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Attentat à Abuja : Du mauvais usage d’Allah

lundi 29 août 2011.

 

Pas de trêve des confiseurs pour Al-Qaida en Algérie et Boko Haram au Nigeria. Les terroristes islamistes ont choisi le 26 août 2011, dernier vendredi du Ramadan, pour revenir dans les actualités sanglantes, en sacrifiant une quarantaine d’innocents sur l’autel de leur croisade de la haine.

A Abuja, un kamikaze s’est fait exploser au volant d’un camion bourré d’explosifs au siège des Nations unies, faisant 24 morts et de nombreux blessés. Le même jour, un quart d’heure après la rupture du jeûne, deux kamikazes déclenchaient leur charge d’explosifs devant l’académie militaire de Cherchell, tuant 18 personnes. Ce timing est-il anodin ou confirme-t-il l’allégeance de la secte du Nord-Nigeria à Al Qaïda ?

Toujours est-il que ces deux attentats ont visé des symboles pour mieux frapper l’imaginaire collectif et inspirer la terreur : en s’attaquant à l’ONU, emblème des nations, et si loin de leur base qui est au nord, la secte nigériane est entrée dans une logique internationaliste, le territoire nigérian servant de théâtre d’opération ; elle montre ainsi qu’elle est capable de frapper n’importe quelle partie du Géant de l’Afrique.

Auparavant elle était connue pour son opposition au gouvernement fédéral de Lagos en vue de faire de Borno, son fief, un Etat islamique. Cet attentat contre l’ONU signe donc et l’extension du champ de la lutte, et l’entrée de Boko Haram dans l’internationale terroriste.

Il n’est cependant pas exclu que cette attaque, bien que revendiquée par un homme se réclamant de la secte de Borno, soit le fait d’Aqmi, car son mode opératoire est d’une grande sophistication : en effet, pour pénétrer dans l’immeuble, ultra-sécurisé, des Nations unies, passer deux barrières de sécurité et perpétrer son forfait, il faut bénéficier d’un vaste réseau de complicités et d’une expertise dont Boko Haram peut difficilement se prévaloir.

S’il s’avérait toutefois que cette action était leur, ce serait vraiment une magistrale gifle administrée au gouvernement de Goodluck Jonathan ; celui-ci avait, on se rappelle, tendu la main aux intégristes, en les conviant à la table des négociations ; mais peut-on fumer le calumet de la paix avec le Diable ?

Le président Bouteflika l’avait bien tenté, après la sortie de l’Algérie de la guerre civile, en accordant l’amnistie aux barbus repentis tout en menant une traque sans merci contre les groupes résiduels comme le GSPC devenu Al Qaïda au Maghreb en 2007.

En frappant la plus grande académie militaire du pays, Aqmi touche au cœur du système sécuritaire algérien et démontre sa grande capacité de nuisance. L’hydre du terrorisme est quasi impossible à détruire : on a beau en couper les têtes, elles repoussent.

Goodluck Jonathan a dit que le terrorisme était . Mais plus qu’une plaie, le terrorisme islamiste ressemble à un cancer. Quelle que soit la médecine utilisée, la chimiothérapie ou l’amputation, en d’autres termes, la négociation ou la guerre, le résultat n’est jamais qu’une rémission : après on découvre que des cellules terroristes ont métastasé d’autres parties du territoire.

Comment, diantre, neutraliser ces barbus qui sèment la mort et la désolation au nom d’Allah ? Faudra-t-il, comme le suggère Abdelwahab Meddeb, que les ulémas et les exégètes reconnaissent que les versets belliqueux tels ceux de l’épée (IX, 5), incitant à tuer les païens, et celui de la guerre (IX, 29), qui appelle à combattre les juifs et les chrétiens, sont liés à des conjonctures historiques et n’ont plus de raison d’être dans notre époque ? C’est peut-être le prix à payer pour faire cesser la mauvaise interprétation du Saint-Coran par les serial killers d’Al Qaïda.

Saïdou Alcény Barry

L’Observateur Paalga



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