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30 ans de l’assassinat de Thomas Sankara : La longue marche pour la justice

LEFASO.NET | Tiga Cheick SAWADOGO
dimanche 15 octobre 2017.

 

En cette soirée du 15 octobre 1987, le vent de la révolution est pollué. Au conseil de l’entente, un commando fait couler du sang. Thomas Sankara et 12 de ses compagnons sont passés aux armes, alors qu’ils étaient en réunion. Ainsi, ’’ils’’ sont passés aux actes. Qui sont les commanditaires ? A qui profite ce crime odieux, lâche et crapuleux ? Très facile à deviner. Les jours qui suivront apporteront des réponses. Les ’’rectificateurs’’ tentent par tous les moyens, d’effacer la mémoire du capitaine président. Manipulations, intimidations, montages éhontés, liquidations physiques. Rien n’y fit. On ne tue pas les idées. Seulement, les assassins et les commanditaires courent toujours. Mais trois décennies après, la soif de la justice reste intacte. Ce 15 octobre 2017, ils étaient nombreux dans les rues de la capitale pour encore crier Justice pour Thomas Sankara et ses 12 compagnons. A l’ambassade de France et à la justice militaire, des messages ont été remis.

Il y a 30 ans, au tristement célèbre conseil de l’entente, des crépitements d’armes sont entendus. Thomas Sankara et 12 de ses compagnons étaient assassinés par un commando. Un rêve venait ainsi d’être brisé. Ses bourreaux feront tout pour salir son image, enterrer le message d’espoir pour le Burkina, l’Afrique et tous les peuples qui luttent pour leur épanouissement et contre l’arbitraire. En vain. Trois décennies après, Thomas Sankara parle toujours et crée des insomnies à ces assassins, aux commanditaires. Qu’ils aient fuient ou pas, Sankara les hante.

C’est ici, au conseil de l’Entente et pour la première fois, que des citoyens ont entamé une marche pour encore et toujours réclamer justice pour le capitaine président, Noël Isidore Thomas Sankara.

A l’initiative du Comité international mémorial Thomas Sankara(CIM-TS), des centaines de manifestants ont arpenté les rues de la capitale en cette matinée dominicale, pour dire leur refus de l’oubli.

La boucherie du 15 octobre 1987 a été la résultante d’un complot ourdi depuis l’international et mis en exécution par l’entremise des valets locaux de l’impérialisme. La France, puissance colonisatrice n’est pas étrangère au massacre. C’est pour cela, que les marcheurs du dimanche ont fait escale à l’ambassade du pays de François Mitterand, président français quand Sankara était liquidé. Là, le colonel major Bernard Sanou, président du CIM-TS va remettre le mémorandum sur le dossier judiciaire Sankara et compagnons. C’est à la réception qu’il est accueilli, comme s’il s’agissait d’un courrier habituel. C’est de son poste que le français reçoit le document, refusant de sortir, pour ne pas faire face à la horde de journalistes nationaux et internationaux.

Qu’à cela ne tienne, le CIM-TS dans le document remis, exige simplement à la France, la levée du secret défense ainsi que toutes les archives portant sur le dossier Sankara et l’ouverture d’une enquête en France pour situer les diverses responsabilités dans cet odieux assassinat. « Une demande officielle a été adressée à la France en 2016 pour qu’elle lève son secret défense afin que l’enquête puisse être menée en vue de situer la responsabilité de la France sur ce crime. Près d’un an après, les autorités françaises n’ont pas encore donné une suite à cette requête du juge d’instruction », peut-on lire dans le mémorandum.

Longue marche vers la justice

De l’ambassade du ’’pays des droits de l’homme’’, les manifestants ont mis le cap sur la justice militaire. C’est elle qui a en charge le dossier. Là au moins, le président du CIM-TS, accompagné de certains membres, est reçu par le premier responsable de l’institution, Sita Sangaré et le commissaire du gouvernement Alioune Zanré.

« Nous sommes venus remettre un mémorandum récapitulatif de tout ce qui a été fait. Nous venons aussi les encourager pour le travail qui est fait depuis quelques temps. Nous espérons le procès de tout cœur », a juste dit le colonel major Bernard Sanou à sa sortie.

« Ils nous ont rassurés que le dossier avance très vite et beaucoup de choses se passent. Ils mettent tous les moyens possibles, comme il l’a dit, cela fait près de 4 ans que les juges n’ont pas pris de congés parce qu’ils sont sur beaucoup de dossiers. On est aussi là pour les encourager et leur dire, que c’est vrai que la justice est une vieille dame, mais nous qui sommes jeunes, souhaitons que ça aille plus vite. On a espoir... », a pour sa part expliqué Sams’K le Jah membre du comité.

Blaise Compaoré et Hyacinthe Kafando, les fuyards

En rappel, c’est en mars 2015 que le président de la transition Michel Kafando avait ordonné l’ouverture d’une instruction judiciaire du dossier Sankara et ses 12 compagnons d’infortune. A la date d’octobre 2016, 14 personnes ont été visées par des poursuites, après une centaine d’auditions. Ainsi, on assistait à des premiers inculpés. Le Gal Gilbert Diendéré, Gabriel Tamini(journaliste et conseiller spécial de l’ancien président Blaise Compaoré), Christophe Diébré (Colonel , signataire de l’acte de décès de Thomas Sankara avec la mention « mort naturelle »).

Par ailleurs, le juge a lancé deux mandats d’arrêt internationaux contre Blaise Compaoré et Hyacinthe Kafando.

En tout cas, en cette matinée, la justice militaire a été interpellée sur son devoir dans la manifestation de vérité et de la justice pour le président Thomas Sankara et ses 12 suppliciés. Ils ont demandé entre autres, que tous les commanditaires, exécutants et complices soient châties à la hauteur de leur forfait.

Visiblement mobilisés, déterminés et dans l’espoir d’un procès, les manifestants se sont dis au-revoir. Après bien-sur, l’exécution de l’hymne de la victoire, le Ditanyè.

Tiga Cheick Sawadogo
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