Indépendance du système judiciaire burkinabè : Mythe ou réalité ?Au Burkina Faso, l’article 129 de la Constitution du 11 juin 1991 affirme sans détour que le pouvoir judiciaire est indépendant. De même, l’ordonnance n°91-50/PRES du 26 août 1991 portant statut du corps de la magistrature énonce en son article 2 que les magistrats sont indépendants et ne peuvent être inquiétés en raison des actes qu’ils accomplissent dans l’exercice de leur mission, hormis les cas prévus par la loi sous réserve du pouvoir disciplinaire. Au regard de ces dispositions, peut-on soutenir que le pouvoir judiciaire est totalement indépendant au Burkina Faso ? Au Burkina Faso, il est généralement admis qu’en vertu de l’indépendance du pouvoir judiciaire, « tout juge est libre de régler les affaires dont il est saisi, selon son interprétation des faits et de la loi, sans être soumis à des influences, des incitations ou des pressions indues, directes ou indirectes, de la part de qui que ce soit pour quelque raison que ce soit ». « Que le pouvoir judiciaire est indépendant des pouvoirs exécutif et législatif ». Pour que cette indépendance soit mise en œuvre au quotidien, il existe des systèmes comme l’inamovibilité, le conseil supérieur de la magistrature, etc. De tous ces éléments, l’inamovibilité parait fondamentale. En vertu de l’inamovibilité, le juge, fut-il nommé ou élu, ne peut être ni révoqué, ni suspendu, ni mis à la retraite prématurément, ni déplacé arbitrairement, en dehors des cas et sans observation de formes et conditions prévues par la loi. L’inamovibilité du juge constitue essentiellement une garantie de la bonne administration de la justice. Elle permet aux justiciables de pouvoir compter sur des juges qui ne sacrifieront point la justice, ni la vérité à des considérations particulières. Ainsi, pour qu’il y ait indépendance de la justice, le juge doit travailler à dire la vérité et ne pas se laisser influencer par les justiciables, tout comme ceux-ci doivent travailler à ne pas faire obstruction à la vérité. Situation qui n’est pas toujours le cas de part et d’autre, d’où la prise en otage de la justice ! Analysé sous l’angle de l’exigence d’une indépendance totale vis-à-vis des deux autres pouvoirs classiques que sont l’exécutif et le législatif, l’existence d’un pouvoir judiciaire véritable, au pays des Hommes intègres paraît douteuse. De l’indépendance de la justice face à l’exécutif Deux considérations au moins contribuent à réduire la marge d’indépendance théorique reconnue à l’organe judiciaire du Burkina. Il s’agit d’une part de la tutelle administrative et financière étroitement exercée sur lui par l’exécutif et d’autre part du pouvoir de nomination. Dans le premier cas, le budget est élaboré et exécuté par l’administration centrale du ministère de la Justice et non par les cours et tribunaux détenteurs du pouvoir de juger. Aussi, le recrutement, la répartition et la gestion des magistrats relèvent-ils des services centraux du ministère de la Justice avec un certain droit de regard d’autres ministères tels que la Fonction publique et les Finances. Ali TRAORE Sidwaya |