Actualités :: Maîtres d’écoles coraniques : Gardiens de la foi ou exploitants d’enfants (...)

Le trafic des enfants, les pires formes de travail des enfants ou encore l’exploitation des enfants ou encore l’exploitation des enfants sont autant de concepts en vogue préoccupant autant les institutions internationales (UNICEF) que des structures étatiques dont l’action sociale et ses démembrements dans les provinces.

Le quotidien des maîtres coraniques et de leurs élèves dans les foyers ardents à Dédougou, la responsabilité des parents, les initiatives de l’action sociale pour éradiquer ce phénomène social, font l’objet d’explications de différents acteurs, à travers ce reportage.

Il est 8 heures 20 mn ce lundi de juillet lorsque nous arrivons chez maître Idrissa Diallo. D’apparence jeune, maître Diallo habite le secteur 2 de Dédougou où il y a loué une cour lui servant d’habitat et de salle de classe pour enseigner ses 18 talibés. La cour de maître Diallo se distingue des autres dans le quartier par la présence très remarquable des "garibous" en son sein.

L’âge de ces enfants varie entre 8 et 17 ans. Ils évoluent tous sous l’ombre protectrice e spirituelle de maître Idrissa Diallo. Dans la semaine maître Diallo et ses élèves ont un programme d’activités quotidien invariable. Tout de bleu vêtu, coiffé d’un bonnet blanc et un chapelet à la main, maître Diallo, assis dans sa natte décrit le déroulement d’une journée de maître coranique : "Tous les jours tôt le matin avant 6 heures nous partons prier à la mosquée.

Après la prière tous les élèves commencent à psalmodier les versets du coran et cela jusqu’à 9 heures. A l’issue de cette séance je les libère pour qu’ils partent mendier en ville. A 11 heures ils doivent tous rentrer pour vaquer à d’autres occupations. Pendant la saison des pluies nous menons des activités champêtres" confie maître Diallo.

Durant l’entretien je lui suggère de faire une photo pour illustrer l’article que je compte tirer de son entretien. Il me répond : "j’accepte répondre à vos questions mais pas de photos s’il vous plaît". De même le maître interdit à ses talibés de se faire photographier.

Maître Lamine Soro, un autre maître coranique communément appelé marabout et vivant au secteur 5 de Dédougou a la même réaction lorsque nous lui parlons de photos. Fils et petits fils de marabout, maître Lamine Soro a hérité de ses parents ce métier d’enseignant coranique. Il bosse dedans depuis plus d’une vingtaine d’années.

L’irresponsabilité de certains parents d’élèves est bien établie

Pour ce marabout de naissance, enseigner le coran, plus qu’un simple devoir, est une mission divine. C’est pourquoi nous a-t-il dit "tant que je suis en vie et en bonne santé je perpétuerai au maximum le message de Dieu aux nouvelles générations".

Son foyer compte 25 talibés dont l’âge est compris entre 12 et 18 ans. Maître Lamine Soro dit être le seul et le principal responsable des enfants dont il a la charge : "lorsqu’un de mes élèves est malade je suis obligé de m’occuper de lui avant que ses parents ne viennent. D’autres parents vous confient la garde de leurs enfants et plus rien d’autre. Ceux qui passent aussi pour voir leurs enfants, très peu sont ceux-là qui laissent quelque chose de substantiel pour eux. Et lorsqu’on nous interdit de ne pas mendier, à ce propos il faut que les gens sachent que la mendicité existe à tous les niveaux même aux plus hauts sommets de nos Etats. L’Etat à travers ses ministres et autres représentants de nos Etats. L’Etat à travers ses ministres et autres représentants, pratique la mendicité pour construire des villas somptueuses, des routes et acheter des véhicules de luxe. Là on n’en parle pas ; mais quand c’est qui mendions on trouve que ce n’est pas normal".

Au cours de notre reportage nous avons rencontré quelques "garibous". Ils nous ont confié que leurs parents leur rendent visitent de temps en temps et qu’ils leur apportent toujours des dons.

Kogowindiga Yacouba a 16 ans. Il est disciple de maître Diallo depuis 3 ans. "J’ai choisi librement de venir au foyer. Je suis là il y a trois ans et j’ai toujours eu la visite de mes parents. Cette année ils sont venus me voir et ils m’ont donné de l’argent et un habit", confie-t-il fièrement.

Bado Souleymane est un parent d’élève coranique. Il a deux de ses enfants qui évoluent dans des foyers ardents. L’un a 15 ans et se trouve au Mali depuis 8 ans et l’autre qui est resté au pays a 5 ans. "Je n’ai pas suffisamment de moyens pour envoyer mes enfants à l’école moderne. Et aussi les frais de scolarité dans ces écoles sont de plus en plus élevés et ne sont plus à la portée de ma bourse".

Quant à ses contacts avec ses enfants il déclare : "je rends visite régulièrement à mes enfants. J’y suis déjà allé deux fois. Toutes les fois que je suis parti aussi je leur apporte du couscous, de l’argent et des habits. Pour moi c’est un plaisir que d’envoyer quelque chose à mes enfants. C’est la preuve qu’eux aussi ont des parents qui les aiment bien".

La mendicité est une plaie sociale

Du côté de l’administration on est très préoccupé par la situation des garibous. Les agents de l’action sociale de Dédougou estiment que les enfants sont victimes d’une exploitation :"certains maîtres coraniques ont accepté prendre beaucoup d’enfants dans leurs foyers et comme ils n’arrivent pas à s’en occuper correctement ils les exploitent dans les champs et les font mendier pour eux", reconnaît M. Achille Hamado Koanda, directeur provincial de l’action sociale du Mouhoun. Pour lui le phénomène de la mendicité est comme une plaie sociale qu’il faut vite soigner.

Pour y parvenir il relate les actions menées pour réprimer la mendicité : "Nous comptons réunir tous les maîtres coraniques de la ville pour les sensibiliser au sujet de ce phénomène. Après ça on pourrait entreprendre la voie de la répression. Je pense que maintenant il faut appliquer la loi".

Le phénomène de la mendicité dans nos villes est réel. Et derrière ce phénomène se cache une forme d’exploitation voulue ou non. Il est aussi établi que les foyers ardents jouent un rôle et pas des moindres dans l’éducation et la formation des enfants. Maintenant la question que l’on se pose c’est comment concilier cette initiation religieuse avec les droits des enfants si chers et bien défendus par les organismes internationaux ?

N’y a-t-il pas là une impérieuse nécessité de trouver une formule médiane pour sauver et les enfants et les maîtres coraniques de ce phénomène de l’exploitation des enfants ?

Ousséini OUEDRAOGO
AIB/Dédougou

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