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Compagnies minières et communautés riveraines : Une cohabitation pas toujours facile, selon l’ONG ORCADE

lundi 1er mai 2017.

 

L’Organisation pour le renforcement des capacités de développement (ORCADE) s’est penchée sur la cohabitation entre les communautés des sites miniers et les entreprises minières au Burkina. C’est ce vendredi 28 avril 2017 à Ouagadougou que l’ONG a présenté le rapport d’enquête/sondage qui a concerné neuf communes abritant sept sites miniers.

Le boom minier est une réalité au pays des hommes intègres depuis près d’une décennie maintenant. D’Est en Ouest, du Nord au Sud, des projets miniers s’installent, non pas sans difficultés avec les communautés de ces lieux. Mais qu’en est-il réellement de la qualité de cette cohabitation ? Est-elle paisible ? Si non, qu’elle en est la cause et que faut-il faire ? En substance, c’est l’objectif recherché par cette enquête menée par l’ONG ORCADE dans les communes minières de Yalgo (site de Taparko), Gorom-Gorom (site d’Essakane), Sabcé et Mané (site de Bissa Gold), Kalsaka et Séguénéga (site de Kalsaka mining), Namissiguima (site de True Gold), Tongomayel (site d’Inata) et Zabré (site de Youga).

Le rapport a été présenté par le Chargé de programme de l’ONG ORCADE, Jonas Hien

Selon le Chargé de programme de l’ONG ORCADE, Jonas Hien, 417 personnes au total, composées de responsables coutumiers, religieux et administratifs, d’élus locaux, de jeunes, de femmes, ont répondu aux questions des enquêteurs. Ce qui a permis de comprendre les causes des différents conflits en lien avec l’exploitation minière. De manière générale, les personnes sondées connaissent l’entreprise minière qui procède à l’extraction de l’or dans leurs localités, mais le climat de cohabitation varie d’un site à l’autre.

Youga, une mine d’or hors du commun

Selon l’enquête, parmi ces sept mines, les sites miniers où le climat est le plus paisible sont Essakane et True Gold. « Il y a un calme et on semble être, sur de bonnes voies en terme de paix sociale », confie Jonas Hien. Pour ce qui est du climat passable ce sont les mines d’or de Kalsaka, Taparko, Bissa Gold (commune de Sabcé). Le climat n’est pas bon à Inata et Bissa Gold (extension dans la commune de Mané). Quant à la mine d’or de Youga, le climat est simplement très mauvais.

Ce climat délétère dans ces sites se justifie aisément par le non fonctionnement, ou le manque de mécanisme de communication et de dialogue entre le projet minier et la communauté locale. « Sur tous les sites couverts, il n’y en a pas un seul où l’on nous a dit qu’il n’y a jamais eu conflit. Les uns plus violents que les autres, mais qui ont pu être circonscrits et résolus de par la contribution des autorités », avance Jonas Hien. Le cas de Youga est une particularité car il y a pratiquement conflits tous les jours selon l’enquête. Les orpailleurs qui se sentent lésés par l’installation de la mine souhaitent sa disparition le plus vite possible.

Les participants à la présentation du rapport

Les communautés enquêtées ont également le sentiment que les projets miniers viennent piller les ressources de leurs localités en complicité avec l’Etat, sans pour autant investir comme il se doit. Pire encore lorsqu’il s’agit d’emplois, ce sont des gens d’autres localités qui en bénéficient, pensent ces communautés. Et le manque de respect des autorités locales de la part des compagnies minières, corroboré par de fausses promesses, fait naitre un sentiment de rejet de certains projets miniers à travers des manifestations parfois violentes. Ce qui sans doute finit toujours par une répression des populations riveraines par les forces de l’ordre.

Ce qui ne fait qu’aggraver les choses puisqu’on ne peut pas développer une mine contre les populations. Pour un climat apaisé, l’ONG ORCADE fait plusieurs recommandations à l’endroit de l’Etat et des compagnies minières. Il est demandé à l’Etat de faire un travail préalable d’information des communautés sur l’installation des projets miniers, en plus de ce que font les bureaux d’études. Aussi, l’Etat doit veiller à la mise en œuvre de la Responsabilité sociale des entreprises minières (RSE). Sans oublier l’opérationnalisation du code minier en adoptant l’ensemble de ses textes d’application. Surtout avec le Fond minier de développement local qui profitera aux communes.

A l’endroit des entreprises minières, l’ONG recommande plus de collaboration avec l’Etat, les autorités locales et les organisations de la société civile pour la mise en place ou la dynamisation des cadres de concertation et de dialogue. Aussi, le rapprochement entre communautés et les responsables chargés des relations avec les communautés est vivement conseillé. D’autant plus que dans certains sites ces derniers ne sont ni connus des habitants, ni des autorités locales. Ces recommandations ne sont pas tombées dans l’oreille d’un sourd, en témoigne la réaction de certains responsables de ces sociétés minières présents à la cérémonie.

Cette enquête sur la cohabitation entre sociétés minières et communautés vivant sur les sites miniers a été financée par le Service international pour la paix dénommé EIRENE à travers son programme « Gestion non violente des conflits ».

Marcus Kouaman
Lefaso.net