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Mouvements au RSP : Saura-t-on vraiment le nœud du problème ?

mercredi 1er juillet 2015.

 

On croyait les divergences aplanies au sein du Régiment de sécurité présidentielle. Les derniers évènements viennent pourtant rappeler le climat délétère qui y couve. Des remous qui interviennent à un moment où la dissolution du régiment ne semble plus à l’ordre du jour, à en croire le Premier ministre ‘’ himself ’’ devant le CNT, et le rapport de la commission de réflexion sur la restructuration du RSP. Alors, on ne peut s’empêcher de s’interroger sur les réelles motivations de ces sauts d’humeur au sein de la garde prétorienne. Certains commandos sont-ils manipulés ? Par qui et à quelles fins ?

Le 30 décembre 2014, le Premier ministre (PM) Isaac Yacouba Zida aurait été entendu et « humilié » par ses anciens compagnons d’armes. Pour cause, les hommes ne comprenaient pas pourquoi le chef du gouvernement, poussé par une frange de la population, voulait renverser la calebasse avec le lait, après y avoir, lui-même bu abondamment. Ils s’opposaient donc farouchement à la dissolution de leur unité. La tension était née, la transition enregistrait sa première crise, qui, loin de connaître un dénouement, fut simplement reportée.

Quelques mois après, soit le 4 février 2015, des rumeurs font état de menaces d’éléments du RSP contre le Premier ministre, obligeant le chef du gouvernement à se réfugier chez le Mogho Naaba et entraînant l’annulation du conseil des ministres. Les bruits de bottes entendus depuis Kosyam s’accompagnent de revendications. Les anciens frères d’armes du Premier ministre demandent sa démission, et avec lui, l’ensemble des militaires qui sont dans les instances dirigeantes de la transition.

Une médiation est engagée, finalement les soldats finissent par « tolérer » la présence des « milos » dans le gouvernement et autres instances de la transition. L’acte fort de cette énième crise est la mise en place par le Président Michel Kafando d’une commission de réflexion sur la restructuration du RSP. Fin des tambouilles ?

Le Premier ministre qui occupait le devant de la scène depuis l’insurrection se met alors en retrait. Ses sorties sont rares, il parle désormais peu et ne fait plus de promesses. Dès lors, il multiplie les sorties à l’extérieur du pays. C’est justement depuis les Etats-Unis que Isaac Yacouba Zida fait un volte-face. Celui qui voulait la dissolution du RSP fait un retournement spectaculaire. Il confirmera plus tard ses dires le 12 juin dernier devant les députés à l’occasion de son discours sur la situation de la nation. « Je voudrais préciser devant votre auguste assemblée que l’armée a besoin du RSP, le pays a besoin du RSP. Nous sommes en train de travailler pour lui donner beaucoup plus d’importance, lui donner une bonne place au sein de la nation. On ne peut dissoudre un régiment de cette façon. Comme le dirait quelqu’un, si vous tuez votre chien parce qu’il n’aboie pas, c’est la chèvre du voisin qui va vous mordre. Ça fait 20 ans que je suis au RSP, je connais les capacités de ce régiment, je confirme que nous en avons besoin » avait-il déclaré au CNT. Chapitre clos après ces propos qui sonnaient comme un mea culpa vis-à-vis de ses anciens compagnons d’arme qu’il avait heurtés ?

Quelques jours plus tard, le rapport de la commission de réflexion sur la restructuration du RSP, commandé par le Président Michel Kafando allait dans le même sens que le chef du gouvernement. « La commission a estimé que le maintien du régiment comportait beaucoup plus d’avantages au plan militaires et politiques que sa dissolution. Toutefois, ce maintien devrait s’accompagner de quelques modifications organiques et structurelles afin de prendre en compte les nouvelles réalités sur le terrain » reconnaît le document final qui argue par ailleurs que la dissolution du RSP créerait un vide, multipliant du même coup les risques de prises de pouvoir par la force.

Que cachent les nouvelles manifestations ?

Alors que Zida et ses hommes semblaient désormais parler le même langage, c’est avec stupéfaction que les Ouagalais ont entendu des tirs nourris dans la nuit du 29 juin. Cette fois, les soldats manifestent leur mécontentement suite à l’audition par la gendarmerie ce lundi des principaux responsables du RSP, à savoir le Lcl Céleste Coulibaly, les capitaines Abdoulaye Dao et Flavien Kaboré, sur la base d’une rumeur de projet d’arrestation du PM à son retour de Taiwan.

« La troupe, indignée du harcèlement permanent de certaines autorités de la Transition et des OSC à leur solde, a manifesté un ras-le-bol par des remous assez vite maîtrisés par les premiers responsables » a indiqué plus tard le RSP dans un communiqué pour justifier le mécontentement de certains membres de la troupe.

Les mutins auraient exigé une fois de plus, la démission du Premier ministre Isaac Yacouba Zida, de tous les militaires qui occupent quelques postes dans la transition et la nomination d’un Premier ministre civil. Pour quelle raison, puisqu’il y a désormais un motus vivendi sur ce qui semblait être la pomme de discorde, la dissolution du RSP. Finalement, c’est quoi le problème, se demandera l’autre ?

La hantise et les questionnements au sein de l’opinion sont d’autant plus fondés que le communiqué du RSP laisse entrevoir des clans en son sein. Des clivages au sein même de l’unité d’élite. « Des tirs en l’air pour créer la zizanie ont été entendus, occasionnés par des éléments proches du PM Zida qui ont vite été maîtrisés sans violence par leurs frères d’armes ». Cette fois, l’affaire semble plus sérieuse et tout laisse croire qu’il y a des non-dits dans cette affaire Zida-RSP.

Manipulation ? Faits religieux ? C’est l’incertitude et le flou qui n’augurent pas des jours paisibles à la Transition et un sommeil paisible aux populations qui semblent être prises en otage.

Tiga Cheick Sawadogo
Lefaso.net



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