Actualités :: Révolution sankariste : Les tribunaux populaires n’avaient pas pour vocation (...)

Les Tribunaux populaires de la révolution (TPR) n’avaient pas pour vocation d’humilier, encore moins de tuer ; ils jouaient plutôt un rôle d’éducation. C’est ce qu’a déclaré Train Raymond Poda, ancien ministre de la Justice sous le Conseil national de la révolution (CNR). C’était au cours d’un panel organisé par le Comité international mémorial Thomas-Sankara (CIM/TS), le jeudi 9 septembre 2022 à Ouagadougou. Le thème retenu était « Tribunaux populaires de la révolution : leçons apprises et limites ».

L’ancien ministre de la Justice à l’époque de la Révolution a mentionné, dans son intervention, que les Tribunaux populaires de la révolution (TPR) constituaient « une véritable école d’éducation politique ». En ce sens qu’ils refusaient toute forme de domination d’où qu’elle vienne, avec pour leitmotiv, le respect du peuple et de ses biens.

« Les TPR montraient ainsi, avec vigueur et détermination, la bonne voie à suivre tout en mettant en garde tout contrevenant », souligne-t-il. Poursuivant dans sa communication, Train Raymond Poda a rappelé les propos de Thomas Sankara à la cérémonie d’ouverture des premières sessions des TPR.

Le Comité international mémorial Thomas Sankara ambitionne tenir ce cadre de partage d’expériences de la révolution, tous les mois

Il cite : « Nous jugeons un homme pour rétablir des millions d’hommes dans leurs droits. Nous sommes par conséquent des fervents défenseurs des droits de l’Homme et non des droits d’un homme. À la morale immorale de la minorité exploiteuse et corrompue, nous opposons la morale révolutionnaire de tout un peuple pour la justice sociale ».

À l’entendre, les procès organisés par les TPR avaient pour objectifs, selon la vision du président Thomas Sankara, « de mettre à nu toute une conception de la vie publique axée sur l’accumulation des biens au détriment des masses ». Mais aussi de supprimer l’enrichissement illicite sur le dos du peuple.

Pour l’ancien ministre de la Justice, Thomas Sankara recommandait que tout fonctionnaire, tout responsable, s’identifie au peuple. À en croire Train Raymond Poda, le père de la Révolution prônait « une démocratie de la misère ». « Que la misère ne soit pas pour les uns et la joie pour les autres. Mais pour tout le monde sans exception aucune », a-t-il relaté.

Les TPR étaient donc la réponse aux problèmes de la gouvernance économique, financière et sociale. Seule la justice révolutionnaire du peuple insurgé pouvait le faire. Une démocratie pour le peuple et contre les exploiteurs et les oppresseurs, tel est le fondement de l’activité des TPR, a-t-il souligné.

Selon Train Raymond Poda, si Blaise Compaoré ne l’avait pas affecté à Kaya, il serait aujourd’hui compté parmi les victimes de la fusillade du Conseil de l’Entente le 15 octobre 1987

Compétences et composition des TPR

À ce niveau, Raymond Poda indique que les prérogatives des TPR étaient régies par l’article 2 de l’ordonnance n°84-02/CNR/PRES du 27 janvier 1984 qui disposait que le TPR a compétence pour connaître des crimes et délits politiques, des crimes et délits contre la sûreté intérieure et extérieure de l’État, les cas de détournement de deniers publics, les cas d’enrichissement illicite.

Concernant la composition des TPR, l’ancien ministre de la Justice confie qu’elle avait été modifiée par l’ordonnance n°84-02/CNR/PRES portant création des TPR du 5 janvier 1984, passant ainsi de seize membres (au départ) à onze, pour des raisons de lourdeur constatée lors des premières sessions. Ces onze membres étaient constitués d’un magistrat professionnel, d’un militaire ou gendarme et de cinq membres des CDR (Comités de défense de la révolution), soit sept juges titulaires et quatre membres suppléants.

« Les TPR siégeaient sans l’assistance d’avocat pour le prévenu. Ce qui a engendré toute une polémique autour de cette décision. Mais s’il y avait des avocats, le procès allait traîner en longueur à cause de leurs plaidoiries, de la réponse du parquet, du ministère public. Alors, écoutez, vous voulez faire la révolution pour faire “sap” les choses, et puis vous vous allez vous enfermer avec un système qui ne colle pas à cette idéologie ? », questionne-t-il. Avant de révéler que cette procédure était bel et bien un choix délibéré.

Rasmané Ouédraogo, comédien et ancien juge des TPR sous le CNR (à gauche) et le juriste Blanchard Emmanuel Bayala (à droite)

Sanctions infligées par les TPR et bilan

Les sanctions appliquées par les TPR sont la peine d’expropriation, la peine d’amende et la peine d’emprisonnement, a rappelé Train Raymond Poda. Pour lui, les actions des tribunaux populaires de l’époque ont permis d’aboutir à un bilan positif malgré les limites enregistrées.

Sur les plans politique et socio-économique, il estime que le peuple insurgé a bien pris en charge la gestion du pouvoir de la justice tout en démantelant le système néocolonial, à savoir ses mécanismes de domination, d’oppression et d’exploitation du peuple. Et selon lui, la justice néocoloniale remplacée par la justice révolutionnaire a été celle du peuple, une justice accessible et compréhensible.
« Les TPR ont bien mis à terre la figure des anciens dignitaires, les obligeant à reconnaître publiquement le tort causé au peuple ; et avec humilité, modestie et soumission, à lui demander pardon », a ajouté le panéliste.

Sur le plan économique, les TPR ont permis de restituer au peuple ce qui lui a été spolié. Pour ce qui est des limites, Raymond Poda a mis en avant l’insuffisance des textes régissant les TPR d’une part et la question des juges non-professionnels d’autre part. Avant de clôturer, l’ancien membre du gouvernement sous le CNR a rappelé qu’« aucune œuvre humaine n’est parfaite, surtout dans le contexte de bouillonnement qu’était la Révolution ».
L’ex-ministre était accompagné de deux autres panélistes que sont Blanchard Emmanuel Bayala, juriste, et Rasmané Ouédraogo, comédien et ancien juge des TPR sous le CNR.

Hamed NANEMA
Lefaso.net

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