Dans toutes les places, les commissariats de police, les brigades de gendarmerie, aux frontières, la photo de Jean trônait partout. Recherché pour vol et meurtre, il s’était évanoui dans la nature alors que ses complices s’étaient faits pincer.
Après deux années et demi, Jean revenait au bercail et se faisait abattre dans sa tentative de fuite. Il avait été donné par son rival.
Bien que sans emploi, Jean vivait au grand jour. Il avait les feuilles à profusion. Cerveau d’une bande de coupeurs de route, il était aussi bagarreur et ses prises de bec se terminaient par l’exhibition et l’utilisation d’armes blanches.
Claude, lui était mécanicien et s’était lié d’amitié avec une serveuse de bar du nom de Rocky, une fille bien balancée que lui souffla Jean. Avec sa forte corpulence, Jean faisait peur aux femmes qui ne lui refusaient rien. Henry Troyat n’avait-il pas raison d’écrire que "les femmes n’ont de respect que pour les hommes qu’elles redoutent" ?
Lors d’une de leurs opérations, la bande à Jean tomba dans un piège et Jean put s’enfuir. Rocky était devenue donc libre à nouveau, mais Claude ne pouvait pas avoir ses faveurs tout le temps car un douanier avait pris le relais. Ce douanier était en mission quand survint le drame.
En effet, un vendredi, Jean était de retour et se rendit chez un de ses amis. Ce dernier fut mandaté pour aller trouver Rocky et prendre la clé de la chambre. Panique quand la commission fut faite, car il y avait problème. En effet, pour se donner à Claude cette nuit-là, Rocky avait exigé et encaissé son dû. Voilà que Jean était là. Elle prit peur et remit la clé.
Vers 21 heures, Rocky commença à se plaindre de maux de tête et de ventre. Le caissier l’autorisa à rentrer à la maison et retrouva Jean qui l’envoya acheter de la boisson et des gallinacés. Nos tourtereaux roucoulèrent. Vers 23 heures, Claude se présenta au bar où l’on lui fit comprendre qu’elle se sentait malade et était rentrée.
Claude s’y rendit, tambourina à la porte qui demeura close. Il apprit ce jour là à ses dépends que Diderot a écrit de ne jamais payer d’avance si on ne veut pas être mal servi.
Dépité, Claude se retrouva dans un débit de boisson où il expliqua sa déconvenue à son ami Urbain, mécanicien comme lui. Le samedi matin, alors qu’il était au restaurant, Urbain vit Rocky venu acheter une bonne quantité de riz et de la volaille à satiété comme si c’était pour une nombreuse famille.
En allant à son atelier, il croisa Claude et lui raconta les faits. Claude bifurqua pour aller voir Rocky qui le reçut à la porte. Mais, à travers la fente laissée par le rideau, il vit et reconnut le manteau fétiche que Jean portait toujours. Son cœur battit la chamade. Ainsi, Jean était de retour. Il prit sa décision. Ne dit-on pas que la force de la police est dans la dénonciation et la délation ?
Claude se rendit à la police. La brigade de recherche fit diligence et sut par les voisines de Rocky qu’elle hébergeait un étranger qui ne sortait jamais. Le dimanche, après le départ des serveuses à leurs lieux de service, des éléments se portèrent sur les lieux et frappèrent à la porte demandant à Jean de sortir les bras en l’air.
Ce dernier qui ne dormait pas se sentit perdu. Les maisons dans cette cour avaient des portes et des fenêtres faites de tôles uniquement. Jean défonça la fenêtre, tomba sur le sol, entendit halte et se mit à courir. Une rafale et arme automatique mit fin à sa course. Le constat fut vite fait et le corps enlevé.
Ainsi, Jean était mort, donné par son rival. Mais ne dit-on pas que les fauves reviennent mourir au lieu qui les vit naître ?...
Rakissé
Sidwaya
