Actualités :: SIDA : L’initiative Three by five, une solution pour l’accès aux (...)

Le ministre Alain Bedouma Yoda lançait en 2003 le processus d’introduction des antirétroviraux dans les structures sanitaires et l’initiative three by five. Une initiative qui nourrit l’ambition de permettre à 30 000 personnes vivant avec le VIH-Sida de bénéficier d’antirétroviraux d’ici la fin de 2005.

Mme Léontine Tougouma, infirmière en service de dermatologie de l’hôpital Yalgado Ouédraogo est sous antirétroviraux (ARV) depuis 2001. Chaque jour et à des heures précises, elle prend ses trois comprimés. La physionomie de cette femme "en pleine forme" à vue d’œil ne laisse aucun soupçon sur son statut sérologique. Pourtant, elle présentait des signes manifestes de fatigue en 2 000, frappée par une pneumopathie et un zona. Mme Tougouma a découvert son statut sérologique en 2000, après le décès de son mari infecté du VIH. "Mon conjoint a été hospitalisé, je l’ai assisté.

A chaque visite, les médecins me mettaient dehors bien que je suis infirmière. Cela m’a amenée à réfléchir. J’ai décidé de faire mon test sérologique. Mais j’ai été frappée par une pneumopathie et un zona. C’est devant mon tableau de zona que mon médecin traitant m’a demandé mon avis par rapport au test VIH. Un test qui s’est révélé positif, cela une année après la mort de mon mari" confie Mme Tougouma.

Elle a reçu ses premiers traitements en ARV grâce à Mme Léocadie Ouadéba, présidente de l’Association Burkin’Action Toulouse (France). Actuellement, elle est suivie par le Centre de traitement ambulatoire (CTA) de Ouagadougou où elle contribue à hauteur de 5 000 F CFA par mois. Elle reconnaît avoir soufferte des effets secondaires de la trithérapie au tout début, allant jusqu’à demander l’arrêt de la prise des médicaments. "Les gens m’ont encouragée à persévérer. C’est ce que j’ai fait. Aujourd’hui, mon état de santé s’est beaucoup amélioré. J’exerce comme n’importe quel travailleur, peut-être plus" souligne-t-elle, tout sourire aux lèvres. En effet, Mme Tougouma est obligée de mettre les bouchées doubles pour remplir son contrat avec la Fonction publique et superviser les activités de son association dénommée Association Burkin’Action BF, une structure de lutte contre le Sida.

Mme Pyanne Djiré/Nyamé est aussi sous ARV. C’est après son accouchement qu’elle a eu besoin de la trithérapie. Comme sa consœur Léontine, Pyanne prend quotidiennement trois comprimés à des heures régulières. "Au départ, la prise des antirétroviraux était très contraignante. Les effets secondaires étaient manifestes. Mais au fur et à mesure on s’y habitue,". soutient-elle. Mme Pyanne Djiré/Nyamé indique que les effets secondaires se manifestent différemment selon les individus. A son niveau, c’est surtout des bouffées de chaleur et des dermatoses et d’avouer que "les ARV m’ont fait plus de bien que de mal".

L’Organisation mondiale de la santé (OMS) a lancé une initiative en vue d’aider trois millions de personnes à travers le monde à bénéficier des ARV comme Mme Tougouma et Mme Nyamé.

L’OMS et l’initiative Three by five

Selon le représentant résident de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) au Burkina, le Dr Mohamed Hacen, c’est le 1er décembre 2003 que son institution, en collaboration avec l’ONUSIDA et d’autres partenaires ont lancé l’initiative "Three by five" . C’est un acronyme anglais qui veut dire : trois millions de personnes sous traitement par les antirétroviraux en fin 2005. "Il s’agit d’un grand défi. On a pendant longtemps lutté pour la prévention pour éviter que les gens ne tombent malades et cela reste une priorité. Mais avec l’accumulation massive de nombre de personnes infectées du Sida, le fait de les soigner est devenu aussi une priorité," a indiqué Dr Hacen.

On estime en ce moment que 6 millions de personnes ont besoin de soins par les ARV dans le monde. L’objectif de l’initiative "three by five" est de mettre la moitié de ces malades (trois millions dont 2 en Afrique) sous traitement par les ARV d’ici la fin de l’année 2005. "L’initiative vise ainsi à mobiliser massivement l’ensemble des partenaires, des bailleurs de fonds et des Etats afin que les ressources soient disponibles pour favoriser l’accès des soins," a insisté le représentant résident de l’OMS au Burkina.

L’impact du Three by five au Burkina

Si on suit la logique du Three by five et conformément aux statistiques, le nombre de personnes vivant avec le VIH (PVVIH) qui pourrait bénéficier de soins en ARV d’ici fin 2005 au Burkina Faso est d’environ 30 000.

D’ores et déjà, on note des avancées significatives depuis le lancement officiellement en octobre 2003 du processus d’introduction des ARV dans les structures de santé et en décembre de la même année de l’initiative Three by five par le ministre de la Santé Alain Bédouma Yoda. "Le bilan a été fait le 21 décembre 2004 par la IVe session du Conseil national de lutte contre le Sida et les infections sexuellement transmissibles (CNLS-IST) présidée par le chef de l’Etat Blaise Compaoré. Il est ressorti qu’au moment du lancement de l’initiative, il y avait environ 1000 patients sous traitement ARV au Burkina Faso ; maintenant, nous sommes à 3000 personnes. Nous avons ainsi triplé le nombre de patients. C’est un progrès significatif," note le représentant résident de l’OMS.

Il s’empresse d’indiquer que cependant, on est encore très loin du but "un certain nombre d’obstacles a été levé et on estime qu’il y aura une réelle accélération au cours de l’an 2005," souligne Dr Hacen.

Le Dr Françoise Bigirimana, chargée de la lutte contre le Sida à la représentation de l’OMS au Burkina de renchérir que depuis l’engagement du Burkina Faso dans cette initiative, beaucoup d’activités ont été menées. Il y a eu un travail normatif que l’ONU a soutenu : élaboration des documents de base, de politique de normes, de guide, bref d’outils pour suivre les malades sous traitement. "Toute une organisation est mise en place pour que les associations de lutte contre le Sida puissent collaborer avec les structures gouvernementales et les structures de soins," a laissé entendre Dr Bigirimana.

Pour le coordonnateur du Comité ministériel de lutte contre le Sida de la santé, Dr Didier Bakouan, l’adhésion du Burkina à l’initiative Three by five a conduit à accélérer le processus de formation du personnel en 2004, à équiper les différentes structures de santé et à faciliter la participation des associations et ONG pour un "front commun qui permette effectivement à ceux qui entrent dans le système de pouvoir avoir accès à une zone de traitement".

Ainsi, poursuit-il, on peut dire qu’aujourd’hui, si on tient compte des secteurs public et du privé, on a au moins une trentaine de structures sanitaires qui offrent un service de prise en charge médicale des PVVIH, y compris par les ARV. Mais le Burkina pourra-t-il atteindre les 30 000 patients d’ici la fin de 2005 étant donné qu’on n’est pour le moment qu’à un dixième de l’objectif ? Dr Françoise Bigirimana pense qu’au cours de 2005, il est fort possible d’atteindre le nombre de 7000 patients, ce qui fera un cumul de 10 000 patients sous ARV.

Toutefois elle se presse d’ajouter qu’il est important de fixer des objectifs en terme quantitatif. Mais ce qui est le plus important, c’est avant tout la volonté de réunir les conditions nécessaires à l’accès des soins. "Entre le lancement de l’initiative et maintenant, nous avons triplé le nombre de patients sous ARV. En continuant avec ce rythme, on peut réunir les conditions nécessaires pour que tout malade au Burkina Faso puisse avoir accès au traitement, y compris les ARV," indique Mme Bigirimana.

Des difficultés quand même

De l’avis du Dr Hacen, les difficultés rencontrées dans la mise en œuvre du processus three by five sont "celles de nos Etats-membres, donc du Burkina où nous travaillons avec le ministère de la Santé, le secrétariat permanent du Conseil national de lutte contre le Sida et les infections sexuellement transmissibles (SP-CNLS-IST) et nos partenaires". Cela demande du temps pour former le personnel, commander de nouvelles études, revoir l’organisation, informer et conseiller les patients. Bref, cela demande du temps pour arriver à un consensus.

La gratuité des ARV

Depuis un certain temps, des associations de lutte contre le Sida au Burkina demandent aux autorités politiques la gratuité des ARV.

Le représentant résident de l’OMS au Burkina donne son accord pour l’universalité de l’accès aux soins. "Tout le monde doit avoir accès aux soins," situe-t-il. Et de se poser la question de savoir si ces soins doivent être gratuits pour tout le monde ? De son avis cela dépend de la situation de chaque pays. "Je crois que nous pouvons nous mettre d’accord sur le fait que toute personne qui a besoin de soins puisse l’avoir d’une manière ou d’une autre," suggère-t-il. Le Dr Didier Bakouan est tout à fait d’accord pour l’universalité à l’accès aux soins. Le Burkina adhère "au principe de l’accès universel au traitement, sur la base de l’équité et de la solidarité nationale," souligne M. Bakouan.

Il trouve que là où il y a discorde ou incompréhension c’est au niveau de l’accès gratuit aux ARV. "La gratuité des ARV au Burkina est un souhait noble, mais elle n’est pas réaliste pour le moment," soutient-il. Il justifie son assertion par le fait que "nous avons un système de sécurité sociale qui n’est pas encore suffisamment bien montée pour assurer la prise en charge complète du traitement par les ARV".

Du reste, actuellement beaucoup de patients bénéficient des ARV moyennant 5000 FCFA. Ces sommes, note M. Bakouan, pourront servir à pallier un "coup dur" en attendant une éventuelle aide extérieure. Par ailleurs, il faut accepter que des personnes démunies bénéficient d’une prise en charge gratuite. En tout état de cause, le Dr Bakouan attire l’attention des uns et des autres que tous les PVVIH n’ont pas automatiquement besoin d’ARV.

Pour ceux qui en ont besoin, il les exhorte à les prendre sur une décision d’un médecin, de faire au moins 2 fois par an, de façon régulière un bilan de santé et de bien s’alimenter. "Il est démontré qu’une bonne alimentation aide l’action des ARV. Elle peut faire qu’on ait même pas besoin de ces médicaments," insiste le coordonnateur du Comité ministériel de lutte contre le Sida de la santé.

Charles OUEDRAOGO
Sidwaya

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