Actualités :: Burkina : « On parle de réconciliation nationale et on continue à piller les (...)

C’est autour du processus de réconciliation nationale en cours au Burkina, que la Coordination des comités de défense et d’approfondissement des acquis de l’insurrection populaire (CDAIP) de la ville de Ouagadougou a, ce samedi 20 novembre 2021 à Ouagadougou, organisé un panel pour non seulement poser le débat, mais surtout apporter des pistes de solutionnement pour ‘’l’idéal commun tant prôné’’.

Cette activité grand public qui s’est tenue à la Bourse du travail avait pour thème : « Justice et réconciliation nationale : expériences, enjeux et perspectives pour le peuple burkinabè ». Pour animer le sujet, les co-panélistes Ousséni Ouédraogo, juriste et conseiller technique du ministre d’État, ministre auprès de la présidence du Faso, chargé de la Réconciliation nationale et de la cohésion sociale et Aly Sanou, secrétaire général du MBDHP (Mouvement burkinabè des Droits de l’Homme et des peuples) avec pour Modérateur, Dr Moussa Diallo de la CGT-B (Confédération générale du travai du Burkina).

Vue partielle du public.

Dans sa communication, Ousséni Ouédraogo a d’abord relevé que le processus de réconciliation nationale en cours tranche d’avec les initiatives antérieures, notamment du point de vue de la démarche et de la vision. « Nous avons voulu que cette fois-ci, le processus soit véritablement inclusif. Ce qui a justifié les concertations communales, les conférences régionales, la constitution de différents réseaux… », a-t-il expliqué, se félicitant de ce que le président Roch Kaboré concrétise ainsi une promesse de campagne par la création d’un ministère pour la mise en route du processus.

Le panéliste Ousséni Ouédraogo est revenu sur la feuille de route du ministère en charge de la réconciliation nationale.

« Cette nécessité d’aller à la réconciliation a été confirmée à travers les concertations communales que nous avons eues sur l’ensemble du territoire national et les données qui ressortent de ces concertations sont qu’il faut aller nécessairement vers une réconciliation. L’ensemble des populations ont fait des propositions, d’abord sur le besoin de réconciliation, ensuite sur les mécanismes qui doivent être ceux endogènes que nous devons donc utiliser pour aller vers la réconciliation. Donc, le choix du président du Faso, c’est un choix judicieux et on retient qu’il ne s’est pas trompé en voulant faire de la réconciliation, un des axes majeurs de son mandat », a déroulé le panéliste. M. Ouédraogo a rappelé que tous les aspects de la vie nationale, y compris la préoccupation sécuritaire, sont pris en compte à travers les six axes dressés par le ministère en charge de la question. C’est au cours du forum national, que les Burkinabè vont décider de ce qu’il faut pour aboutir à une réconciliation, à une cohésion sociale et pour que les cœurs puissent s’apaiser, présente le juriste le conseiller technique.

De g.à.d : Élie Tarpaga, Aly Sanou, Dr Moussa Diallo et Ousséni Ouédraogo.

Aly Sanou, lui, a d’abord fait observer que depuis un moment, la réconciliation nationale est devenue une question d’actualité, même si elle ne constitue pas, à son avis, une préoccupation majeure aujourd’hui pour les Burkinabè. Il estime que c’est un processus "budgétivore" qui n’apportera ni plus de sécurité dans la vie des Burkinabè ni d’amélioration des droits sociaux, tels que la santé, l’éducation, l’alimentation, le travail, le jeûne. « C’est comme une réconciliation entre politiciens, qui ont un intérêt économique en commun, qui ont passé ensemble un temps pas très lointain et qui, aujourd’hui, cherchent des processus pour se couvrir des crimes économiques et des crimes de sang qu’ils ont eu à commettre. Voyez avec moi, le procès Thomas Sankara en cours, où des accusés qu’on soupçonne fortement d’avoir joué un rôle prépondérant, nient toute responsabilité. C’est-à-dire ne sont même pas prêts à dire la vérité au peuple burkinabè. Dans ces conditions, comment est-ce qu’on peut parler de réconciliation ? J’aurais bien aimé que les principaux accusés, tel que l’ancien Chef d’Etat, Blaise Compaoré, vienne dire sa part de vérité. On aurait dans ce cas de figure compris qu’il s’agit d’un véritable processus de réconciliation sincère. Mais au lieu de cela, on jette un discrédit sur le processus, on refuse de venir assumer ses actes, on reste à l’extérieur et on dit qu’on veut qu’on se réconcilie. Pour nous, c’est un processus qui n’est pas sincère », épluche-t-il.

Aly Sanou, secrétaire général du MBDHP.

« Qu’est-ce qu’on peut reprocher à Blaise Compaoré qu’on ne peut pas reprocher à l’actuel président Roch Kaboré ? »

Pour Aly Sanou, il faut laisser la justice faire son travail et ceux qui ont des comptes à lui rendre soient punis à la hauteur des forfaits qu’ils ont commis, notamment sur le plan des crimes de sang, mais également des crimes économiques. Il constate qu’on parle peu de crimes économiques, même s’il fait partie des axes de la réconciliation.

« Ceux qui en parlent, sont ceux-là mêmes qui, chaque jour que Dieu fait, sont accusés de détournements de Fonds, de pillages de deniers publics, etc. Comment est-ce qu’on peut être soi-même accusé de corruption et vouloir faire des réconciliations sur le plan économique ? », décèle M. Sanou. D’où sa conviction qu’il n’y a qu’une seule voie pour sortir de la situation : c’est celle de la mobilisation populaire, l’organisation populaire.

Dr Moussa Diallo, modérateur du panel

« A chaque fois que notre peuple a conquis des victoires, c’est parce qu’il était déterminé, uni, mobilisé et organisé », a rappelé le défenseur des droits de l’Homme. D’où le besoin donc de mettre en place un mouvement d’unité populaire qui va réunir toutes les composantes et se battre pour le changement véritable au Burkina, insiste le secrétaire général du MBDHP.

Aly Sanou soutient que le mouvement d’unité populaire, appelé de tous les vœux, sera un mouvement qui tirera des leçons de toutes les expériences des luttes menées par le peuple (évènements de 98, insurrection populaire, résistance au putsch), pour être beaucoup plus fort et pour mettre la question du changement véritable et radical au cœur des préoccupations.

En commentaire, le modérateur a dit avoir l’impression que ceux qui sont aujourd’hui au pouvoir veulent se soustraire du passif. « Qu’est-ce qu’on peut reprocher à Blaise Compaoré qu’on ne peut pas reprocher à l’actuel président Roch Kaboré ? », avise Dr Moussa Diallo, qui note que les actes de mal gouvernance et de brimade (suspension de salaires) se poursuivent.

Elie Tarpaga, président de la CDAIP.

« Nous avons voulu ce panel parce que d’abord, c’est une donne qui est à la page ; le gouvernement a mis en place un certain mécanisme pour la réconciliation nationale. Ensuite, nous savons qu’il y a beaucoup de divergences quant aux points de vue qu’il y a autour de la question. Nous avons donc voulu que les uns et les autres puissent se retrouver et voir qu’est-ce qui est aujourd’hui vraiment porteur. (...). On parle de réconciliation nationale et on continue à piller les ressources du pays. On n’est pas pressé de rendre justice. Quand vous prenez la question du charbon fin, c’est resté lettre morte. Pourtant, ce sont des ressources qui appartiennent aux Burkinabè et qui devraient en principe jouir de ces ressources. A côté de cela, vous voyez l’insécurité, dont une des raisons, c’est l’injustice sociale », a, pour sa part justifié le président de la CDAIP, Elie Tarpaga. Il déplore que certaines localités aient été longtemps abandonnées par les autorités dans le processus de développement, favorisant ainsi des frustrations.

« Comment allons-nous réconcilier un peuple qui n’a pas d’abri, des terres cultivables ? (...). Tant qu’il n’y aura pas de justice sociale au Burkina, nous aurons beau faire des colloques, nous allons toujours recommencer la réconciliation ; parce que ça ne va pas aboutir. Celui qui a faim ne peut aller engager une conversation avec celui-là qui a pris son plat, ce n’est pas possible », soutient le président de la CDAIP.

Oumar L. Ouédraogo
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