« Chaque laiterie qui pouvait transformer plus de 100 litres de lait par jour, se débrouille aujourd’hui pour ne pas fermer. Puisque le bétail des producteurs est récupéré de force par les groupes armés en brousse ». Voici en quelques mots, dépeinte la réalité des laiteries dans le Sahel par Adjatou Koïta, ressortissante de la ville de Dori et participante aux 72 heures du lait local. C’était à l’issue du lancement de la 8e édition, ce mardi 25 octobre 2022 à Ouagadougou.
Face à l’insécurité qui sévit dans le Sahel, Adjatou Koïta confie que le chiffre d’affaire des laiteries a beaucoup baissé. « Le marché a chuté puisqu’il n’y a plus de véhicules ni de missions en destination de Dori. Il y a les ONG comme le Programme alimentaire mondial (PAM) qui achetait du yaourt au profit de certaines écoles. Ce n’est malheureusement plus le cas aujourd’hui », a-t-elle révélé.
Adjatou Koïta affirme qu’au regard du bouleversement de leurs activités, leurs regards restent fixés sur le Seigneur, afin que cesse au plus vite, cette guerre au Burkina Faso.
- Le stand d’Adjatou Koïta est le dernier à être visité par Adama Ibrahim Diallo, président de l’UMPL/B (en lunettes) accompagnés du SG du ministère en charge des ressources animales
C’est donc, dans les perspectives de trouver des remèdes à cette situation que se tiennent les 72h du lait local organisées par l’Union nationale des mini laiteries et des producteurs de lait local au Burkina (UMPL/B). Le thème retenu est : « Les mini laiteries face à la crise sécuritaire au Burkina Faso : quelles stratégies pour pérenniser les acquis de développement ? ».
Ainsi, pour relever les défis qui s’imposent au secteur, en cette période de crise, des recommandations sont faites. « Créer un fonds de développement du lait local pour financer les laiteries. Ce, à travers la taxe de l’ensemble du lait importé au Burkina Faso ».
- Moussa Koné, président de la chambre nationale d’agriculture et parrain de la 8e édition des 72h du lait local
C’est entre autres, ce que propose Moussa Koné, président de la chambre nationale d’agriculture. Pour lui, à l’instar du Rwanda, le Burkina Faso doit être à mesure de produire aujourd’hui, la poudre de lait.
M. Koné invite pour ce faire, l’ensemble des acteurs de la filière à fédérer leurs efforts. « Travaillons main dans la main. Car ce n’est qu’ensemble, que nous parviendrons à véritablement développer nos activités », a-t-il soutenu.
Conscient de la forte contribution de la filière lait à la sécurité alimentaire, mais aussi, au développement économique, le ministère en charge des ressources animales dit mettre en œuvre plusieurs actions.
- « Au regard de la réduction des espaces cultivables, il faudra aller vers la culture fourragère », Wendné Victor Bonogo, SG du ministère de l’Agriculture et des ressources animales
« Les appuis à la filière portent sur la tenue des campagnes de vaccination, la mise à disposition des aliments de bétail, la construction de parcs de vaccination et de marchés de bétail », souligne Wendné Victor Bonogo, secrétaire général du ministère de l’Agriculture, des ressources animales et halieutiques.
Une trentaine de réfrigérateurs, de glacières et quelques broyeurs ont été offerts à des unités de laiterie. Cela, en vue d’une meilleure conservation des produits laitiers.
« Nous voulons aussi mettre l’accent sur la conservation des produits, afin que les clients à qui nous demandons de consommer le lait local soient rassurés quant à sa qualité », a indiqué Adama Ibrahim Diallo, président de l’UMPL/B.
- Remise symbolique d’une trentaine de réfrigérateurs, de glacière et quelques broyeurs aux bénéficiaires
À en croire M. Diallo, une centaine de jeunes ont été formés dans les chaînes de métiers de valeur de sorte à prendre en compte la question de la relève dans la filière du lait au Burkina Faso.
Une visite des stands, suivie d’une dégustation de produits laitiers ont également ponctué la cérémonie officielle de ces 72h. Organisé chaque année, cet évènement se veut un cadre de consolidation des acquis et de construction de plaidoyers pour des politiques favorables à la filière lait dans le pays.
- La dégustation du lait local
Animées par une foire et des ateliers, ces journées représentent aussi un espace de prise de résolution et de recommandation. Cela, pour une exploitation équitable et optimale de la filière lait local.
L’UMPL/B est une organisation de 94 laiteries situées dans toutes les régions du Burkina Faso, approvisionnés par plus de 2000 éleveurs. Elle a pour but de promouvoir et de valoriser le lait local. Sa vision est de parvenir à un Burkina plus juste, où le lait local, couvrant les besoins nationaux, fait partie des habitudes alimentaires des populations. Ce qui permettrait aux producteurs laitiers de vivre décemment de leur activité et du même coup, renforcer le pouvoir économique des femmes, principales actrices de la filière.
Lefaso.net
Hamed NANEMA
