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Lanfièra : Le mémorial Karamogoba Sanogo a été inauguré

lundi 6 février 2017.

 

Le samedi 21 janvier 2017 fera certainement date dans l’histoire du développement de la culture et du tourisme dans la commune de Lanfièra avec l’inauguration du mémorial Karamogoba Sanogo, sage bien respecté dans la localité qui est né vers 1820 et a été assassiné en 1896. Les filles et fils de Lanfièra ont saisi cette heureuse occasion pour saluer la clairvoyance du gouvernement burkinabè pour les hommages rendus déjà à Karamogoba Sanogo en dressant une rue à l’illustre disparu le 24 novembre 2006 à Ouagadougou. Pour cela, ils ont pensé particulièrement au ministère de la Culture des Arts et du Tourisme qui cette fois encore leur a érigé un mémorial.

La cérémonie d’inauguration du mémorial Karamogoba Sanogo a réuni les filles et fils et surtout d’honorables invités. C’est à juste titre qu’ils se sont réjouis d’être bénéficiaires de ce monument érigé en l’honneur de leur ancêtre et d’avoir bénéficié de l’accompagnement du ministère de la Culture des Arts et du Tourisme pour que ce mémorial devienne une réalité.

Le conseil municipal et la communauté villageoise s’engagent à la protection, la sauvegarde, la valorisation de ce patrimoine commun. Ils ont tenu, en cette solennelle circonstance, à saluer l’ensemble des acteurs et partenaires de la commune qui œuvrent sans relâche au développement de la culture et du tourisme dans la localité. Les filles et fils de Lanfièra ont fait une motion spéciale au ministre de la Culture, des Arts et du Tourisme patron de la cérémonie ainsi qu’au parrain Amadou Baba Dayo pour avoir bien voulu accepté leur prêter tout son concours pour que cette cérémonie ait lieu. Pour cette vision et cet engagement à leurs côtés, les filles et fils de Lanfièra ont dit tout simplement merci…

Ce mémorial dont le projet à été élaboré en 2004 a été érigé en 2009 et a couté la bagatelle de 62 000 000f CFA. Véritable musée, ce bâtiment renferme des photos des ascendants et descendants de Karamokoba Sanogo, celles des Imams de Lanfièra depuis sa création à nos jours, des vieilles mosquées de la citée d’Islam en pays Dafing (Tissi, Bossé, Worou, Douban, Safané, Douroula et Ouahabou), également celles de ses contemporains (Naba Boukary Koutou, Naba Kiiba, El Hadj Abibou, Chef de canton de Lanfièra, la princesse Guimbi Ouattara, Samory Touré, etc et enfin celles des colons qui y sont passés : docteur Crozat, Lieutenant-colonel

Parfait Monteil, l’adjudant-chef Badaire, le lieutenant Julien Chanoine, du capitaine Paul Voulet, du cimetière français de Koury de 1899 à 1912. En dehors des photos il y a des traités, des textes écrits, des articles de presse, bibliographies, filmographies, des objets et attributs du pouvoir et plein d’autres objets de l’époque de Karamogoba Sanogo.

Au-delà du souvenir et de l’hommage qu’il rend à Karamogoba Sanogo, c’est toute la famille et la commune entière qui sont honorées. Pour la population de Lanfièra, c’est également un pan de la culture Marka et partant le tourisme dans la localité qui se trouvent promus.

Les filles et fils de Lanfièra ont fait savoir aux distingués invités que le tourisme est l’un des secteurs économiques qui contribuent énormément au développement de bon nombre de pays. Comme ils le savent, les effets bénéfiques du tourisme sont incontestables et ils restent convaincus que le tourisme constitue un socle solide sur lequel leurs collectivités pouvaient bâtir leur développement local. Ils se réjouissent de toutes ces initiatives et ont tenu à féliciter le ministre de la culture, le parrain et l’ensemble des acteurs pour leur forte implication dans la mise en œuvre de ces politiques au niveau local.

Par la suite, la population de Lanfièra a invité les acteurs en particulier à exploiter l’immense potentiel touristique disponible et a lancé un appel à tous les partenaires notamment le ministère de la culture, l’ambassade de la France pour l’accompagner dans ses efforts de développement pour que la prise en compte de la culture et du tourisme dans la commune soit effective. Aussi voudrait-elle encore solliciter le soutien des partenaires pour la construction d’un centre culturel Karamogoba Sanogo dont le terrain est déjà dégagé et le besoin exprimé est pressant.

Enfin les filles et fils de Lanfièra ont formulé le vœu qu’ensemble, ils arrivent par leur engagement tant individuel que collectif à promouvoir véritablement le développement en général et la culture en particulier.

David Demaison Nébié
Correspondant de la Boucle du Mouhoun
Lefaso.net


Mémorial Karamokoba Sanogo
ORIGINE

Issu de l’ethnie marka ou dafing, présente dans le nord-ouest du Burkina à partir du 13ème, Karamokoba (Ahmadou Baba) Sanogo descend d’une célébre famille érudite et prosélyte de l’Islam depuis son aube africaine.

Le terme dafing daterait de la période de règne des rois bambaras dans le Manden ; il désigne les marabouts markas réputés pour leur maitrise de la pratique maraboutique, au moyen de l’encre noir « daba fin » en dioula. Dafing est la contraction dioula de « daba fitiniguiou » c’est-à-dire les maîtres de la science de l’encre noire. Par extension, dafing renvoie aux markas mususlmans pour les distinguer de ceux d’entre eux qui ont abandonné l’Islam.

Karamokoba est le troisième fils de Karamoko Lanfièra, fondateur du village de Lanfièra, dans la seconde moitié du 18ème siècle. Ce dernier figure aux premiers rangs des Walidjous (Saints) de l’islam dans le pays Dafing ou Dafina. Sa tombe, objet d’une grande vénération et sollicitude, se trouve dans la mosquée aux 66 minarets qu’il a érigée vers 1780.

FORMATION –ETUDES

Karamokoba fit ses premières études à Lanfièra, auprès de son père. Il les poursuivit à Djenné, une quinzaine d’années durant, chez 12 professeurs (Walandas). Il fut particulièrement étudiant du célèbre Alpha Moctar Traoré, grand maître respecté de la Qadrya à Djenné.

AUDIENCE ET NOTORIETE

De retour d’études, il crée une école coranique dont la renommée fut considérable tant à cause de la notoriété intellectuelle et morale de son fondateur que de celle pieuse et prosélyte du village de Lanfièra. Du savoir, de la renommée et de l’audience de Karamokoba, le lieutenant-colonel français Louis Parfait Monteil témoigne en 1891 : « Karamoko est très instruit (…). Son esprit est curieux de toutes choses (…). Chaque fois, il m’a étonné par la justesse, la précision de ses réflexions. Karamoko, dans ce milieu ignorant de Markas qui ont depuis longtemps oublié jusqu’aux pratiques extérieures du culte musulman, s’est peu à peu crée par sa seule intelligence, une situation d’oracle sans cesse consulté, sans cesse écouté.

Sa réputation de sainteté, de sagesse, et aussi de tolérance a bientôt franchi les limites du Dafina, pour rayonner jusqu’à Bandiagara, Bobo-Dioulasso, Salaga et Say. Les élèves ont afflué, plusieurs d’entre eux sont allés à la Mecque et à leur retour lui ont continué la déférence que son grand savoir lui a conquise ».

C’est précisément cette notoriété et audience qui en feront l’hôte des premiers voyageurs (explorateurs) français : le docteur Crozat en septembre 1890, le lieutenant-colonel Louis Parfait Monteil en avril 1891, le Commandant Destenave en 1894 et 1895. Ils bénéficieront, pour la plupart, de sauf-conduit de Karamokoba pour accéder au Mogho qui entretenait des relations étroites et suivies avec lui.

Karamokoba n’était-il pas le Conseiller voire le marabout très écouté des nabas du Yatenga et de Ouagadoudou (dont la cour regorgeait particulièrement de marabouts-conseillers Markas ou Yarcés) ?
Son audience morale et politique (par circonstance) en fera la signataire du traité du Dafina (3 avril 1891) avec les français qui virent en Lanfièra « la capitale véritable du Dafina ».

L’EXECUTION

L’audience et la célébrité du personnage expliquent pour beaucoup son élimination physique par le capitaine Voulet, le mardi 24 novembre 1896 : l’influence morale, spirituelle et politique qu’il exerçait sur les populations samos et markas et qui faisait ombrage aux prétentions hégémoniques de Ouidi Sidibé de Barani et des Toucouleurs de Bandiagara sur le Souroudougou, en fit pour le capitaine français et ses alliées « le cerveau de la révolte des Samos contre l’occupant français » ainsi qu’un « allié de Samori Touré ».

Certes la forfaiture fut désapprouvée par le Colonel Archinard (ex Commandant supérieur du Soudan) avec qui la victime eut des échanges épistolaires ; mais elle était déjà consommée. Ouidi Sidibé emportera la dépouille à Barani (Kossi) où elle fut inhumée en un lieu non encore connu.

L’HOMMAGE POSTHUME

Célébré du 22 au 24 novembre 1996 à Lanfièra, le centenaire de la forfaiture de Voulet a rassemblé un millier d’invités et de participants venus du Burkina et de la sous-région. La France y était représentée par une délégation conduite par son ambassadeur en poste à Ouagadougou. Depuis le 24 novembre 2006, la rue 19.30 au secteur 19 (ex quartier Nonsin) à Ouagadougou porte le nom de l’illustre disparu. Un mémorial lui a été attribué par l’Etat burkinabè en juin 2004 et érigé en 2009.

Bassirou SANOGO



Vos commentaires

  • Le 7 février 2017 à 08:14, par El primo En réponse à : Lanfièra : Le mémorial karamogoba Sanogo a été inauguré

    Felicitations à tous pour cette mobilisation exceptionnelle et particulièrement au maire et à toute son équipe.Nos remerciements vont également à l’endroit du gouvernement,du parrain et de tous ceux qui de près ou de loin ont contribué à la reussite de cette manifestation.Que le seigneur vous le rende au centuple.J’invite tout le peuple burkinabé à faire bon usage de ce joyau architectural et culturel pour un developpement harmonieux de la localité.
    Paix à l’âme de l’illustre disparu.

    Par Prince alias el primo

  • Le 7 février 2017 à 09:24, par lagitateur En réponse à : Lanfièra : Le mémorial karamogoba Sanogo a été inauguré

    Voilà une très bonne action. Notre pays est très riche culturellement et nous passons notre temps à admirer et suivre les cultures des autres, tout simplement parce que les premiers responsables ne font rien pour la promotion de la notre. Beaucoup de vestiges historiques avec une grande signification ne sont pas exploités et restent méconnus du public. Je pense que les fils des localités concernés doivent approcher le Ministère chargé de la culture et du tourisme pour une éventuelle valorisation parce qu’ avec ce jeune Ministre peuhl (que j’admire beaucoup), les choses bougent encore. C’est un Mahamoudou bis. Il faut faire la promotion des sites touristiques nationaux pour inciter les burkinabè, à commencer par les premières autorités, à aller les visiter. Ailleurs, on nous a fait visiter des anciennes mines de sel, des mines de fer, de vieilles usines et autres grottes très insignifiants mais savamment habillés d’histoires passionnantes racontées par de guides spécialisés formés à l’université. Chez nous, vous rencontrerez sur places des jeunes chômeurs du village qui sont là parce qu’ils n’ont rien à faire. Le Ministère doit voir de ce côté là pour former de très bons guides, car ce que dira le guide touristique est très important dans ce que va retenir le visiteur du site. Bravo et courage au Ministre Tahirou BARRY.

  • Le 7 février 2017 à 15:09, par Ali En réponse à : Lanfièra : Le mémorial Karamogoba Sanogo a été inauguré

    Une photo du mémorial en question n’aura pas été de trop. Ou bien Monsieur David Demaison Nébié Correspondant de la Boucle du Mouhoun ?

  • Le 7 février 2017 à 17:26, par Mutumbila En réponse à : Lanfièra : Le mémorial Karamogoba Sanogo a été inauguré

    Bonsoir à tous. qui était Karamogoba Sanogo ? Pourquoi a t il été assassiné ?

  • Le 7 février 2017 à 18:03, par Mutumbila En réponse à : Lanfièra : Le mémorial Karamogoba Sanogo a été inauguré

    Merci à monsieur Bassirou Sanogo pour le complément apporté.