Poésie orale : Le chant du « baoorgo »Introduction Cet article de vulgarisation est issu d’une publication scientifique en décembre 2021 intitulée : « Poéticité du langage parémiologique du baoorgo, corne parleuse des Moose », dans la revue LES CAHIERS DU CELTHO (Revue inter-africaines du Centre d’Etudes Linguistiques et Historiques par la tradition Orale ; ISSN 1010 – 4372). 1. Qu’est que la corne musicale ? Elle provient d’espèces animalières qui sont de la même famille chez les Moose : widpelgo (coba), Banéfo (espèce de Coba : robe rousse, peau très lisse ; le mâle seul a des cornes), Niégo (espèce de biche à dos voûté, robe tachetée comme celle de la civette), le Nianka (gazelle), le Walga (biche-antilope), le Gnisri (biche et cerf) (Cf. illustration 1). 2. Des origines du baoorgo Selon nos enquêtes de terrain et nos analyses nous pouvons distinguer deux types d’origines à savoir : Une origine mystique : Une origine corporelle : Matériel et fabrication 3. Qu’est-ce qu’un instrument à vent ? Les instruments à vent, encore appelés aérophones sont ceux dans lesquels, à travers ou autour desquels, une certaine quantité d’air est mise en vibration. Ils sont classés selon la manière dont on les fait vibrer : 3.1. Instrument à air ambiant Ces types d’instruments à vent agissent directement sur l’air ambiant (Cf. Illustration n°2). 4. Qu’est-ce que la poésie Pour les besoins de l’étude nous pouvons essayer de définir la poésie comme étant un discours vivant, fécond et plein de sens, qui jaillit de nulle part, que certains auteurs appellent inspiration et qui est « comme une inscription de la vérité dans l’âme » (Jacques Derrida, 1989, p.360). 5. L’Inspiration dans la poétique du Baoorgo Tout comme dans la Grèce antique ou dans l’empire romain où les poètes disent qu’Apollon et les muses les inspirent, chez les Moose, l’inspiration peut être attribuée à une puissance numineuse dans les arbres (tiiga, tiise), les buissons (kaôngo)… à l’animal (wilpéelgo) dont les cornes sont utilisées pour tailler le baoorgo, dans l’instrument lui-même. 6. Poésie et paroles du Baoorgo Les airs du baoorgo ont une seule intention, un seul objectif, émouvoir d’abord l’auditoire et par le contenu des textes interprétés, et par les harmonies des sons émis par l’instrument de musique ; dès lors, nous pouvons affirmer qu’ils ont une intention poétique. 6.1. Le Baoorgo et les genres poétiques de la tradition orale : Essai de classification endogène En effet, les différents spécialistes classent, selon l’objectif du genre, la littérature orale en fonction de diverses inspirations : Belinga Eno, cité dans la thèse de Bogniaho (Ascension Bogniaho, 1995, p591), distingue quatre principaux types d’inspiration : poétique, dramatique, didactique et mixte. 6.2. Analyse de la poésie du Baoorgo Proverbes et devises « Une poésie dramatique ou épique (la chansonfable) : solemdé ; 7. Poésie et Musique du Baoorgo La poésie Orale est liée à la vie de tous les jours. Elle ne dort pas dans les livres ; elle est populaire comme la musique à qui elle est intimement liée. Nous allons traiter cette partie en deux points distinctifs : 7.1. Rapport mélodie et poésie Musique naturelle parce que même dans ses formes les plus élaborées et les plus complexes elle demeure au plus proche de la musicalité naturelle dans son rythme et ses échelles. 7.2. Rapport rythme du Baoorgo et poésie « Outre, cet aspect mélodique des paroles du baoorgo et qui densifie le caractère poétique du message, nous remarquons qu’à travers ses textes, sur le plan de sa structuration, lorsqu’on en écoute ou qu’on en analyse certains, on découvre parfois une similitude avec le vers français, bien qu’on ait affaire à des versets. Il y a une forme propre, une construction des textes sifflés, qui ne respecte pas forcement celle du langage parlé. Par exemple pour exécuter cette phrase ci-dessous, dite à l’intention de nouveaux mariés : Que Dieu fasse que vous ayez des enfants comme tel oiseau CONCLUSION Nous avons montré ici les subtilités de la parole musicalisée du baoorgo en montrant la poéticité du langage instrumental. Ce qui intègre un certain nombre de codes et de savoir-faire. Nous avons pu découvrir la richesse d’un pan de la culture moaaga qu’est l’univers de ses instruments à vent notamment la corne parleuse. Notre souhait est que cette recherche puisse intéresser les jeunes, contribuer à susciter des vocations à leur niveau, à sonner l’alarme sur la disparition de nos valeurs traditionnelles en général et de nos instruments de musique traditionnels en particulier. Nous avons pu, constater la diversité de nos instruments à vent de façon générale mais également, découvrir la philosophie des Moose à travers cet article. NOTES (1) Il y a deux types de kinkirsi : les kinkir-sôma (bons génies) qui sont généralement les tĩngana (singl. tĩngande) qui résident dans les bois sacrés et sont chargés de la protection des villages et les kĩnkir-wẽese (mauvais génies) qu’on appelle les tiise qui vivent aux abords immédiats des habitations et peuvent rendre les humains malades. Les kinkirsi vivent longtemps mais ne sont pas immortels (Grégoire Kaboré, 2020, thèse de doctorat unique Université Joseph Ki Zerbo p.97) (2) Ceux qui travaillent la peau chez les Moose ; ils sont d’une famille (buudu) endogame… ILLUSTRATIONS : Zougmoré Séni, baoorgo de Koupèla
le baoorgo ou Corne musicale
Illustration n°2 : Instrument à air ambiant
Illustration n°3 : Air contenu dans une cavité Sifflet de forme complexe
Sifflets aplanis et cruciformes
Grégoire Kaboré REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES Albert OUEDRAOGO, « La poésie des Griots », in Université De Ouagadougou, Mélanges Offerts à Maître Titenga Frédéric Pacere, L’Harmattan, 1991, p189-207. G. KABORE 2021 : « Poéticité du langage parémiologique du baoorgo, corne parleuse des Moose », LES CAHIERS DU CELTHO Revue inter-africaines du Centre d’Etudes Linguistiques et Historiques par la tradition Orale ; ISSN 1010 – 4372 G. KABORE, Paroles du Baoorgo : corne parleuse des Moose du Burkina Faso, DEA Université d’Abomey Calavi sous la Direction de Ascension BOGNIAHO, 2011, 112p. Oger KABORE, « Instrument de musique et pouvoir magico- religieux chez les Moose », in Découverte du Burkina, 1993, Tome1, p127-17. Ketlin ADODO, « Etude sur la poésie, la tradition orale et la littérature au Togo et Programme d’initiation pour les élèves de l’école primaire », juin 2001, 50p. Louis MILLOGO, « Eléments de Poétique de la Poésie des Griots de Titinga Frédéric PACERE », in Université De Ouagadougou, Mélanges Offerts à Maître Titenga Frédéric Pacere, L’Harmattan, 1991, p359-377. Pierre AREZORENA, Moos’yuumba – une société africaine, les yuumba et leurs instruments de musique’’, 2Tomes, thèse de Doctorat de 3è cycle, Paris VII, 1986, 614p. Sékou TALL, « La poésie des griots de maître Titinga Frédéric PACERE », in Université De Ouagadougou, Mélanges Offerts à Maître Titenga Frédéric Pacere, L’Harmattan, 1991, p249-256. |