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Burkina – Espagne : « Ce pays t’enseigne tellement de choses que lorsqu’on y revient, on pense déjà à la prochaine expédition ! » Dixit Dr Angela ALMELA ESTEVE de l’ONG AMOR EN ACCIÓN

vendredi 26 juin 2015.

 

Angeles ALMELA ESTEVE, 60 ans, est médecin-pédiatre à Burriana (région de Valence) où elle a créé avec d’autres collègues médecins et éducateurs sociaux l’organisation non gouvernementale dénommée Amor en Acción (Amour en Action). L’idée est venue lors d’un voyage de tourisme en septembre 2013 où dame Angeles et son groupe avaient dédié deux semaines de leurs vacances d’été à la collaboration avec REMAR-Burkina, autre ONG espagnole qui s’occupe des enfants de la rue. C’est suite à cette courte mais riche expérience qu’ils ont décidé sur place de fonder AMOR EN ACCIÓN dans l’objectif d’améliorer la qualité de vie des personnes vulnérables. En 20 mois d’existence, nos amis coopérants ont effectué déjà six expéditions au Burkina et ont à leur actif, une école à Laye (35km de Ouaga), un centre de santé à Kossodo -périphérie nord de Ouaga- et sont fin prêts pour réaliser des forages dans quelques zones où le manque d’eau est criard. En visite à notre Consulat Honoraire à Valence (le jeudi dernier) -accompagnée de son Secrétaire M. Rafael MARCO MOLES- pour faire le point de leurs différentes expéditions humanitaires à Monsieur Hilario TERUEL MONTANER, Consul honoraire dans cette juridiction, nous avons profité tendre le micro à la première responsable pour en savoir plus sur cette jeune mais très dynamique Organisation Humanitaire. Rencontre !

Lefaso.net : Dr Almela, vous êtes spécialisée en pédiatrie et responsable de l’ONG Amor en Acción que vous avez décidé de créer alors que vous étiez au Burkina pendant votre premier voyage de découverte de l’Afrique subsaharienne. Parlez-nous de ce premier contact avec le pays des hommes intègres

Angeles Almela (AA) : Merci de vous intéresser à nous et à ce que nous faisons. Mais avant tout propos, je voudrais juste dire que ce que nous faisons, nous le faisons pour nous-mêmes. Nous n’avons besoin ni de médailles, ni de reconnaissance officielle ; car nous le faisons pour « nos enfants et petits-enfants » qui vivent en difficulté et qui ont besoin d’appuis multiformes. Sur ce, c’est en septembre 2013 que cinq collègues et moi, avions décidé de réserver deux semaines de nos vacances pour des actions humanitaires en Afrique cette fois-ci. Nous avions déjà été en Amérique Latine et en Asie du Sud-Est. Après avoir contacté plusieurs ONGs en Afrique, c’est REMAR-Burkina qui nous répondît immédiatement et recommandât de considérer le Burkina Faso ; pays où ils y sont déjà depuis plus de deux décennies en appui aux enfants de la rue et autres personnes vulnérables. C’est donc grâce à REMAR que nous collaborons aujourd’hui avec votre pays comme ONG à part entière.

Lefaso.net : Qu’est-ce qui vous a le plus impactée à votre arrivée au Burkina Faso pour la première fois ?

AA : Ouuf… (Soupire). D’abord nous avons vu un pays très pauvre, sans assez de ressources face aux multiples maladies, mais des hommes et femmes intègres qui essaient d’améliorer leur vie au quotidien. C’est vrai que REMAR nous avait signalé au préalable qu’il s’agissait d’un des pays les plus pauvres du monde mais sur place nous avons aussi vu que les habitants de ce pays sont courageux et ne baissent pas les bras même devant les pires problèmes d’existence qui peuvent leur advenir. C’est pourquoi d’ailleurs nous avons décidé sur place d’apporter notre contribution dans l’amélioration des conditions socio-sanitaires pour un mieux-être des personnes malades et très démunies.

Lefaso.net : Dites-nous plus sur ce premier voyage au Burkina il y a de cela vingt mois. Qu’avez-vous fait après ces moments d´émotions fortes qui suivirent votre arrivée pour la première fois ?

AA : En effet dès notre arrivée les responsables locaux de REMAR nous avaient conduit à notre quartier général situé à Kossodo (ndlr : au centre de Réhabilitation de REMAR) où nous avions monté immédiatement notre clinique car chacun de nous avait voyagé avec son trousseau de consultation en plus de deux valises remplies de médicaments et autres produits médicaux. Ensuite ont suivi consultations non-stop, soins, jeux socio-éducatifs durant tout le séjour et aussi bien à Kossodo, à Saaba qu’à Laye. A vrai dire nous n’avions pas arrêté et c’est lorsque nous nous sommes rendu compte qu’il en fallait beaucoup plus que l’idée nous est venue de fonder notre ONG humanitaire.

Lefaso.net : Il y a de cela deux semaines vous avez présenté officiellement l’ONG que vous dirigez à la Municipalité de Vila-real. C’est quoi l’objectif visé en organisant cet événement dans les locaux de cette mairie ?

AA : Vous savez que sans soutien de part et d’autre, il est difficile de réaliser nos projets que nous avons pour les personnes vulnérables des villes et campagnes du Burkina. Nous avons voulu joindre l’utile à l’agréable en organisant un événement culturel où des artistes et poètes étaient invités à y participer. Entre deux prestations nous présentions nos activités au Burkina, les images de progression de nos projets d’écoles et de centre de santé, les problèmes existentiels que vivent les enfants et personnes démunies…Bref, nous avons voulu sensibiliser les citoyens de Vila-real et recueillir leur contribution pour la réalisation de nos projets. J’avoue que les gens ont répondu positivement ; c’est le lieu de remercier cette mairie et ses habitants. Il y en avait même des gens qui coulaient des larmes au vu des images. Par ailleurs, c’est l’Université Polytechnique de Valence qui a promis de nous accompagner dans notre projet de forage et d’assainissement ; nous leur exprimons également notre profonde gratitude.

Lefaso.net : Et quid du burkinabè dont vous avez sauvé le bras de l’amputation en l’évacuant à l’Hôpital LA FE de Valence ?

AA : (hésitations...) A vrai dire je ne voulais pas faire cas de cela dans votre journal car la santé est un domaine sensible et les agents de santé sont tenus à la réserve… mais bon ! En effet, comme je vous l’ai dit auparavant, en vingt mois d’existence nous avons déjà effectué six voyages au Burkina. C’est lors d’un voyage que nous avions croisé cet homme souffrant et à la fois très apeurée à l’idée que son bras serait amputé dans les jours à venir car d’après lui, il n’y avait plus de solution miracle. Nous avons été tellement sensible que les deux semaines qui ont suivi, nous achevions les procédures d’évacuation en Espagne grâce aussi au geste de solidarité de cet hôpital. L’intervention chirurgicale s’est très bien passée et aujourd’hui encore, le monsieur en question est toujours à Valence et continue sa réhabilitation pour encore deux mois. Il est très content de ce qui lui est arrivé…

Lefaso.net : Merci, Docteur !

AA : Moi je dis merci à l’Hôpital LA FE de Valence !

Lefaso.net : On imagine que souvent vous avez été confrontés à des difficultés d’ordre administratif dans l’exercice de vos activités sur le terrain au Burkina. Si oui, avez-vous de petites remarques à faire pour rendre agiles vos démarches en vue d’aider les personnes vulnérables qui sont vos cibles ?

AA : A vrai dire, en ce moment nous sommes à l’aise pour ce qui concerne toute démarche ; même le terrain du centre de santé que nous avons en projet a été offert gracieusement par le maire de cette commune rurale. Mais je voudrais dire que nous formons une équipe de professionnels et partons au Burkina pour travailler à aider les populations vulnérables. Et pourtant au début, quelques responsables sanitaires des endroits où nous partions nous mettaient même des restrictions. Il y a plus pressant qu’une personne malade issue d’une couche vulnérable ?

Lefaso.net : A mon avis, non… !

AA : Maintenant nous nous sentons comme un autre chez-nous lorsque nous sommes au Faso ; et même avant d’y aller. D’abord c’est ce consulat honoraire (ndlr ; où nous l’avons rencontré) qui nous facilite en un jour seulement les visas d’entrée au Burkina. Et si nous cherchons telle ou telle autre information sur le Burkina c’est ici que nous nous dirigeons. Justement en août prochain, une expédition de huit personnes du corps médical voyagerait au Burkina, chacun avec deux valises de médicaments et autres consommables. Une partie de l’argent collecté ici leur servirait à acheter des médicaments contre le paludisme sur place à Ouaga. Ils participeront aussi à l’achèvement et l’inauguration officielle de l’école que nous avons construite à Laye.

Lefaso.net : Cela va droit au cœur….. Je n’ai plus rien à dire !

AA : Donc ne dites rien (rires). Sachez que vous avez un pays avec des ressortissants merveilleux ; la chaleur humaine, l’éternel sourire des enfants et leur sympathie malgré toutes les souffrances. Les hommes et femmes qui ne rechignent pas devant un dur travail, le plus souvent ingrat, la majestueuse présence du baobab aussi… c’est comme ça que je définis le pays des hommes intègres !

Lefasonet
Entretien réalisé et retranscrit par Roland ZONGO SANOU
Correspondant en Espagne



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