Actualités :: Université de Ouagadougou : " La balle est dans le camp des grévistes" ; Pr (...)

Depuis le 29 mars dernier, les étudiants de l’UFR Sciences de la Santé de l’Université de Ouaga ont déserté les amphis et les laboratoires pour exiger la satisfaction de leur plate-forme revendicative. Sous la houlette de l’ANEB, ils réclament principalement l’annulation du contingentement en 2e année médecine et pharmacie, l’amélioration des conditions de stages et de gardes à l’hôpital etc.

A quel niveau se trouvent les revendications des étudiants ? Le directeur de l’UFR/SDS, le Pr Mamadou Sawadogo dans l’interview qui suit affirme que les réponses ont été trouvées pour la reprise des cours.

Les choses sont bloquées depuis une semaine à 10 jours à l’UFR/SDS. Concrètement qu’est-ce qui a été fait pour trouver des solutions aux problèmes des étudiants ?

Pr Mamadou Sawadogo : Effectivement depuis le 29 mars dernier, il n’y a pas eu d’activités régulières au niveau pédagogique suite à la transmission et aux échanges que nous avons eus avec la délégation des étudiants et la corporation ANEB sur une plate forme que je peux résumer en 3 points essentiels. Le premier point est l’abrogation du décret sur le contingentement, le deuxième est relatif aux gardes, aux stages et aux indemnités liées à ces activités hospitalières. Le 3e point est lié à l’internat.

Par rapport à) cette dernière situation, il faut dire que l’internat a existé au sein de l’UFR entre 1991 et 1994. Depuis, il n’ y a pas eu de concours jusqu’en 2005. Quand notre équipe a voulu prendre la direction de l’UFR, notre 1er objectif était de le remettre en place et de l’améliorer pour éviter les insuffisances qui ont conduit à sa suppression en 1994.

Après notre prise de service , nous avons été écoutés par notre ministre de tutelle, le ministre des Enseignements secondaire, supérieur et de la recherche scientifique et le ministre de la Santé. C’est ainsi que le ministre de la Santé a instruit la direction générale de la Santé publique et la direction générale des hôpitaux de remettre en place une commission pour que la question de l’ internat trouve une solution.

C’est en fait la voie pour avoir des spécialistes par la suite, pour un encadrement efficace des meilleurs étudiants et enfin pour améliorer les prestations de service au niveau du centre hospitalier universitaire
( CHU). C’est donc d’abord un problème du ministère de la Santé, des enseignements et de l’administration de l’UFR. Les étudiants se sont en fait que des bénéficiaires. Nous ne comprenons pas pourquoi l’internat constitue aujourd’hui un facteur de blocus puisque depuis 11 ans il n’existait pas. Je voudrais ajouter que la question a été prise en compte depuis 1 an dans le budget du ministère de la Santé (2004).

Pour nous, ce point ne devait pas faire partie de leurs revendications. Maintenant, on n’ouvre pas un concours d’internat de cette façon. Un interne , c’est un salarié. Il faut prévoir les budgets et les textes d’accompagnement. C’est ce travail qui se fait présentement. C’est sûr et certain que d’ici décembre 2005, le concours aura lieu comme un peu partout dans les facultés de médecine. De cette façon, la prise de service des internes se fait en début d’année budgétaire, c’est-à-dire en janvier.
Par rapport aux indemnités, les étudiants demandent pour les stages obligatoires (en 7e année) une augmentation de 50 000 F CFA à 75 000 F CFA.

Le ministre de l’Enseignement supérieur leur a dit qu’il a transmis le dossier au niveau de la Santé. Comme vous le savez quand on revendique une augmentation budgétaire, elle n’arrive pas tant qu’il n’ y a une discussion au ministère des finances. Ils demandent aussi un système régressif pour la rémunération des stages à l’hôpital. A partir de la 3e année en plus de leurs bourses ( s’ils l’ont ) ils ont 20 000 F CFA par mois. Ils voudraient que ce chiffre soit croissant :20 000 F CFA, 35 000 F CFA, 45 000 F CFA etc.

Le Burkina est l’un des rares pays où l’on paye les étudiants pendant les stages. Là aussi, nous avons dit que cela doit s’inscrire dans les textes globaux des CHU, puisqu’il y a les indemnités des étudiants et aussi des enseignants. Dès que ces textes seront signés (ils sont présentement en discussion) on trouvera des solutions pour les personnels impliqués. Là aussi, ce n’est pas un problème puisque c’est un processus qui est en cours. Ils demandent aussi double paiement c’est-à-dire les 20 000 F CFA au niveau du ministère de la Santé et les 55 000 F CFA (prévus dans les textes) au niveau du ministère de l’Enseignement supérieur, le ministre leur a expliqué que la vérification sera faite.

Et les étudiants y ont droit, on supprimerait soit les indemnités de la Santé pour leur payer celle de l’enseignant ou bien , ce que le ministère de la Santé donne sera complété par les Enseignement secondaire et supérieur pour avoir un total de 55 mille F CFA.

Venons en au stage rural. Les étudiants disent que vous avez l’ intention de le supprimer....

Je crois que justement cette désinformation est dangereuse au niveau des étudiants. Notre équipe de direction a pris service en octobre 2003. Nous avons vu que le stage rural ou communautaire n’était pas budgétisé au niveau de l’ UFR. C’est seulement une contribution bisannuelle de l’OMS parce que cela correspondait à une activité spécifique. Nous avons pensé alors qu’il fallait une inscription budgétaire par rapport à ce stage. Et c’est nous qui l’ avons fait en 2004. Le budget 2004 s’ est fait en juillet 2003 et a été finalisé en octobre 2003.

Après, nous avons rencontré les étudiants pour les informer de notre démarche tout en précisant qu’on attendait la délibération du Conseil d’administration de l’ université. Cela a été pris en compte. Et nous les en avons tenu informés. Actuellement, les étudiants en 6e année sont en stage en milieu rural. Nous n’avons pas compris pourquoi ce point se retrouve à nouveau dans leurs revendications. Je pense donc qu’il y a deux points de leur plate-forme qui sont introduits juste pour avoir des acquis (le stage en milieu rural et le concours de l’internat).

Il y a une autre revendication concernant les horaires des gardes à l’ hôpital. Les jours fériés, ils les prennent de 7 du matin à 7h le lendemain. Cela est prescrit dans les textes. Pour les jours de cours, la garde est assurée de 20h à 7h du matin. Les étudiants ont dit qu’ il veulent la garde quel que soit le jour, de 20h à 7 h du matin. Bien que ce soit anti-pédagogique (parce que c’est essentiellement entre 7h et 20h que les étudiants peuvent apprendre) nous avons accepté. Des étudiants en médecine demandent à ne pas suivre des stages, cela pose un problème.

Concernant le contingentement, est-ce que vraiment une mesure salutaire pour un pays comme le Burkina ?

Justement c’est surtout parce que c’est un pays comme le nôtre que cette décision est salutaire. Un pays qui n’a rien du point de vue matériel mais qui a beaucoup de maladies les plus rares et les plus compliquées. Les enfants et les femmes on en perd beaucoup. Pourquoi ? Parce que nous n’ avons pas de moyens en termes de soins. C’est normal qu’un gouvernement responsable regarde la qualité plutôt que la quantité. Le contingentement a essentiellement pour objectif, la qualité.

Actuellement, il y a des services où les enseignants au niveau de l’hôpital sont obligés de renvoyer un certain nombre d’étudiants. Si dans une salle, vous avez 4 malades 150 étudiants et 2 enseignants soit ils rentrent tous et étouffent les malades, ou bien ils ne rentrent pas et ne verront pas la visite.

Pr Mamadou Sawadogo, est ce que vous ne voulez pas plutôt adapter les capacités d’accueil aux étudiants, puisqu’il n’y a pas assez de CHU ?

Même si on construisait 20 mille CHU ! Je vous donne un exemple : actuellement, cela fait 5 ans que nous cherchons quelqu’un pour former en anatomie. Chaque fois qu’on envoie la personne en Europe, elle ne revient pas. Nous avons beaucoup de domaines où nous avons des difficultés pour former des spécialistes. Je prends le cas de l’hysto-embryologie qui est un cours essentiel pour la formation des médecins et qui est dispensé en 1re et 2e année.

Actuellement, nous avons au moins 3 promotions qui n’ont pas le cours parce qu’on n’a pas de formateurs. Ce n’est pas une question d’ infrastructures seulement c’est un ensemble. On a dit qu’il y beaucoup d’étudiants et on a construit des bâtiments à l’université. Pensez-vous que le problème a été résolu ?

A cause des problèmes d’infrastructures, nos étudiants perdent au moins 10 heures de cours par semaine par rapport à ceux de 1999. Si en plus de cela, on n’a pas un encadrement conséquent à l’hôpital, qu’est-ce que nous allons "fabriquer" comme médecins ? Même s’il y avait 3 hôpitaux et qu’il manque des spécialistes, cela reviendrait à la même situation.

Prenons des pays comme la France ou la Belgique. Pensez-vous qu’ils ont des problèmes d’infrastructures ? Mais le contingentement est appliqué parce qu’il y a une qualité de la formation qui est recherchée obligatoirement. C’est très simpliste de poser le problème en conditions matérielles en termes d’infrastructures et en besoins du pays en médecins. C’est vous qui nous avez reconnu comme étant ceux qui sont les plus indiqués pour former vos médecins. Et nous disons que tel ou telle chose n’est pas bonne pour leur formation. Et maintenant on nous rétorque qu’on connaît mieux que nous ? Dans ce cas, pourquoi on nous confie cette responsabilité ? Qu’on veuille nous écouter un peu !
Je souhaiterais que vous alliez dans des services comme la gynécologie, la médecine interne, la pédiatrie. Vous verrez dans quelles conditions les étudiants sont encadrés et demander l’ avis des responsables de ces structures de l’hôpital.

A partir de quelle année universitaire le contingentement entre en vigueur ?

Il devrait être appliqué en 2002. C’est l’arrêté 062 du 06 mars 2003 qui fixait les conditions mais compte tenu du fait que les gens n’étaient pas informés il a été décidé de le mettre en vigueur à partir de l’année universitaire 2003-2004. C’est ainsi qu’une commission d’enseignants a élaboré les modalités, c’est-à-dire les mesures d’accompagnement. Toute l’année 2003 l’opinion publique a été largement informé. Et le contingentement est passé au conseil scientifique et au conseil de gestion de notre UFR. Les textes ont été ensuite envoyés au conseil scientifique de l’université.

A ce niveau, ils ont été validés. C’est seulement après ce processus que les textes ont envoyés au ministre des Enseignements secondaire et supérieur et au ministre de la Santé pour signature. Le 27 octobre 2003, nous avons rencontré tous les étudiants inscrits en 1re année pour les informer sur le contingentement. L’ arrêté a été pris en août 2004. Nous l’avons multiplié, transmis au service des inscriptions et affiché dans toutes les UFR et à la présidence de l’université. En plus de cela, le 25 octobre 2004, nous avons adopté la même démarche à l’endroit des étudiants inscrit en 1re année de médecine et de pharmacie.

Dans tous les pays ce n’est pas au début de l’année, mais à la fin du 1er trimestre ( quand on fait l’évaluation des redoublants et de ceux qui ont soutenu au niveau des structures de santé) qu’on fixe le nombre de places disponibles pour garantir la qualité de la formation. Cela a été respecté. Nous avons informé les étudiants qu’en février 2005, ils seront fixés. Dans les mesures d’accompagnement il est prévu que ceux qui ont eu plus de 10 de moyenne, puissent avoir le droit de s’inscrire directement en 2e année SVT ( Sciences de la vie et de la terre). S’ils choisissent de revenir pour passer le concours parce qu’ ils ont la vocation d’être médecins, il n’y a pas de problème. En plus il faut préciser que la 1er année compte 683 étudiants. Le ministre Laya Sawadogo nous instruit d’augmenter le nombre du contingent à 115 pour la médecine et 55 pour la pharmacie. Et cela est un effort qu’il a demandé aux encadreurs.

A l’heure actuelle, peut-on dire que vous attendez des étudiants qu’ils reprennent les cours parce que vous avez trouvé des solutions à leurs problèmes ?

Le ministre des Enseignements secondaire et supérieur a réuni le lundi 25 avril dernier, les étudiants en présence de ses collaborateurs. Je n’ai jamais assisté à une présentation aussi convaincante. Il a donné toutes les réponses par rapport à leurs revendications. Il leur a expliqué le bien-fondé du contingentement. Il faut ajouter que les étudiants de 6e année sont en stage. Ceux de 5e année de médecine sont d’accord pour la reprise des cours. Les étudiants de 6e et 5e années de pharmacie sont aussi prêts.

Mais il y a des méthodes tellement violentes qui empêchent l’expression démocratique. C’est pourquoi, nous demandons aux responsables de l’ANEB d’avoir cette analyse critique, le sens de la responsabilité et celui de la démocratie pour permettre à ce que les activités reprennent au niveau de l’UFR Sciences de la Santé. Je pense que s’ils luttent, c’est pour avoir des acquis. Les étudiants savent jusqu’où c’est possible. La balle est donc dans leur camp.

Propos recueillis par D. Parfait SILGA
Le Pays

Burkina/Affaire “escroquerie de commerçants” : Roch (...)
Burkina/Arrestation de Me Guy Hervé Kam : Le délibéré de (...)
Burkina Faso : Acquisition de 75 véhicules militaires (...)
Burkina : La 53e promotion de l’École nationale de police (...)
Burkina : La douane rend hommage à une soixantaine de (...)
Burkina : Le Programme de développement d’urgence a (...)
Mise en œuvre du projet "Développement circulaire de bio (...)
Burkina/Police nationale : La question du management (...)
Burkina/Région du Centre-sud : L’UNFPA veut réduire le (...)
Lycée mixte de Gounghin : Les promotions 1998 à 2007 (...)
Burkina : Le syndicat des inspecteurs de l’enseignement (...)
Burkina : « Il serait bon que tous ceux qui sont (...)
Koudougou / Conduite de taxi-moto : Plusieurs jeunes en (...)
Burkina/Enseignement : Le gouvernement s’active pour (...)
Burkina / Santé communautaire : La stratégie nationale (...)
Burkina/ Gestion des risques agricoles : L’AP/SFD-BF (...)
Ouagadougou : La Coordination Nationale de Lutte contre (...)
Burkina : Le tableau de bord du commerce et des marchés (...)
Ouagadougou : Des voleurs appréhendés au quartier (...)
Burkina : 1 295 structures éducatives ont rouvert à la (...)
Ouagadougou : Poko libérée d’une grosse tumeur du nez (...)

Pages : 0 | 21 | 42 | 63 | 84 | 105 | 126 | 147 | 168 | ... | 36435



LeFaso.net
LeFaso.net © 2003-2023 LeFaso.net ne saurait être tenu responsable des contenus "articles" provenant des sites externes partenaires.
Droits de reproduction et de diffusion réservés