Actualités :: Procédure judiciaire contre François Compaoré : Le début du bout du tunnel dans (...)

Tout est allé à la surprise générale des Burkinabè et de tous ceux qui ont yeux et intention braqués sur le dossier Norbert Zongo. Alors que l’actualité au Burkina est caractérisée par d’autres feuilletons enlevés bien animés, ce dimanche, 29 octobre 2017, la nouvelle est partie, telle une traînée de poudre. François Compaoré, « petit papa », « petit président » ou encore « FC » le frère cadet de l’ancien président du Faso, Blaise Compaoré, est interpellé à l’aéroport international Roissy-Charles-de-Gaulle.

Surprise, parce que, par une interview accordée à Jeune Afrique en fin septembre 2017, François Compaoré affirmait : « Mes avocats ont investigué sur cette question auprès des autorités de France et de Côte d’Ivoire, deux pays dans lesquels je séjourne régulièrement. Ils n’ont trouvé aucune trace de ce mandat. Je suis donc serein et continue à vivre normalement. Je voyage sans problème. Je suis la plupart du temps à Paris auprès de ma femme et de mes enfants, mais je me rends tous les deux mois à Abidjan. J’y rencontre les plus hautes autorités ivoiriennes quand cela est nécessaire ». Une sortie perçue par certains citoyens comme un mépris vis-à-vis de la justice burkinabè et des institutions internationales de coopération dans ce cadre et, d’autre part comme la « part de vérité et de sérénité » de François Compaoré. Les autorités judiciaires burkinabè, tout en se refusant de commenter les propos, avaient cependant fait des précisions purement techniques.

L’interview de François Compaoré a-t-elle tapé sur les nerfs … ?

« Je vais seulement dire que parlant pûr droit, un mandat d’arrêt n’est pas fait pour être notifié à la personne qu’on cherche parce que souvent, on ne sait pas où se trouve l’intéressé. Quand on émet un mandat d’arrêt, qu’on c’est n’arrive pas à mettre la main sur la personne. Donc, si on savait où se trouvait la personne, on ferait peut-être un mandat d‘amener », s’était borné le ministre de la justice, René Bagoro dans une interview accordée aux Editions Le Pays dans sa parution du 3 octobre 2017. Dans une démarche de ‘’prudence’’, le ministre s’était abstenu de dire clairement de dire si le mandat avait ou non été émis.

Cependant, plusieurs sources dans les arcanes du dossier avaient soutenu que le mandat d’arrêt a bel et bien émis et transmis à Interpol. Seulement, croient-ils, il n’avait pas « encore » été notifié par voie diplomatique aux autorités des deux pays (de résidence) à savoir, la Côte d’Ivoire et la France. L’interview que François Compaoré a accordée a-t-elle tapé sur les nerfs, quelque part ? Visiblement, et si l’on en croit à ceux qui affirment que le mandat d’arrêt a été émis depuis mai 2017.
L’information sur l’interpellation de François Compaoré en cette matinée dominicale a suscité de nombreux réactions et sentiments contreversés. Dans les questionnements d’une possible extradition par la France au Burkina, le ‘’retenu’’ de Roissy Charles De Gaules est mis en « liberté » dès ce lundi en fin de matinée. Cependant, il ne pourra pas quitter le territoire français sans autorisation.

Quelle suite pour le dossier ?

Il s’agit d’une « liberté sous contrôle judiciaire », en attendant le traitement de la demande d’extradition que le Burkina a formulée, apprend-on. C’est dire que la justice burkinabè doit désormais défendre devant la justice française, une demande d’extradition de François Compaoré. Une autre étape cruciale, lorsqu’on sait que l’extradition obéit à des exigences internationales qui, selon certains analystes, ouvrent la voie à tous les arguments ‘’interprétables à souhaits’’ (application de la peine de mort dans le pays requérant, infraction considérée comme politique ou comme un fait connexe à une telle infraction, demande d’extradition inspirée par des considérations d’opinions politiques ou situation de la personne risquant d’être aggravée pour l’une ou l’autre de ces raisons…). C’est dire aussi que l’expression exprimée par les uns et les autres au plan national autour de ce dossier peut être un élément dans la balance dans cette demande d’extradition.

Pour rappel, François Compaoré est cité dans l’affaire du journaliste d’investigation, Norbert Zongo, assassiné le 13 décembre 1998 alors qu’il enquêtait sur la mort de son chauffeur, David Ouédraogo.

En 2006, une ordonnance de non-lieu est rendue par la justice burkinabè. « A partir de ce moment, le dossier est classé. L’affaire est clôturée sauf s’il survient de nouveaux éléments. Et dans ce cas, c’est le procureur seul qui peut rouvrir le dossier », avait indiqué le procureur général d’alors, Abdoulaye Barry. Pour Me Sankara, avocat de la famille, c’est « scandaleux ».

« Des scellés prouvent que l’armée burkinabè était impliquée au plus haut niveau dans cette affaire. Vous ne pensez pas que c’est ridicule de dire qu’on ne peut pas trouver ces assassins ? (…).Aucune piste n’a été explorée (…) La commission d’enquête indépendante avait déjà fait un travail avec des experts. Le juge prétend avoir interrogé de nombreuses personnes. Mais aujourd’hui, le résultat est là. Il est établi que les assassins de Norbert Zongo venaient du cœur de l’Etat, en particulier de la garde présidentielle. Il ne faut donc pas tourner en rond », s’était insurgé l’avocat, Bénéwendé Stanislas Sankara.

Dans une décision rendue le 28 mars 2014, la Cour africaine des droits de l’Homme et des peuples (CADHP) a jugé que l’Etat burkinabé avait « failli à ses obligations », en ne traduisant pas en justice les meurtriers de Norbert Zongo. Début juin 2015 (sous la transition), la Cour a ordonné vendredi à l’Etat burkinabè de reprendre l’enquête sur les meurtres du journaliste Norbert Zongo et des trois personnes qui l’accompagnaient. Dans cet acte, les juges ont ordonné aux autorités burkinabè « de reprendre les investigations en vue de rechercher, poursuivre et juger les auteurs des assassinats de Norbert Zongo et de ses trois compagnons ».

Le 23 décembre 2014, le procureur général est saisi par le gouvernement, via le ministre de la Justice, Joséphine Ouédraogo, pour la réouverture du dossier Norbert Zongo. Une lueur d’espoir pour ceux qui se sont engagés depuis 98 dans la lutte pour la « lumière » sur cette affaire. Avec ce curseur du 29 octobre 2017, de nombreux défenseurs du dossier espèrent le ‘’début de la fin’’ de marathon qui dure bientôt dix-neuf ans.

Oumar L. Ouédraogo
Lefaso.net

Lire aussi : Affaire Norbert Zongo : Ce que dit le rapport de la Commission d’enquête indépendante

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