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Bobo-Dioulasso : Les travailleurs de la SAP sont dans la contestation

lundi 12 janvier 2015.

 

Dans la série des entreprises en ébullition depuis l’insurrection populaire, il faudra compter désormais la Société africaine de pneumatique (SAP Olympique). Vendredi 09 janvier 2015, des travailleurs de cette industrie implantée à Bobo-Dioulasso ont manifesté pour l’application d’une décision de justice et l’amélioration des conditions de travail (augmentation de salaire).

« Nous voulons nos quatorze (14) mois. C’est une décision de justice. La SAP doit nous payer nos 14 mois d’indemnités de logement et de taux d’échelon comme notifié par la cour d’arbitrage. C’est ce que les travailleurs réclament. Nous les délégués, nous n’y sommes pour rien. En plus de cela, nous réclamons une grille salariale sur la base des conditions d’industries de caoutchouc, on veut une augmentation de notre dotation en pharmacie », ainsi s’est exprimé un des délégués du personnel de la SAP Olympique suite à l’assemblée générale voulue par la directrice de cette entreprise. Terminée en queue de poisson après un exposé de la direction générale sur la situation financière de la SAP, cette assemblée générale a plongé le leader de la pneumatique burkinabè dans le lot des entreprises en ébullition depuis l’insurrection populaire. S’ils ne demandent pas le départ de leur DG comme il est de coutume ces derniers temps, les travailleurs de la SAP exigent tout de même la satisfaction immédiate de leur plateforme revendicative.

Version des faits d’Isabelle Garango, la Directrice générale de la SAP : « Comment voulez-vous que je m’engage de façon pérenne à trouver ces sous »

En 2012, nous avons eu un cahier de doléance de la part du personnel. Dans ce cahier de doléance il y avait principalement deux points. Un relèvement de l’échelon et l’indemnité de logement pour tous les travailleurs. Vous connaissez le tissu industriel burkinabè, on boite et on a du mal à survivre. On a cédé sur certains points à savoir la pharmacie, la relecture de l’accord d’établissement... Ces deux points ont entrainé des augmentations de charge de plus de 70 à 80 millions de francs CFA alors qu’on ne fait pratiquement plus de bénéfices. Les autres dossiers sont partis à l’arbitrage et la sentence a été rendue en faveur des travailleurs. Il faut savoir qu’entre temps, on avait un avocat qui s’est désisté pendant la procédure d’arbitrage, parce que le tribunal demandait des documents du conseil d’administration. Ce qui n’était pas possible à notre niveau, c’est le conseil d’administration qui peut faire cela. Le temps pour nous de retrouver un autre avocat, le délibéré de la sentence était déjà tombé à notre défaveur. Vu l’impact financier, la société allait difficilement survivre. Avec notre nouvel avocat, nous sommes donc allés en cassation parce qu’il y avait des choses à dire sur la forme de la sentence. On a même eu à contacter le ministre du travail pour cela. On était dans l’attente de cette procédure. Il faut savoir aussi que l’année 2014 a été très mauvaise pour la SAP. Notre chiffre d’affaire a baissé de plus de trois cents millions et on a produit pour moins de cinq cent (-500 000 000) millions comparativement à l’année précédente. Dans ces conditions Il est clair que notre situation ne s’est pas améliorée et qu’il est par conséquent difficile de prendre en compte certaines demandes des travailleurs. Mais avec les évènements de fin octobre (insurrection populaire, il y a comme un vent de folie qui se dégage un peu partout. Il y a des grèves ou des préavis de grève partout, les ouvrier pensent maintenant qu’il suffit de dire on veut ça et on l’aura. Les gens pensent que Zida (le premier ministre burkinabè) peut tout résoudre ou va diriger à la place des entrepreneurs. Je remercie au passage des délégués du personnel qui tentent d’expliquer notre situation si particulière. Nous sommes des burkinabè, avec des capitaux burkinabè et nous ne sommes pas là pour rapatrier des fonds à l’extérieur. A plusieurs reprises, j’ai essayé d’expliquer notre situation aux délégués tout en faisant des propositions. Il y a même une commission qui travaille pour nous permettre de proposer des choses. La direction travaille également à soumettre un document aux employés. Nous envisageons de suspendre le recours à la cassation tout en relisant l’accord d’établissement et en réfléchissant sur ce qui est supportable par notre entreprise. De commun accord, on compte trouver un auditeur pour faire le point sur la situation financière de l’entreprise. Notre problème est que les travailleurs pensent que la SAP se porte bien. Ils font des calculs à eux et ils trouvent des chiffres qui sont loin de la réalité. Je ne connais pas beaucoup de société qui sont prêtes à trouver un auditeur neutre pour situer les uns et les autres. Je suis pour la transparence, je ne vois pas la nécessité de mentir à mes travailleurs. Cette année par exemple, la rentabilité de la SAP ne va pas être liée à l’exploitation. Et pourtant, Ils ont refusé mes propositions et ils exigent leur indemnité et leur logement. Ils voient par eux même que les choses sont compliquées. Notre production a baissé de 30% en pneumatique, de 6%en chambre-aire et la productivité qui est liée aux hommes nous a fait perdre 438 millions cette année… Notre chiffre d’affaire a baissé de 6%. Comment vous voulez-vous que je m’engage de façon pérenne à trouver des sous dans ces conditions. Pour moi, Il vaut mieux négocier et essayer de trouver ce que l’on peut faire ensemble pour que ça aille mieux. Il nous faut travailler pour arriver à une amélioration des conditions. Mais malheureusement, les employés ont déjà fait leur calcul et ils sont basés la dessus. A la SAP, on essaie de réduire aux maximums nos charges pour pouvoir continuer à travailler et à payer 400 personnes actuellement dont 150 permanents. On fait ce qu’on peut.

Ousséni BANCE
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