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Photos des responsables d’institutions sur les cartes de vœux : Stratagèmes du culte de la personne

mardi 16 avril 2024.

 

Les fêtes sont passées, j’espère qu’à présent l’on peut parler des choses de la communication institutionnelle dans l’optique de rattraper ce qui est possible de l’être. En tout cas, ceux qui s’intéressent à l’action gouvernementale et les institutions qui la sous-tendent ont pu le remarquer, la prolifération des cartes de vœux. Qu’il s’agisse d’une fête chrétienne ou musulmane, ces cartes affichent fièrement sinon allègrement les photos de certains ministres et responsables d’institutions. Je tiens à le préciser, je ne suis pas une spécialiste de la communication imagée, mais du peu que je connais, il y a un minimum de bon sens à toute chose, et c’est à ce minimum de bon sens que j’essaie de faire allusion.

L’idée des cartes de vœux, en soi, n’est pas mauvaise. Au contraire, cela témoigne de la grandeur d’âme, de la sociabilité et pourquoi pas de la maturité spirituelle de tous ces responsables d’institutions qui chaleureusement pensent à leurs collaborateurs et aux usagers de leurs institutions respectives pendant les périodes de fête. C’est une action de communication qui peut contribuer à renforcer la sympathie entre les dirigeants, leurs équipes et les usagers de leurs structures.

La question qui se pose à moi et je pense bien, qu’elle se pose aussi à plus d’un Burkinabè est : Est-il professionnel d’élaborer des cartes avec les photos des premiers responsables d’institutions étatiques ? Personnellement, je dis NON. Cette pratique a malheureusement ou maladroitement tendance à personnaliser l’administration publique, ce qui n’est aucunement professionnel.

Que le Président Idrissa NASSA de Coris Holding Group se fasse des cartes de vœux et qu’il affiche sereinement sa photo, cela ne peut que faire la fierté et la joie de tous. Mais qu’un président d’institution ou un ministre se livre à cette action de communication, il y a grabuge communicationnel. Le rôle d’un professionnel ou d’un chargé de communication ne devrait pas consister à cultiver le culte de la personne. Travailler à faire rayonner l’image de son institution à l’extérieur voilà à quoi doit s’atteler la communication publique de nos institutions. Pour cela, nos institutions ont des logos qui peuvent et doivent être utilisés. Le lot de maladresses communicationnelles observées ces derniers temps m’amène à poser des questions aux chargés de la communication de nos institutions.

Vous-êtes les chargés de com. de votre institution ou le communicateur attitré du dirigeant de votre institution ? Comment peut-on laisser le logo d’une institution ou d’un ministère de côté et afficher la photo du premier responsable sur une carte de vœux institutionnelle ? Quel est le message véhiculé ? Faites-vous la communication institutionnelle ou bien le marketing de votre patron ? Nous devons travailler à séparer les administrations des personnes qui les dirigent. L’institution en a probablement pour longtemps, alors que le dirigeant lui passe très vite et même plus facilement. Lorsque vous mettez des photos à tout vent sur des cartes, vous travaillez à personnaliser cette institution, ce qui n’est pas professionnel, mais surtout entretient les germes du culte de la personne.

Avec l’avènement des réseaux sociaux, de nombreux chargés de communication utilisent Meta, Twitter, etc. pour diffuser les activités professionnelles des entreprises où ils travaillent. Même là, on observe souvent une confusion. J’ai été surprise de voir la nécrologie d’un proche parent d’un responsable sur la page publique d’une administration. Bon sens…Même si vous voulez montrer à « vos Boss » que vous êtes prêts ou prêtes pour eux, essayez de faire la communication pour laquelle vous avez été embauchés. Restez focalisés sur l’institution, communiquez au mieux sur votre institution. Un poste de nomination ne dure jamais éternellement, évitez donc d’afficher votre patron en collant son image partout et de manière inappropriée. Cette mesure en va de même pour n’importe quelle responsabilité publique. Les posters à n’en pas finir à travers nos administrations ne rendent aucunement service ni à la personne affichée ni au peuple.

Il est important de maintenir l’objectif premier des cartes de vœux : transmettre des vœux sincères et chaleureux, sans associer l’institution à une personne aussi puissante, puisse-t-elle paraître. C’est ainsi que vous pourrez préserver l’intégrité morale, éthique et déontologique de nos institutions tout en célébrant les fêtes de manière appropriée et respectueuse.

Nicole Kandolo
kandonic@yahoo.fr



Messages

  • Merci Nicole.
    Tout est dit et bien dit.
    J’espère que cet écrit portera son fruit
    Merci encore

  • Merci Nicole !
    un bon rappel d’intégrité à ceux qui se disent du pays des hommes et femmes intègres.

  • Très beau recadrage ! Bien dit Madame... merci pour cette contribution patriotique

  • Très chère Nicole KANDOLO, vous vous êtes intéressée à un sujet très intéressant et à la fois très délicat. Intéressant en ce qu’il traite du professionnalisme des chargés de com de nos institutions, délicat pour ce qu’il touche aux dirigeants de ces institutions.
    Déjà je vous encourage pour cet exercice auquel vous vous livrez ces temps ci. Si j’ai bonne souvenance vous avez écrit un texte sur les étudiantes mères (celles ayant des enfants) ne sachant que faire des enfants pour étudier et se trouvent obligées de les amener dans les amphi.

    Vous avez fait des recommandations très intéressante. Je pense qu’ainsi vous témoignez de ce que la mère patrie vous tient à coeur 💓. Merci pour vos observances. Pour une Gourounsi c’est rarissime.

  • Parfaitement parfait, comme dirait quelqu’un . Merci Mme pour avoir eu le courage de mettre les pieds dans le plat à propos de ces pratiques contraires à la neutralité de l’administration publique ,même si vous allez récolter des volées de bois vert par certains griots professionnels, prêts à faire n’importe et tout pour plaire au chef ,avec l’objectif de ne pas perdre leur poste . Chapeau bas à vous

  • Très beaux recadrage.Très bien dit.Une vraie contribution patriotique.... merci Madame KANDOLO

  • Votre observation est pertinente, Mme Kandolo. En réalité, les gens ne veulent que le nom. C’est dommage.

  • Ma cherie, rien que la verite. Mais je t’assure que les aplaventristes diront que c’est par jalousie que tu parles comme ca. En tout cas merci d’avoir souligne.

  • Un sujet pertinent de bon sens madame et bien rendu. Chapeau 👊

    L’efficacité des chargés de com. des institutions est encore mise en cause. Aussi communiquant ou chercheur de nomination que tu sois, il y’a ce qu’on appelle formation continue et le travail fait de façon professionnelle, qui doivent être ton cheval de bataille.
    C’est décevant de voir ces écarts professionnels.

  • Whaou ’ belle analyse, j’ai tellement pris du plaisir à vous lire. Un sujet si important que vous avez su aborder , dont je partage entièrement votre point de vue.
    Je le dis ces présidents d’institution doivent pouvoir s’il le veulent disposer de leur propre page pour communiquer sur les Branding et bien efficace qui trace leur parcours. Il ne faut pas attendre est responsable d’une institution pour transporter votre publicité sur la page de l’institution ’
    La communication institutionnelle n’est pas celle de votre personne.

  • Les gens ont des préoccupations diverses et l’auteur ici partage ses états d’âme avec ce que ce sujet interesse ! Vive la liberté d’expression ! Pour d’autres Burkinabè, la principale préoccupation, c’est d’échapper aux tueries des djihadistes !! C’est tout ça la diversité des opinions !

    • Bonjour
      C’est ce qu’on appelle être hors sujet !!
      Elle parle très bien de la gouvernance et vous vous parlez de terrorisme !!
      Hallucinant de lire certains !!
      Une dame qui aborde de façon sérieuse et respectueuse un sujet qui concerne l’administration de notre pays, et on vient parler de terrorisme dedans !!!
      Nous avons beaucoup à apprendre !!
      Merci madame pour cette analyse constructive.

    • Lom-Lom,
      vous êtes là à écrire sur internet alors que "Pour d’autres Burkinabè, la principale préoccupation, c’est d’échapper aux tueries des djihadistes !!".
      Esprit trop étriqué qui gagnerait à s’ouvrir.
      Vous voyez, on peut vous appliquer votre raisonnement.

  • Très bon sujet, c’est la première fois que j’entends cette affaire, je pense que de telles pratiques ont pour source le règne de Blaiso, peut-être que je me trompe, mais ce fût une époque du culte de la personnalité.

  • Très belle analyse sur la communication interne et externe dans nos institutions étatiques. Clair, propre et agréable à lire...

  • Ben, je lis tous les jours dans la presse : "le chef de l’état remet des vecteurs aériens, "le premier ministre offre des vivres",... C’est notre pays qui est comme ça, on aime les "hommes forts" et on s’en fout des institutions et tout est fait pour que perdure le griotisme.
    D’ailleurs, l’autrice affirme : "L’institution en a probablement pour longtemps, alors que le dirigeant lui passe très vite...", alors que moi, au regard de ce que vit notre pays aujourd’hui, j’en suis de mins en moins convaincu.
    Dénoncer des choses, c’est bien, mais il faut aller au bout de la logique,... au rique d’aller au front, d’être "arrestenlevé",...

  • Belle analyse, concise, précise et pertinente ! Toutes mes félicitations ! N’en déplaise à M. ZANZE, Mlle KANDOLO, une gourounsi pur sang a une tête bien pleine. Bravo à elle !

  • Je ne suis d’avis avec vous madame. L’image du premier responsable d’un service publique ou privé sur une carte de vœux cadre parfaitement avec l’objectif recherché du moment.
    Le service ou le ministère reste mais pas le responsable, alors celui-ci a bien le droit d’imprimer son passage par des actes indélébiles...
    Ce n’est qu’un avis divergent d’autant plus que la lumière jaillit de la contradiction.

    Meilleure réception
    Hyacinthe Lebon