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« Aucune autorité n’a le droit, en dehors d’une décision de justice, d’interdire à un citoyen de quitter le territoire national », Zéphirin Diabré, chef de file de l’opposition

vendredi 8 juillet 2016.

 

A la demande du président du Faso, Roch Kaboré, tous les partis politiques de l’opposition se sont rendus au palais de Kosyam ce jeudi 7 juillet 2016. Conduite par son chef de file Zéphirin Diabré, l’opposition politique s’est entretenue avec le chef de l’Etat sur des questions liées à la situation nationale. A l’issue des échanges avec le président du Faso, le chef de file de l’opposition politique (CFOP) a souligné que les différentes préoccupations ont bénéficié de la part du président d’« une certaine attention ». Le président du Faso qui a reçu en deuxième audience le Balai citoyen, lauréat du prix « ambassadeur de conscience » 2016 de Amnesty International.

« Le président du Faso a souhaité rencontrer les partis de l’opposition pour échanger avec eux sur les questions portant sur la vie nationale. Cette rencontre se tient à la suite de l’audience qu’il m’a accordée il y a de cela deux semaines et au cours de laquelle, nous avons convenu d’un nouveau format de rencontres et de dialogues entre le chef de l’Etat et l’opposition dans son ensemble, lequel format nous conduira à avoir deux rencontres par an comme celle que nous avons eue aujourd’hui » a indiqué Zéphirin Diabré, chef de file de l’opposition politique burkinabè à sa sortie d’audience.

Ainsi, faisant l’économie des différents sujets abordés avec le président du Faso, le chef de file de l’opposition a souligné que le chef de l’Etat a manifesté « une certaine attention » à leurs différentes préoccupations.

Les problèmes sociaux, c’est la première préoccupation soumise au président. Qu’il s’agisse des questions d’éducation, de santé, d’emploi, les services sociaux de base, le pouvoir d’achat …. il y a selon Zéphirin Diabré, de nombreux problèmes sociaux qui assaillent les Burkinabè. « Il y a une misère sociale que tout le monde constate et nous savons bien que le chef de l’Etat en est conscient, mais il était important pour nous d’attirer son attention et souhaiter qu’il instruise son gouvernement pour qu’il prenne à cœur ces questions » a-t-il indiqué.

La situation économique étant également à l’ordre du jour, Zéphirin Diabré a expliqué qu’il était d’abord question des projets annoncés par le chef de l’Etat en la matière. « Le chef de l’Etat en se faisant élire, avait annoncé un certain nombre de projets. Nous souhaitons voir ces projets se matérialiser concrètement afin que l’économie puisse aller de l’avant » a-t-il souligné. Aussi, à ce sujet, Zéphirin Diabré a évoqué la question de la dette intérieure. « Beaucoup d’opérateurs économiques de notre pays ont des factures qui sont en souffrance au niveau de l’Etat. Tout le monde sait que si on ne procède pas au remboursement de cette dette, on ne permet pas à l’économie de respirer » a-t-il noté.

Pour cela, l’opposition politique a encouragé le chef de l’Etat à aller dans ce sens et dit être attentif à l’ensemble des mesures que le gouvernement sera amené à prendre. A cet effet, le responsable des partis politiques de l’opposition précise qu’il y a un nouveau référentiel de développement en cours d’élaboration. « Nous sommes attentifs à voir ce qu’il va apporter de plus à la SCADD et si nous sommes sollicités, nous verrons comment apporter notre contribution intellectuelle à l’amélioration de ce document » a-t-il dit.

Aussi a-t-il fait remarquer que de nombreux secteurs d’activités de notre pays sont en panne. Ce sont notamment les secteurs agricole et industriel. En réponse à ces préoccupations, l’opposition politique souhaite voir une action politique vigoureuse de relance.

La sécurité

La question sécuritaire, c’est bien l’une des préoccupations soumises au chef de l’Etat et qui anime les débats des burkinabè. De la circulation des biens et des personnes à l’intérieur du pays aux attaques djihadistes, la crainte des burkinabè est trop grande en la matière, selon Zéphirin Diabré. « Les attentes sont trop fortes. On souhaite voir rapidement une évolution tendant à montrer que nos forces de défense et de sécurité dûment entraînées et équipées font des progrès rapides en la matière » a-t-il ajouté.

La question des Koglwéogo n’étant pas en reste, l’opposition politique a livré son appréciation sur ce sujet. « C’est à l’Etat, dans sa grande souveraineté, de faire en sorte que l’ensemble des facteurs qui ont donné lieu à la naissance de ce phénomène soient éradiqués et de restaurer son autorité » a indiqué Zéphirin Diabré.

Une réforme du code électoral

Une autre question à l’ordre du jour est relative aux violences électorales et post électorales. En effet, le chef de file de l’opposition a fait le constat d’une vie politique émaillée de violences avec la mise en place des exécutifs locaux. « Ce n’est pas une bonne image de notre pays que nous avons offerte » a-t-il déploré.

Ainsi, l’opposition politique « interpelle le chef de l’Etat et son gouvernement afin qu’ils prennent les mesures qu’il faut, pour que les auteurs de ces genres d’actes soient identifiés, poursuivis, arrêtés et châtiés conformément à la loi ». Par ailleurs, une réforme du code électoral est attendue à ce niveau. L’objectif étant que les éléments de configurations politiques qui ont pu entraîner ces problèmes soient revus fermement. « Il n’est pas normal que des vies humaines soient perdues dans nos contrées à cause des questions de postes de maires, il n’est pas normal que nos populations se hachent à la machette pour des questions de mise en place d’un conseil municipal ».

La commission constitutionnelle

Quant à la question relative à la commission constitutionnelle, l’opposition politique reste sur sa position et ses observations faites lors de la première audience avec le chef de l’Etat. La composition de la commission est l’une des inquiétudes de l’opposition. « Ça été l’occasion pour nous de les répéter et de faire en sorte qu’elles soient prises en compte dans toute évolution qui viendrait d’ici à la mise en place pratique de la commission et dans le fonctionnement de celle-ci pour que les préoccupations soient dûment prises en compte » a-t-il renchéri.

La justice

La justice, deux questions complémentaires animent le débat sur ce point selon le chef de file de l’opposition. Il s’agit de l’indépendance de la justice et de sa célérité concernant le traitement des dossiers qui sont pendants. Pour ce qui est de la justice, Zéphirin Diabré précise : « nous sommes porteurs d’un message qui est celui que tous les Burkinabè portent : nous voulons une justice qui a les moyens de faire son travail, une justice indépendante, une justice qui agit avec célérité, qui nous explique parfois les décisions qu’elle prend, pour qu’on s’accorde ou on accepte de savoir s’il s’agit d’une décision indépendante ou si elle a été prise sous pression ».

Dans cette optique, la question liée à l’incivisme a été abordée. Selon l’opposition, ce phénomène grandissant que certains pourraient appeler « une sorte de révolte des faibles face à un certain nombre d’agissements de l’Etat, face à un mal vivre » doit être éradiqué.

La réconciliation nationale

Pour ce qui est de la réconciliation nationale, l’opposition politique dit souhaiter que le chef de l’Etat « prenne en charge et à main ce dossier, pour que dans le respect de la justice et de la loi et sans l’oubli de la mémoire historique, on puisse faire en sorte qu’à terme, les fils et les filles de Burkina puissent construire ce pays ».

Le financement des partis politiques

Les partis politiques ont besoin que les questions de financements de leur campagne électorale soient vues avec attention et pour cela, le chef de file de l’opposition dit déplorer le retard de décaissement de la subvention relevé à l’occasion de la récente campagne. « Pour des raisons que nous ne comprenons pas, la subvention qui revenait aux partis a été pour l’essentiel débloqué près de 3 à 4 jours avant la fin de la campagne ». A cet effet, les critères de répartition feront l’objet d’échanges et des travaux de réflexion au sein de la classe politique sont en vue pour aboutir à de nouvelles formulations.

En outre, les questions de rôle et de place de l’opposition politique au Burkina ont été évoquées. Du point de vue de l’opposition politique, il y a des améliorations qui peuvent être apportées pour la « place institutionnelle de cette opposition dans la vie Publique ».

La liberté d’aller et de venir

L’opposition politique dit déplorer les différentes entraves dont ont été victimes certains leaders de partis politiques de l’opposition (allusion faite à Achille Tapsoba et Zambendé Théodore Sawadogo respectivement président par intérim et trésorier du CDP, ex parti au pouvoir), lorsque voulant se rendre à l’étranger, ils se sont vus interdire de quitter le territoire national. « Je peux dire que la réponse du chef de l’Etat nous a donné satisfaction à ce niveau. Le chef de l’Etat a tenu à nous présenter ses excuses pour ce qu’il appelle des malentendus et des erreurs et a pris l’engagement devant nous, que ces genres d’entraves ne se reproduiront jamais. Ce qui nous a ravi au plus haut point » a laissé entendre Zéphirin Diabré.

A cet effet, le porte-parole de l’opposition politique soutient qu’il s’agit de la défense d’un principe, la liberté d’aller et de venir, non pas d’opposants mais pour tout Burkinabè. « Il n’est pas normal, que dans un Etat normal, que des décisions de ce genre soient prises sans fondement juridique. Aucune autorité, quels que soient son niveau, son titre, son pouvoir, n’a le droit, en dehors d’une décision de justice, d’interdire à un citoyen de quitter le territoire national….Au-delà du gouvernement, nous voulons que l’ensemble des Burkinabè ait cette compréhension » a-t-il signifié.

Le Balai citoyen présente son prix au chef de l’Etat

La deuxième audience présidentielle du jour a été accordée au Balai Citoyen. Lauréat du prix « ambassadeur de conscience » 2016 de Amnesty International, le Balai citoyen est allé présenter son prix au président du Faso ce 7 juillet 2016. « Lorsque nous avions reçu ce prix, nous avons dit qu’à travers nous, c’était la jeunesse burkinabè et particulièrement le peuple burkinabè qui a été honoré. Raison pour laquelle, nous sommes venus ce matin pour présenter ce prix au chef de l’Etat, étant le premier magistrat de ce pays » a indiqué Guy Hervé Kam, porte-parole du mouvement.

Selon Guy Hervé Kam, ce prix les invite à poursuivre le travail dans le sens du renforcement de la démocratie au Burkina et en Afrique. Aussi, il s’agit d’une interpellation, une interpellation de la jeunesse burkinabè, de la jeunesse africaine à continuer à se battre, à prendre en charge l’avenir de nos pays.

Dans cette dynamique, le porte-parole du Balai citoyen a souligné que le président leur a exprimé sa reconnaissance. « Le chef de l’Etat nous a invités à persévérer dans le travail qui nous a valu ce prix et à toujours continuer à mériter la confiance à l’international et au Burkina » a-t-il confié.

Nicole Ouédraogo
Lefaso.net



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