, présentant la mallette en disant : "Voilà je vous apporte l’indépendance". A propos du budget de cinq cent (500) millions pour les festivités du 47e anniversaire, l’avis du professeur Guissou est le suivant : Pr Serge Théophile Balima, directeur de l’IPERMIC : Le 11-Décembre est une date importante dans l’évolution historique du Burkina Faso. Le directeur de l’Institut panafricain d’étude et de recherche sur les médias, l’information et la communication (IPERMIC), le professeur Serge Théophile Balima estime que le 11-Décembre est assurément une date importante dans l’histoire du Burkina Faso, puisque c’est par elle que la Haute Volta reconstituée s’est retrouvée en une entité étatique. Selon lui, le 11-Décembre peut être considérée comme une date importante dans l’évolution historique du Burkina Faso, d’autant plus qu’elle se veut une opportunité de réfléchir sur ce que chaque Burkinabè a pu apporter à la nation entière. selon lui, "Le citoyen, jouissant entièrement de ses droits civiques, politiques, doit pouvoir s’interroger sur sa contribution au processus de développement". Dans ce sens , le professeur Balima a soutenu que le 11-Décembre est une occasion de faire un bilan, sur le plan politique, pour connaître les efforts consentis collectivement par tous les citoyens et ce qu’ils n’ont pas pu réaliser ensemble, afin de prendre des résolutions pour l’avenir. "Mais personnellement j’aimerais que chacun de nous puisse réfléchir sur le développement humain ; je veux dire qu’il faut privilégier les secteurs dits sociaux parce que sans le développement de ces secteurs sociaux, il n’y aurait pas de mon point de vue, un véritable développement durable dans notre pays". Il a alors expliqué qu’il s’agit des secteurs de la santé et de l’éducation. De son avis, il est nécessaire que tous les enfants aillent à l’école, dans de bonnes conditions, qu’il y ait des filières de formation aussi diversifiées que possible et que des moyens conséquents soient alloués à la recherche scientifique. Sans cette recherche scientifique, dit-il, il ne peut y avoir d’intervention, de création, de progrès endogène... Gabriel SAMA Sidwaya |