Actualités :: Robert Sangaré : « Dans la sous-région, il n’y a pas un pays qui a la qualité (...)

Arrivé à la tête de la direction du Centre national des œuvres universitaires (CENOU), voilà cinq ans déjà, M. Robert Sangaré a géré des problèmes et a contribué grâce à une approche basée sur l’écoute à trouver des solutions à certaines difficultés relatives aux œuvres universitaires.

Il reste convaincu que la plupart des difficultés que connaissent nos universités sont souvent liées à un déficit de communication. Il veut rectifier le tir en donnant davantage des éclairages à l’opinion publique et surtout aux étudiants sur la notion d’œuvres universitaires, la structuration qui les entoure, leur gestion etc.

Sidwaya (S.) : M. le Directeur général, que faut-il bien comprendre par œuvre universitaire ?

Robert Sangaré (R. S.) : Les gens n’arrivent pas à faire la différence entre là où s’arrête le domaine du CENOU et là où s’arrête celui de l’Université en termes de gestion. Le gouvernement, pour bien s’occuper des étudiants, a confié la responsabilité de leur formation à deux structures. Il y a les aspects pédagogiques, gérés par l’Université, ici, la présidence de l’université. L’autre aspect, à savoir les œuvres universitaires, c’est-à-dire les conditions pour la bonne réussite des études. Il s’agit d’un faisceau de prestations que l’on met à la disposition des étudiants.

Ce sont la restauration, le logement, la santé, le sport, les activités culturelles, le transport. C’est le CENOU qui gère ces aspects-là. Il a pour mission d’offrir l’assistance sociale aux étudiants. Nous accompagnons certaines structures comme le CIOSPB dans la gestion des bourses. D’un point de vue organisationnel, le CENOU est un établissement de l’Etat à caractère administratif (EPA). Chaque année, il a un budget alloué par l’Etat en plus de ses recettes internes.

S. : Est-ce qu’on peut avoir une idée de ce budget ?

R. S. : Le budget évolue en fonction des effectifs. Il faut dire que le gouvernement a fait beaucoup d’efforts et nous tendons vers les 3,5 milliards de francs CFA. Si le budget 2006 est adopté avec l’ouverture de l’Université de Koudougou,on devrait encore atteindre ce montant.

S. : Comment est-ce que vous gérez le volet restauration des étudiants ?

R. S. : La restauration est la prestation névralgique du CENOU. C’est l’élément sensible et qui prend aussi une partie importante de notre budget, pratiquement 75%. Nous avons des restaurants dont la gestion est faite par des privés sélectionnés à partir d’un appel d’offres. Nous les payons au nombre de repas servis. Dans les dispositions contractuelles, nous avons l’obligation de mettre à leur disposition le matériel de cuisson, les locaux, la sécurité. En retour, ils assurent l’alimentation. Mais nous avons notre droit de contrôle sur la qualité des prestations. Dans la sous-région, il n’y a pas un pays qui a la qualité de nos œuvres universitaires. J’ai fait le Ghana, le Togo, la Côte d’Ivoire, le Bénin.

Au Togo, c’est par décret présidentiel que le prix du plat est fixé et c’est 500 F CFA.

Au Ghana, le plat le moins cher coûte 200 F CFA pour la nourriture de base. Notre pays fait d’énormes efforts au niveau des conditions de vie des étudiants.

S. : Combien d’étudiants gérez-vous et quel est le nombre de plats que vous proposez par jour ?

R. S. : Actuellement, Ouagadougou tend vers 30 000 étudiants, Bobo-Dioulasso environ 2 000 et Koudougou, 1000 avec les élèves-fonctionnaires. Les normes internationales voudraient que dans chaque université, on puisse offrir la possibilité au moins au 1/3 des étudiants de pouvoir manger dans les restaurants universitaires.

Si nous allons du principe que chaque étudiant mange 2 fois par jour, nous sommes aujourd’hui pour l’année 2005-2006, à 22 000 repas par jour sur l’ensemble du territoire national.

Notamment ce nombre évolue quand des situations imprévues se présentent parce qu’avec les étudiants, tout est possible. Sur la base donc des 22 000 repas, nous pensons qu’il y a 10 000 à 11 000 étudiants qui peuvent avoir à manger.

Evidemment, la fréquentation des restaurants est très forte et les étudiants pensent que nous devons faire plus que cela, ce qui n’est pas possible. Mais nous disons que juridiquement, tout étudiant inscrit dans une de nos universités a accès de facto à nos restaurants. Nous ne pouvons pas interdire à quelqu’un de venir manger tant qu’il a le statut d’étudiant. On ne peut pas non plus préparer pour 30 000 étudiants. Dans la sous-région, nous avons quand même l’une des plus grandes prestations. Atteindre le 1/3 des étudiants en matière de restauration est quand même une performance.

S. : Venons-en à la gestion de la cité universitaire. Comment cela se passe ?

R. S. : Les principales cités sont celles de Zogona et de la Patte d’Oie. Depuis un certain temps il y a une pression due au nombre croissant des étudiants. Cela fait cinq ans que je suis à la tête du CENOU. On a une moyenne d’arrivée de 5 000 bacheliers par an. Cela veut donc dire que depuis que je suis là, nous sommes déjà à 25 000 étudiants. Alors qu’avant que je n’arrive, l’Université de Ouagadougou comptait déjà 15 000 étudiants. Il se trouve que la question du logement demeure aujourd’hui un vrai casse-tête.

D’abord il y a beaucoup d’étudiants qui arrivent des provinces, ceux-ci n’ont pas de logeurs à Ouagadougou. Ensuite, vous avez la crise en Côte d’Ivoire qui a aggravé la situation et la plupart préfèrent venir ici. Alors on se retrouve avec une demande très forte par rapport à nos capacités d’accueil qui sont autour de 1 000 à 1 200. Nous avons été obligés face à la détresse de beaucoup d’étudiants, la pression (à chaque rentrée scolaire, c’est un cauchemar pour moi, je suis interpellé à tout moment pour des histoires de chambres), de chercher d’autres sites d’accueil. Pourquoi est-ce que les étudiants sont 3 à 4 par chambre par le phénomène que nous appelons « cambodgien » ? Ils n’ont pas le choix. Maintenant nous faisons des efforts pour accroître chaque année les capacités d’accueil. En plus des cités, nous cherchons des bâtiments quand il y en a. Et même pour en trouver, adapté au logement collectif, il n’y en a pas beaucoup.

Généralement ce sont des anciens hôtels que nous prenons comme c’est le cas de l’ancien hôtel de l’Artisanat, l’hôtel Tropical à Bobo. A Koudougou c’est la même chose. Nous avons dû recourir à de petits hôtels pour les adaptés. La question du logement est actuellement très nœudal puisque celle de la restauration est plus ou moins résolue. Comme nous a dit un Français lors d’une étude sur la question du logement que nous avons menée avec l’UNESCO, celui-ci trouve que nous mettons beaucoup d’argent dans la restauration au lieu d’en mettre dans le logement.

Cela l’est aussi peut-être par la faute des étudiants ; parce que quand ils font pression sur vous, c’est lié à la restauration. Ce Français nous a alors dit : « Mais monsieur le directeur, vous mangez des milliards pour les chier le soir » alors que le Burkina est un pays où on peut manger à 100F CFA dans la rue mais où on ne peut pas se loger à 100F CFA. Malheureusement les principaux acteurs posent les problèmes à l’envers parce qu’ils pensent qu’il n’y a que ce qui va au ventre qu’on réclame. Ailleurs, c’est ce qui facilite l’étude. Et c’est quoi ? C’est un logement, un endroit où vous pouvez vous asseoir tranquillement après les cours pour étudier. C’est cela la base principale.

Mais le gouvernement a compris la chose. C’est la première fois au Burkina qu’on va réaliser une grande cité de près de 4 milliards de francs CFA sur financement du fonds de l’OPEP. C’est une cité qui comportera l’ensemble des infrastructures d’accompagnement, restaurant, service de santé, administration, infrastructures sportives. Ce sera un village universitaire, une cité de près de 750 lits. Le chantier, si tout va bien, sera achevé à la rentrée 2006-2007.

S. : Les étudiants s’interrogent toujours sur l’attribution des chambres. Expliquez-nous un peu la procédure ?

R. S. : Il y aura toujours des gens de mauvaise foi. Les attributions des chambres sont limpides comme l’eau de roche. Il y a une commission d’attribution des chambres en cité composée de l’administration et des représentants des étudiants avec des critères de dossiers clairs. C’est cette commission qui statue sur la base des critères arrêtés. Généralement je ne suis pas membre de la commission. On privilégie les bacheliers hors de Ouagadougou ; à l’intérieur de ceux-ci, on regarde les conditions sociales des uns et des autres. Ensuite il y a une chose très claire qui dit que 60% des chambres vont aux filles et 40% aux garçons. Le délai maximum de résidence en cité est de deux ans.

Je n’ai jamais remis en cause les résultats de la commission, je les approuve. Maintenant dans les mêmes textes, il est prévu très clairement qu’il y a un pourcentage affecté à l’administration. Ce pourcentage était de 10%. Quand je venais à la direction du CENOU. Certains syndicats ont proposé qu’on le ramène à 5%. La correction a été faite auprès du conseil d’administration ; 5% donc revient à l’administration, ceci pour faire face à des demandes exceptionnelles. Pourquoi ?

Parce que il y a un quota pour une certaine catégorie de gens notamment les étrangers. Nous aussi nous envoyons nos étudiants ailleurs. Et cela constitue des sources de recettes. J’ai là devant moi le reçu d’une étudiante ivoirienne qui a payé les droits des œuvres universitaires. Cela nous rapporte deux cent mille francs CFA. C’est la même chose pour les étudiants burkinabè que l’Etat envoie à Dakar, Cotonou ou ailleurs. Généralement donc, le nombre de chambres réservées aux étudiants étrangers ici est de 10. Nous avons également le quota des handicapés, 10. Nous avons le quota du HCR. Notre pays a souscrit à des textes.

Donc, l’un dans l’autre, il n’y a aucune magouille. Mon quota n’est pas caché, ce sont eux-mêmes qui l’ont déterminé et le quota de l’administration est à la discrétion du DG du CENOU. La magouille vient même des étudiants. Le fait que les chambres manquent, cela relève de certains comportements qui méritent même qu’on emprisonne certains étudiants. On est obligé de tolérer. Nous avons des étudiants qui cherchent la chambre et la revendent à 100 000F CFA à d’autres. Il y en a qui sont passés par des autorités pour nous bousculer.

S. : Vous disposez d’un service sanitaire. Avez-vous le sentiment que les étudiants le fréquentent ?

R. S. : Nous avons effectivement un centre de santé qui procure les premiers soins aux étudiants. Evidemment comme tout centre sanitaire, lorsque la demande dépasse nos capacités, nos médecins leur prescrivent des examens lorsqu’il s’agit de maladies sérieuses. Nous avons aussi un laboratoire d’analyse médical, un cabinet médical. Maintenant depuis un certain temps, le gouvernement a mis en place et à la demande des étudiants, ce qu’on appelle la Mutuelle nationale de santé des étudiants (MUNASEB). Il suffit pour l’étudiant de payer 5 000 F CFA et il a une couverture sanitaire pour toute l’année académique en cours. Lorsqu’il tombe malade, la MUNASEB lui rembourse les frais à hauteur de 80%.

Aucune raison ne peut alors justifier que des étudiants soient là à spéculer sur des choses futiles. Aujourd’hui nos étudiants bénéficient d’un service sanitaire de qualité. La souscription à la MUNASEB donne droit à l’achat de médicaments dans notre dépôt pharmaceutique. Nous avons élargi le régime sanitaire pour couvrir presque toutes les maladies. Nous avons également des conventions avec tous les hôpitaux. La Mutuelle c’est avant tout l’esprit de solidarité et tout étudiant doit avoir cet esprit-là. Maintenant au Burkina Faso, nous en avons qui ont un esprit trop individualiste et cela est très dommage. Si nos étudiants étaient suffisamment responsables, ce sont eux qui allaient gérer cette mutuelle. Le gouvernement met une subvention pour les accompagner. Il reste aux étudiants d’adhérer massivement.

S. : Le sport s’est réveillé ces dernières années à l’Université. Comment est-ce que ce domaine est structuré ?

R. S. : Le sport relève du CENOU. Depuis un certain temps il a repris effectivement son envol. Nous organisons des championnats universitaires en football, en sport de mains, nous participons aux compétitions internationales. Malheureusement cette année, nous venons de perdre notre directeur des activités culturelles et sportives, M. Bassinga. Dans toutes les universités du monde, le sport a une place prépondérante. C’est un peu dommage qu’ici nous n’ayons pas toutes les infrastructures. Nous avons cependant un projet à l’intérieur du terrain jouxtant celui du terrain d’entraînement de l’EFO. Nous avons l’ambition d’y réaliser un complexe sportif. Le sport a une place importante dans les universités. Il en est de même pour la culture. L’Université produit tout : des hommes de théâtre, des musiciens, des poètes, etc. Ce sont des aspects sur lesquels nous mettons l’accent. Chaque année, nous commençons les activités au mois de janvier avec le campus cross, ensuite suivent les différents championnats.

S. : Le sport est apparemment géré ici par deux structures, celle du CENOU et celle de la présidence. Pourquoi cela et comment vous arrivez à vous organiser ?

R. S. : Non ! Si on s’en tient à l’esprit et à la lettre des textes, la seule structure habiletée à gérer les sports sur le campus universitaire, c’est le CENOU. Si vous prenez le décret portant création du CENOU, parmi nos missions, la gestion du sport relève exclusivement de nos attributions. Maintenant nous travaillons avec les étudiants. Qu’un président d’université dise qu’il veut offrir une coupe dans un domaine donné, nous, nous disons que cela est la bienvenue. Sinon, structurellement, ce n’est vraiment pas nécessaire. Maintenant il peut s’agir d’une organisation interne au niveau de la présidence. Comme je l’ai dit, ce n’est pas expressément interdit, tout dépend des responsables.

Entretien réalisé par Ismaël BICABA (bicabai@yahoo.fr)
Sidwaya

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