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Consolidation de la démocratie au Burkina post-insurrection : Un encadrement de la société civile et de la classe politique s’impose

samedi 17 janvier 2015.

 

Incontestablement, c’est surtout l’action conjuguée de la classe politique et de la société civile qui a permis la mise en marche de la transition dirigée par Michel Kafando. Mais à l’inorganisation de plus en plus affichée de la société civile, s’ajoute la ruée des partis politiques dans des campagnes déguisées alors même qu’ils ne rassurent pas quant à l’offre politique. Ces acteurs, que peuvent-ils dans un tel contexte, apporter dans le cadre de la consolidation démocratique dont les bases doivent être posées au cours de la transition ? En tout cas, pas de gages sûrs. Il est donc temps d’attirer l’attention, sinon de travailler à faire rectifier le tir.

Débutées comme des séances d’expression de reconnaissance à l’égard des populations qui ont courageusement mené l’insurrection populaire les 30 et 31 octobre 2014, ce sont aujourd’hui, de véritables campagnes électorales que mènent nombre de partis politiques. Du moins, c’est ce que font ceux d’entre eux qui ont de l’argent à s’en servir comme moyen de démonstration de force. Des meetings sous les couleurs de partis politiques, le plus souvent de grande taille, et au cours desquels « les militants » sont invités « à se tenir prêts » pour les élections à venir. Ces meetings, ce ne sont pas les militants ordinaires qui les organisent et les président ; ce sont les leaders politiques eux-mêmes qui le font. En tout cas, on les sent trop focalisés sur les élections à venir, au point que l’on en arrive à douter de leur implication dans la marche de la transition. Et là, il y a lieu de s’inquiéter, car la réussite - à travers des élections crédibles et à résultats acceptés - dépend prioritairement d’eux. S’il est légitime que les partis politiques tiennent leurs ‘’troupes ‘’en haleine, il est aussi primordial qu’ils accompagnent effectivement les autorités de la transition par l’action et par la réflexion.
Quant aux organisations de la société civile (OSC), on les savait disparates ; mais les divergences sur fond d’inorganisation inquiétante ont pris de l’ampleur depuis la mise en place des organes de la transition. En témoignent les guerres de chiffonniers qui ont surgi dans le cadre de la désignation des représentants des OSC au Conseil national de la transition (CNT). Au lieu de s’afficher en forces motrices unies en ces moments particulièrement sensibles aux dérives, les OSC burkinabè versent dangereusement dans la division ; et pire, dans l’intoxication par endroits. Si l’on doit entrer en période de campagne électorale avec ces tares, la consolidation démocratique tant attendue ne pourra évidemment pas s’instaurer.

S’investir sérieusement

Ce qu’il faut avoir à l’esprit, c’est qu’il n’y a véritablement pas de garantie que l’insurrection populaire aboutisse de soi à la consolidation de la démocratie dans notre pays. Il faut absolument que tous les acteurs, avec au premier chef la classe politique et la société civile, s’investissent sérieusement en mettant en veilleuse leurs calculs corporatistes.
Pour cela, il importe que les acteurs externes dont la communauté internationale et régionale, les sociétés savantes, les OSC actives dans la réflexion aux fins d’aide technique, travaillent à encadrer aussi bien la société civile dans son ensemble, que la classe politique. Dans ce sens, le Centre pour la gouvernance démocratique (CGD) et le Centre pour la démocratie et le développement (CDD) se donnent la main pour aider, non seulement les OSC à mieux s’organiser face aux enjeux du moment, mais aussi les partis politiques à se doter d’offres politiques alléchantes et à développer l’esprit de fair-play à l’occasion des compétitions électorales. Attendons donc de voir l’impact de la mise en œuvre par ces deux Centres, de leur pédagogie sur fond de recherches.

Fulbert Paré
Lefaso.net