Actualités :: Contingentement en SDS : "Les contrevérités des autorités"

Le contingentement ou numerus clausus vise à adapter les étudiants aux capacités d’accueil. C’est le point de vue de cet étudiant de l’UFR/SDS qui montre avec des chiffres que le Burkina manque cruellement de médecins.

L’abrogation de l’arrêté portant contingentement des étudiants à l’UFR/Sciences de la Santé (UFR/SDS) n’est pas la seule revendication des étudiants. Des points tout aussi importants que le statut des étudiants dans les Centres Hospitaliers universitaires (CHU), les indemnités de stages, la réouverture du concours d’internat, etc. figurent en bonne place dans leur plate-forme revendicative.

En choisissant de concentrer la campagne d’intoxication sur le contingentement, les autorités veulent faire abstraction des autres revendications. En choisissant d’écrire sur ce point, cela peut apparaître comme tomber dans leur piège. Cependant il me semble intéressant de relever les contrevérités que distillent les autorités à l’endroit de l’opinion sur le contingentement.

Les justificatifs du contingentement

L’argument qui était jusqu’à ces derniers jours, la seule justification du contingentement, est le manque d’infrastructures à savoir CHU, amphithéâtres et laboratoires, etc. C’est en tout cas le seul argument contenu dans l’arrêté n°2004-149/MESSRS/SG/UO/P du 03 août 2004 portant contingentement en 2e année médecine et pharmacie. Mais ces derniers jours, de nouveaux arguments ont été apportés par le Premier ministre lors de son discours sur l’état de la nation et par le Directeur de SDS (invité du journal de 20 heures de la TNB du 16/04/05). Le contingentement serait appliqué partout même par les "grandes démocraties".

Dans les propos du Directeur de l’UFR/SDS, il ressort en plus un manque d’enseignants. C’est d’ailleurs le principal argument utilisé pour essayer de rallier les enseignants au contingentement. Avant de revenir sur ces arguments, jetons un coup d’oeil sur les effectifs de médecins et de pharmaciens au Burkina.

Effectifs des médecins et pharmaciens.

En fin 2001, selon la Direction des Ressources humaines (DRH) du ministère de la santé, il y avait 347 médecins (134 spécialistes, 180 généralistes et 33 chirurgiens dentistes) dispensant effectivement des soins dans les structures publiques. Soit 1 médecin pour 37 699 habitants contre au moins 1 médecin pour 10 000 habitants selon les normes de l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS).

Il y avait au même moment 32 pharmaciens soit 1 pour 369921 habitants. (Confer annuaire statistique 2003 de la Direction des Etudes et de la Planification du ministère de la santé). Ces chiffres cachent en plus une grande disparité car la plupart des médecins et surtout les spécialistes exercent dans les deux CHU c’est-à-dire à Bobo et à Ouagadougou. Des districts de 100 000 habitants pouvant se retrouver avec un seul médecin.

Le contingentement ou numerus clausus en dehors du Burkina

Plusieurs pays développés notamment d’Europe (France, Danemark, Norvège, Portugal, Angleterre) ont pratiqué ou pratiquent le contingentement. Dans tous les cas, la raison a été " une pléthore" de médecins. Lorsque la France l’adoptait en 1971, le numerus clausus devait permettre de freiner un risque "pléthorique" de médecins et de réduire les disparités géographiques et les disparités entre les spécialités. En effet, un quota est attribué à chaque région en fonction de sa population de médecins. En plus, le concours d’internat a été introduit au même moment en fin de second cycle pour contrôler le nombre de médecins formés par spécialité.

La conséquence du numerus clausus est l’apparition d’une pénurie en médecins dans pratiquement tous les pays qui le pratiquent à tel point que le débat fait rage actuellement dans ces pays et que la France augmente constamment son contingent. Pourtant en 2000, il y avait 200 793 médecins en activité en France soit environ 1 médecin pour 335 habitants. Comparer le Burkina à ces pays, si ce n’est pas de l’irresponsabilité, c’est tout au moins du ridicule...

Une pyramide des enseignants à base étroite

Dans les normes universitaires, un enseignant titulaire doit avoir au moins deux enseignants agrégés sous sa responsabilité. Un enseignant agrégé doit avoir au moins deux maîtres-assistants et le maître-assistant au moins deux assistants. Or à ce jour, l’UFR/SDS compte neuf professeurs titulaires, trente-un professeurs agrégés, trente-quatre maîtres-assistants et seulement 11 assistants. Il n’y a donc que des officiers et pas d’hommes de troupe car depuis bien longtemps, nous n’en formons pas (pas de bourse, fermeture du concours d’internat) et ceux qui se forment à leurs propres frais, nous n’ en recrutons pas, faute de moyens financiers, dit-on.

En pédiatrie par exemple (un domaine vaste et fondamental) l’UFR dispose d’un professeur titulaire (bientôt en retraite), quatre agrégés dont un à l’OMS, trois maîtres-assistants dont un qui n’enseigne plus et zéro assistant . Pourtant les services de pédiatrie de nos CHU emploient des anciens internes des hôpitaux prédestinés à une carrière universitaire. Peut-on alors parler de manque d’encadreurs en refusant de recruter ?

Les véritables objectifs du contingentement.

En réalité, le contingentement est une autre forme pour le gouvernement d’adapter les effectifs des étudiants aux capacités d’accueil tel qu’il l’avait imaginé au début de la refondation avec ses concepts d’intra et d’extra-muros. L’UFR/SDS n’est qu’un début parce que c’est un domaine sensible et les autorités pensent pouvoir convaincre facilement l’opinion publique en invoquant la nécessité d’une bonne formation des médecins. Le gouvernement ne peut pas dire qu’il a été surpris par l’augmentation de l’effectif en SDS.

Depuis une dizaine d’années, les étudiants revendiquent la construction d’un CHU digne de ce nom, le recrutement d’enseignants et la construction d’amphis, etc. Conçue au départ pour former uniquement des médecins, l’UFR/SDS forme aujourd’hui des médecins, des pharmaciens et des techniciens supérieurs sans qu’aucun bâtiment n’ait été rajouté.

Les autres UFR connaissent autant que l’UFR/SDS des problèmes d’infrastructures et d’encadrement. C’est d’ailleurs pourquoi les étudiants ayant la moyenne et recalés en médecine dans le cadre du contingentement ne pourront s’inscrire en Sciences de la Vie et de la Terre (SVT) qu’en fonction des places disponibles.

Autant dire jamais car la SVT connaît déjà des problèmes d’effectifs et l’ancien chancelier avait avancé les mêmes arguments pour contingenter la filière Nutrition, il y a deux ans. Seriez-vous d’accord que nous formions de mauvais magistrats déjà que certains de ceux qui sont bien formés ne donnent pas satisfaction ? Après l’UFR/SDS, ce sera le prochain argument pour contingenter l’UFR/Sciences juridiques et politiques ou toute autre UFR.

Déjà, les anciens bacheliers sont refoulés de l’université pour manque de places. Nous organisons des manifestations de prestige (Coupe d’Afrique, sommet France-Afrique, Francophonie, etc) mais nous sommes pauvres quand il faut construire des CHU, amphis ou recruter des enseignants pour assurer la formation de notre jeunesse. Aucune nation ne s’est développée de cette manière. Nous avons donc encore de beaux jours comme avant-dernier du classement du PNUD.

Toalé Sibri Sory
Délégué ANEB/SDS

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